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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°36, 12 septembre 2011  >  Le centralisme appauvrit l’Europe [Imprimer]

Le centralisme appauvrit l’Europe

La diversité favorise la prospérité

par Hermann Otto Solms, député libéral (Allemagne)

Pendant les vacances, l’Europe devient une réalité particulièrement concrète. Les Autrichiens se rendent en Espagne, les Néerlandais dans la moyenne montagne allemande et les Allemands ne vont pas seulement à Majorque.
Nous autres Européens sommes curieux de connaître les coutumes des pays et leurs habitants. La richesse des langues, de l’architecture, de la littérature, de la musique, de la peinture et surtout la diversité culinaire sont impressionnantes. Cela n’existe pas aux Etats-Unis où tout est nivelé.
Je viens de Lich, localité située entre Wetterau et Vogelsberg, dans le district dont Gießen est le chef-lieu, en Hesse, en Allemagne, en Europe. Par conséquent, je suis un citoyen de Lich, de Gießen, de Hesse, d’Allemagne et d’Europe, et avec grand enthousiasme.
L’Europe est unie en raison de son histoire commune et de ses valeurs chrétiennes, par son attachement à la démocratie, aux droits humains, à l’Etat de droit, à la séparation des pouvoirs et, avant tout, à la liberté. Nous autres Européens aspirons à un niveau éducatif élevé, à des systèmes sociaux et sanitaires efficaces et à la prospérité. Il serait fallacieux de conclure de ces points communs que l’Europe doive évoluer vers un ensemble unitaire, car c’est justement la diversité qui fait l’Europe.
A l’idée de diversité est étroitement associé le principe de subsidiarité qui veut que lorsqu’un problème surgit, il revient à la plus petite entité de le résoudre et que seules les questions qu’on ne peut pas résoudre à ce niveau-là sont réglées à l’échelon supérieur. «Les petites unités viennent avant les plus grandes», «les affaires privées passent avant les affaires publiques» et ce qui est décentralisé a la priorité sur ce qui est centralisé.»
L’intégration européenne n’est pas un but en soi. Après les horreurs des deux guerres mondiales, il était juste, voire absolument nécessaire, de surmonter les anciennes rivalités et de créer un ordre pacifique stable. De nos jours, il nous faut également une politique de paix et de sécurité ainsi qu’une politique étrangère qui nous permette de parler d’une seule voix dans le monde. Depuis la fin de la guerre froide en tout cas et de l’élargissement de l’UE à l’Est, il s’avère que l’Europe doit se développer organiquement sur la base de la libre volonté de ses citoyens. Wilhelm Röpke a appelé cela l’«intégration par le bas». Dans la crise de l’euro, le principe de subsidiarité paraît passer au second plan: la souveraineté nationale est considérée comme une idée surannée. Or cela sape les fondements démocratiques sur lesquels repose l’Europe. La formation de l’opinion politique a lieu aux niveaux local, national ou européen. Les parlements sont l’endroit où sont prises les décisions légitimées démocratiquement. Il ne faut absolument pas déléguer les décisions à des commissions qui n’ont aucune légitimité et auxquelles le peuple souverain ne peut pas demander de comptes. Quiconque veut contourner les parlements ou limiter leur pouvoir mésestime les citoyens et met en danger la démocratie.
Les décisions doivent être prises à l’échelon politique qui assume la responsabilité des conséquences financières vis-à-vis des citoyens. Celui qui prend des risques, par exemple en adoptant un budget impliquant un endettement, doit en assumer la responsabilité. La rejeter au niveau commun­autaire constitue une violation non seulement du principe de subsidiarité mais aussi du principe démocratique. C’est d’ailleurs incompatible avec les critères d’efficacité économique. Ce qui, dans la crise de l’euro, est présenté comme un acte de solidarité va à l’encontre des principes fondamentaux.
En créant des moyens de rejeter sur les autres pays les conséquences de sa propre politique d’endettement, on incite les pays à se comporter d’une manière non solidaire et qui nuit à la stabilité.
La solution consiste à se souvenir des fondements de l’idée européenne: l’Europe ne peut rester forte et attractive que si elle manifeste sa cohésion vis-à-vis de l’extérieur et qu’elle entretient sa diversité à l’intérieur. C’est pourquoi nous devrions continuer à développer la politique étrangère et de sécurité commune. En outre, il s’agit d’imposer des conditions générales au marché commun et de fixer des objectifs macro-économiques communs. Il faudrait laisser aux parlements élus le choix des instruments destinés à atteindre ces buts. Toute autre tentative d’uniformisation conduirait à saper les responsabilités et serait un sacrilège envers la belle diversité de l’Europe. En uniformisant les divers pays d’Europe, nous mettrions en danger tout ce qui fait notre richesse.    •
 
(Traduction Horizons et débats)