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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°28, 18 juillet 2011  >  Une formation pour éviter l’exode rural [Imprimer]

Une formation pour éviter l’exode rural

Paraguay

La maturité technicoagricole pour le monde d’aujourd’hui et de demain

par Karl Schuler

Dans une école atypique de la commune de San Miguel au Paraguay, 125 jeunes apprennent à pratiquer l’agriculture traditionnelle en recourant à de nouvelles méthodes. Objectif: assurer la subsistance des familles et atténuer l’exode rural.

«Appelez-moi Mari; ici, au Colegio, tout le monde me surnomme ainsi», nous confie Maria Nilsa Gonzales, âgée de 18 ans. Après six ans d’études, elle va bientôt passer sa maturité technico­agricole, tout comme 20 autres filles et garçons du même âge. Mari est la cadette de six enfants d’une famille de petits paysans. Elle leur rend visite une fois par mois bien qu’ils habitent à 250 km de distance. A l’école secondaire bilingue «Ko’ê Pyahü» (nom guarani qui signifie «nouveau jour»), que tout le monde appelle en espagnol «Colegio», elle a non seulement reçu une formation théorique, mais aussi appris à confectionner du pain dans la boulangerie de l’établissement et acquis les bases de la culture organique dans le cadre de l’exploitation agricole qui s’étend sur près de 30 hectares. Elle s’apprête à effectuer une année de stage dans une ferme, tout en nourrissant le rêve de poursuivre des études vétérinaires plus tard.

Quand les paysannes fondent une école

Dans le département de San Pedro, à 200 km au nord de la capitale Asunción, les associations de petits paysans sont particulièrement actives et ont déjà fondé l’organisation ACADEI au début des années 90. Dans cette région pourtant fertile, l’exode rural était très important. Les gros producteurs de soja tournés vers l’exportation exerçaient une pression de plus en plus forte sur les petits exploitants de deux à trois hectares et l’utilisation massive de pesticides mettait et met encore en danger la santé de la population rurale. En grandissant, les enfants des agriculteurs ne voyaient pas de perspectives d’avenir à la campagne et partaient à Asunción ou dans une autre ville dès qu’ils avaient achevé l’école primaire. Là-bas, les plus chanceux trouvaient un travail peu qualifié, les autres sombraient dans la misère. Dans ce contexte difficile, les paysans, notamment ceux engagés dans ACADEI, prirent l’initiative de fonder, avec l’aide de la Croix-Rouge suisse (CRS), le Colegio agricole de la commune de San Miguel.
Dès le départ, les parents étaient représentés dans le conseil de l’école et participaient à la définition des programmes scolaires. Ils désiraient que leurs enfants reçoivent une formation agricole pratique en plus des branches générales, qu’ils acquièrent les méthodes culturales adaptées à une agriculture majoritairement biologique et qu’ils bénéficient d’une formation culturelle. Aujourd’hui, l’établissement aménagé en internat emploie 24 enseignants et compte 125 étudiants répartis dans six classes allant du niveau secondaire à la maturité. Il est reconnu et soutenu par l’Etat et fait figure de modèle au Paraguay.

Sésame plutôt que soja

Une visite de l’exploitation agricole permet de se rendre compte de l’immense diversité de l’agriculture subtropicale au Paraguay. En groupes et sous la direction d’instructeurs, les jeunes prennent soin d’une petite plantation de bananiers, d’arbres fruitiers, de haricots et de maïs ainsi que d’un jardin de plantes médicinales comportant plus de 80 essences. L’apiculture et l’élevage de poulets et de porcs font également partie de la formation et assurent une subsistance à cette grande communauté. Les étudiants confectionnent eux-mêmes les repas sous la houlette d’une cheffe de cuisine et apprêtent de manière délicieuse la viande des animaux dont ils se sont occupés.
 Pour survivre, les petits paysans doivent produire des denrées destinées non seulement à leur propre consommation, mais aussi au marché régional ou international. Il serait alors tout naturel de cultiver du soja, mais il est impossible de concurrencer les grands propriétaires fonciers. C’est pourquoi le Colegio a introduit avec succès la culture biologique du sésame et les paysans de la région profitent déjà de cette initiative. Le climat subtropical est particulièrement bien adapté à cette plante, qui est prisée autant sous la forme d’huile que d’épice. Le Japon, notamment, importe de grandes quantités de sésame depuis le Paraguay.     •

Source: Magzine «inter.actio – coopération internationale de la Croix-Rouge suisse», été 2009, © CRS, Karl Schuler