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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°17, 4 mai 2009  >  Courrier des lecteurs [Imprimer]

Courrier des lecteurs

Ethique et morale

Les propos de l’éthicien Thielemann ont fâché les lecteurs du quotidien «Neue Zürcher Zeitung» (16/4/09) et je vous rappelle qu’autrefois il existait des catégories bien distinctes: «L’éthique», c’était de la philosophie morale, c’est-à-dire des réflexions sur la morale; en revanche, la «morale» désignait un ensemble de valeurs et de règles en vigueur. Suite à la mondialisation et à l’importance croissante que prend la finance, certains représentants de la corporation des éthiciens font coïncider les deux, abolissant précisément ce pour quoi le contribuable les paie: la réflexion sur la morale.
Un lecteur a reconnu en Monsieur Thielemann un fanatique. Et je me suis demandée si une éthique qui ne distingue plus philosophie morale et morale était encore digne d’être considérée comme une science. Les soi-disant éthiciens s’arrogent-ils de manière absolutiste le droit de disposer de la seule véritable morale? Dans les domaines social et juridique également, on souligne malheureusement depuis des années que ce qu’on fait n’a rien à voir avec la morale. Ici également, c’est le terme d’«éthique» qui sert à imposer des intérêts professionnels en matière de profits et de carrière.
Que se passerait-il si nous revenions à la distinction démodée entre l’éthique et la morale? Ainsi, en philosophie morale, la réflexion sur la morale serait à nouveau possible aux deux niveaux. Au niveau des sociétés, on devrait se demander comment les morales spécifiques se concrétisent dans une économie mondiale basée sur l’inégalité des rapports de force et des ressources; au niveau des individus, il faudrait réfléchir sur les différentes manifestations de la morale personnelle qui dépendent du contexte. Ainsi la différence entre la «morale» et «faire la morale» serait peut-être plus évidente? Un jugement sur la moralité qui doit obéir à des critères éthiques devrait tenir compte des ressources dont dispose une société pour respecter ce qui est considéré comme moral dans les divers contextes globaux en fonction des rapports de force. En faisant la morale, en revanche, on ne tiendrait pas compte des complications qui existent dans le monde extérieur, parce qu’on ne se conformerait qu’aux catégories maniché­ennes de son monde intérieur. Et l’éthique pourrait poser la question centrale de savoir ce que cela veut dire, pour notre société, que de laisser de plus en plus définir et accaparer sa morale par des intérêts professionnels et capitalisables. Les hommes vont-ils être libérés de toutes réfle­xions morales en tant que personnes? Cela donnerait certes beaucoup plus de travail à ceux qui gagnent leur vie à faire la morale, mais pourrait contribuer à miner de plus en plus une vie commune réussie en dehors de la vie professionnelle.

Verena Tobler Linder, Zurich

(texte publié initialement dans
«Neue Zürcher Zeitung» du 21/4/09)


Votations fédérales du 17 mai 2009

Non à la biométrie obligatoire!

Dans la campagne préalable à la votation sur l’arrêté fédéral sur l’introduction obligatoire des passeports biométriques, se dessine une image rare. Le PS, les Verts, les jeunes radicaux, l’UDC et Jeunes UDC se sont réunis pour s’engager ensemble en direction d’un rejet du texte soumis à la votation. Les points de vue peuvent être différents, mais après une analyse approfondie de la matière, tous en tirent évidemment la même conclusion: les arguments en faveur du «non» prédominent nettement! Comme l’introduction des nouveaux passeports suisses date de 2003 et 2006, qu’ils répondent aux exigences les plus élevées et font partie des documents les plus difficilement falsifiables au monde, il est difficile de comprendre pourquoi déjà à partir de 2010 de nouveaux passeports sont nécessaires. Un «non» ne met pas non plus en cause l’Accord de Schengen comme le prétendent les partisans du «oui», car l’arrêt fédéral va bien au-delà de ce qu’exige Schengen. L’Irlande, le Danemark ainsi que le Royaume-Uni, tous membres de l’UE, ont d’ailleurs choisi de ne pas participer à l’adoption du règlement de Schengen concernant les passeports et les documents de voyage et ne sont donc pas liés à celui-ci. Une solution pareille devrait donc être possible pour la Suisse qui n’est même pas membre de l’UE.
En outre, la liberté de voyager n’est pas menacée par un «non», car même les Etats-Unis n’exigent – contrairement à ce qu’on croit souvent – pas de passeport biométrique pour l’entrée sur leur territoire. Comme c’est le cas dans nombre d’autres pays, il ne faut qu’un simple visa. En cas de séjours de plus de 90 jours aux Etats-Unis, il est obligatoire de disposer d’un visa, même si l’on possède un passeport biométrique!
Le plus grand casse-tête est toutefois qu’on prévoit l’enregistrement des données biométriques dans une banque de données centrale. Cette pratique serait, à l’exception de la France, unique en Europe. L’Allemagne et l’Autriche se sont décidées définitivement contre une telle banque de données centrale. En Autriche, par exemple, les autorités locales doivent effacer les données biométriques, deux mois après l’émission du document de voyage. En Allemagne également, l’enregistrement permanent de données des passeports est interdit. Et précisément en Suisse, la coupe franche dans la protection des données préoccupantes devrait devenir réalité?
Une large coalition politique sait y répondre de manière claire et nette: Non à la biométrie obligatoire!

Aniane Liebrand, Beromünster