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Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°40, 10 octobre 2011  >  Renforcer le courage de ses opinions [Imprimer]

Renforcer le courage de ses opinions

La pensée et l’action responsable dans la démocratie

par Anita Schächter, psychologue, Allemagne

La notion du courage de ses opinions («Bürgermut») ou le courage civique provient d’Otto von Bismarck. En 1864, il fut sifflé au Landtag de la Prusse en raison d’une contribution critique. Un parent qui était présent lui dit: «Tu avais raison, mais ce sont des choses qui ne se disent pas.» Bismarck lui répondit: «Si tu as partagé mon opinion, tu aurais dû me soutenir.» Et il a ajouté: «Mais ce n’est pas rare que des citoyens respectables manquent de courage civique.»1
Ci-après je voudrais employer la notion de courage de ses opinions et le définir:
Le courage de ses opinions c’est lorsque le citoyen relève son front, conscient de sa responsabilité dans un Etat démocratique, qu’il dit son opinion, son point de vue, avant tout quand cela ne correspond pas aux opinions transportées par les médias. Le citoyen ayant ce courage est conscient que la démocratie ne se réduit pas uniquement aux élections et qu’elle fonctionne seulement aussi longtemps qu’il se sent responsable de son bon fonctionnement. Elle commence là où l’on s’efforce en commun de venir à bout des questions de la vie quotidienne, et le citoyen cherche des cercles d’échange et d’influence où l’on s’occupe des questions cruciales de la commune (par exemple le PPP, PublicPrivate­Partnership), dans le Land ou dans la République fédérale (comme par exemple le MES, le Mécanisme européen de stabilité).
Le courage de ses opinions peut être vécu si nous tenons compte de deux éléments: la formation de l’opinion et la recherche de formes adéquates de réalisation et d’influence, lorsque le citoyen les juge nécessaire.

La formation de l’opinion

La formation de l’opinion est un processus. Tout d’abord, le citoyen prend connaissance d’un fait et il remarque par exemple que quelque chose ne concorde pas avec ce qui est voulu et exigé par les politiques. Ou bien il se rend compte qu’il n’est pas assez au courant d’une certaine situation. La formation de l’opinion ne se fait pas seulement par la lecture d’articles de journaux, pas seulement par les émissions à la télévision, pas seulement par la lecture d’un livre ou des recherches sur Internet. Il faut tout ça, mais il faut aussi que le citoyen comprenne ce qu’il lit et ce qu’il entend. Le principe démocratique part de la réflexion en commun. C’est ce qui se réalise dans la relation avec d’autres personnes intéressées. En discutant ensemble, on considère tous les aspects d’un problème. Dans ces débats communs, il s’agit aussi d’inviter d’autres personnes, d’autres citoyens à approfondir et à discuter leurs propres réflexions. C’est uniquement dans l’échange avec d’autres que le citoyen se rend compte si pour lui l’affaire est déjà claire et s’il est capable de présenter les choses de façon cohérente. Il se rend compte des lacunes dans son savoir, les aspects auxquels il n’a pas encore assez réfléchi et où il y a peut-être une erreur dans ses réflexions. Il voit où il réussit à présenter son opinion dans la discussion avec d’autres personnes, où il peut les persuader, où il a appris un nouveau fait qui sera précieux pour l’autre pour la compréhension des événements.
Des cercles où l’on peut former sa propre opinion existent en partie sous forme d’institutions. Ils ne sont cependant actuellement souvent pas assez développés. Pour citer un exemple, tout en sachant qu’il existe pire en matière d’émissions, il y a l’émission de Maybritt Illner, où cinq personnes de la politique, des sciences et des personnes publiques discutent sous une forme raccourcie et émotionnelle d’une affaire compliquée, comme par exemple le MES. Du point de vue de la psychologie sociale, le spectateur a l’impression d’avoir participé à un échange et il a l’impression que tout a été dit et qu’il n’y a rien à ajouter. En réalité, cela n’a pas été un échange mais une discussion organisée par les médias, souvent pas équilibrée. Par le choix et la manière de poser les questions et de décider à qui l’on pose la question et combien de temps on lui accorde pour présenter le problème, il y a une limitation et souvent aussi une manipulation dont, au moment de la diffusion, nous ne sommes pas conscients. Le spectateur n’a aucune occasion de se faire une opinion fondée – avec le calme requis. Il reçoit des fragments, il ressent que ses émotions peuvent être échauffées artificiellement avec la musique et la rhétorique. Il ne se rend souvent pas compte que c’est une forme insuffisante pour la formation d’une opinion politique. Elle peut en faire partie, c’est sûr. Mais la formation d’opinions politiques précédant la participation démocratique doit se faire d’une autre façon, si le but est d’être vraiment sûr de pouvoir démasquer les finesses rhétoriques et les coups tordus, et d’y opposer sa propre position.

De la formation de l’opinion aux actes

Dans le processus de la formation de l’opinion et de l’échange de sa propre opinion avec le concitoyen, se dessine souvent une nécessité d’agir, au début sous des aspects encore vagues. C’est par exemple l’impression qu’il faudrait faire quelque chose, le constat que les affaires publiques ne peuvent pas être laissées aux seuls représentants. On comprend qu’il y faut sa propre articulation, qui doit être transmise aux concitoyens et à leurs représentants.
Je pense que c’est justement le cas actuellement, qu’il y a beaucoup de gens qui se trouvent exactement à ce stade. Les gens ressentent qu’avec le gigantesque endettement de l’Etat quelque chose ne va pas, quelque chose ne va pas avec l’issue proposée par les politiques. Ils se rendent compte que beaucoup de politiciens n’agissent pas honnêtement. Ils s’aperçoivent que ce n’est pas la Grèce qui sera sauvée, mais que ce sont les banques qui seront servies. L’argent des contribuables a été transmis aux banques et au secteur financier à une aussi grande échelle. Beaucoup de gens s’en rendent compte actuellement. Ils ne voient souvent pas encore ce qu’ils peuvent faire avec ce qu’ils voient. Mais l’histoire nous a toujours montré que, quand les citoyens se sont formé une opinion claire, que quand ils n’acceptent pas ce qui se passe à un certain moment, la folie peut être stopée.

Chacun est responsable de l’ensemble

Le président fédéral allemand a prononcé des paroles claires à l’occasion de l’inauguration du 4e Congrès des Prix Nobel de l’économie à Lindau: «Lors de la Journée allemande des banques, j’avais déjà mis en garde le secteur financier. Nous n’avons éliminé ni les causes de la crise ni la possibilité de dire aujourd’hui: Nous avons reconnu le danger – et banni le danger … D’abord il y a eu des banques qui ont sauvé d’autres banques, ensuite c’étaient les Etats qui ont sauvé avant tout les banques, maintenant la communauté des Etats a sauvé d’autres Etats. Mais qui sauvera finalement les sauveteurs? Quand les déficits accumulés seront-ils distribués, à qui, et assumés par qui?» Il continue en disant que chaque citoyen qui a l’occasion de se procurer le savoir sur la matière, «[…] porte une responsabilité. Il ne doit pas se retirer dans son propre monde parallèle, loin de tout. Mais au contraire, chacun et chacune porte la responsabilité de l’ensemble et de la cohésion du pays.»
Le président fédéral énonce ici la capacité de chacun de se procurer un savoir fondé. Ce savoir appelle et engage à la responsabilité. Dans une démocratie, le pouvoir vient du peuple. La question se pose de savoir comment chaque citoyen peut répondre à cette responsabilité et participer à construire la société – donc de ne pas se retirer dans un «monde parallèle». Monde parallèle veut dire que l’énergie intérieure n’est pas dirigée vers la solution d’un problème, mais vers l’utilisation excessive de l’ordinateur, la société de l’amusement, la privatisation excessive, le sexe ou d’autres domaines – mondes parallèles – se trouvant au centre des aspiration intérieures.
Kurt Singer, qui s’est occupé de la question de la participation politique du citoyen, a fait des recherches en tant que professeur de pédagogie et parle d’un «dérangement de l’apprentissage dans la société».2 Il parle de nous tous, tant que nous détournons le regard au lieu d’occuper notre intelligence à résoudre les problèmes.
Chacun et chacune a la capacité de faire quelque chose dans la situation politique et la situation de la société actuelle.

La conception personnaliste de l’homme et la participation politique dans la démocratie

Ce qui sonne au premier abord comme une chose abstraite est facile à comprendre: La psychologie personnaliste ne voit l’être humain pas de façon mécanique. Elle ne conçoit pas l’être humain comme une structure de pulsions et ne comprend pas ses actions uniquement comme pure réaction aux circonstances de la société. L’approche personnaliste voit l’être humain en tant que personne, comme individu qui se développe de manière unique en relation sociale avec ses parents, ses frères et sœurs, toutes les autres personnes de référence et aussi avec les professeurs. Le point de départ de la psychologie personnaliste est de considérer l’être humain capable de raison, d’éthique et avant tout de compassion.
Dans le domaine de la théorie de l’attachement (Ainsworh, Bowlby et al.) existent des études longitudinales sur le développement du nouveau-né jusqu’à l’âge adulte. On peut conclure de ces résultats de recherche que l’être humain développe son intelligence émotionnelle à travers la relation avec autrui, à travers l’attachement, l’empathie et une sagesse des émotions. La moralité et l’éthique de l’être humain se développent à partir de sa façon d’échanger avec son prochain. La théorie de l’attachement a observé comment l’enfant forme sa relation sociale envers autrui, et comment il se crée un schéma de perception qui est sa réponse créative à partir de ses échanges avec son prochain.
Le point de départ de tout le développement de l’être humain est la famille. C’est pourquoi il faut se poser la question de savoir si un comportement éducatif est de nature à le renforcer ou l’affaiblir. Rencontrer l’enfant avec empathie ne veut pas dire accepter tout ce qu’il fait, mais aussi de ne pas tout permettre. Cela exige également la correction de comportements erronés, afin que l’enfant puisse apprendre à s’intégrer dans la relation avec les autres personnes de façon constructive et positive.
L’attachement, le soutien que l’enfant reçoit et son importance comme personne, dont il prend lentement et de plus en plus conscience, ont une importance fondamentale pour toute la vie. La relation avec ses proches est déjà présente chez le nouveau-né et ne perd jamais en importance pendant toute la vie. Elle est le point de départ de l’estime de soi, de sa propre valeur et du sentiment de sa propre importance dans la communauté.
La manière de percevoir se forme surtout pendant les six premières années de la vie. Mais nous savons aujourd’hui que l’adolescence représente aussi une période très sensible durant laquelle l’aiguillage peut de nouveau être ajusté. Même à l’âge adulte on trouve des influences qui peuvent être positives ou négatives. Cette connaissance implique le devoir, pour chacun, de participer pour que sa personnalité se développe et qu’il grandisse intérieurement. Ainsi l’être humain est capable de percevoir sa propre valeur et d’avoir l’élasticité intérieure nécessaire pour agir dans la communauté.

Le courage de ses opinions se développe à partir d’expériences positives

Lorsque l’enfant apprend que ce qu’il fait a une résonance, qu’on a besoin de sa participation, qu’on lui apprend à réfléchir avec les autres, sa capacité de coopération se développe, aussi par rapport avec la communauté de la société tout entière. Alors, la volonté de participer dans la communauté ne sera pas l’expression d’une volonté de puissance et une aspiration à la supériorité, mais l’expression d’un sentiment de responsabilité comme être humain et concitoyen. La psychologue suisse Annemarie Buchholz a écrit à ce sujet: «A partir de l’expérience de la relation humaine sûre, l’enfant développe aussi le courage de rester fidèle à soi-même, de savoir résister de manière appropriée et de savoir, plus tard, agir sans faux égards aux conséquences sociales, savoir agir suivant ses convictions et ses valeurs. Même si parfois cela devait signifier une confrontation.»3
La transmission de vertus telles la justice, la serviabilité, la paix, la liberté et la sincérité fait partie de la sollicitude appliquée dans la famille et à l’école. Cela ouvre à l’enfant un champ d’apprentissage, le conduit à formuler un leitmotiv auquel il peut mesurer ses activités. Nous parlons du climat de l’éducation, dans lequel la compassion forme le point de départ de la formation des valeurs et d’une activité autonome. C’est dans un tel climat que grandit un être humain prêt à prendre la responsabilité de la réussite de l’ensemble de la société.
Kurt Singer, professeur de pédagogie décédé récemment, a trouvé, dans ses recherches sur les conditions qui permettent un développement du courage civique, que pour tous les citoyens courageux ces valeurs jouent un rôle prépondérant. «Il y a des objectifs et des vertus qui ont de l’importance pour tous, comme l’amour du prochain, la compassion, l’amour de la nature, la sollicitude envers autrui, la sincérité. Il ne s’agit cependant pas de simples règles du comportement comme de dire par exemple «On ne doit pas mentir!». Mais dans la famille, l’importance de la sincérité pour la propre personne et sa relation avec autrui fait objet d’un débat continuel.» (Singer, 1992, p. 26)
Parmi les nombreux exemples biographiques, décrits par Singer dans son livre, il y a l’exemple d’une citoyenne de Francfort (Hannelore Kraus) qui, comme voisine, a empêché la construction du gratte-ciel le plus haut d’Europe. Même lorsqu’on lui a offert, trois et plus tard huit millions d’euros, elle a refusé de donner son accord. Pour elle, il était plus important qu’un vieux quartier de la ville de Francfort puisse être sauvegardé. Singer a posé des questions concernant son histoire de vie, et il a appris que son grand-père, comme contremaître, avait dû faire une expertise pour décharger son entreprise d’une faute à cause de laquelle un client avait porté plainte. Mais il a découvert que la plainte du client était justifiée. Son employeur lui a demandé de ne pas divulguer le résultat de ses recherches, de se taire. Ce qu’il n’a pas fait, même lorsqu’on a menacé de le licencier, ce qui aurait été un danger existentiel pour sa famille de neuf personnes. Mais ce grand-père ne s’est pas laissé détourner de la vérité. Dans la famille, on a été fier de lui. Mme Kraus a encore vécu d’autres expériences de ce genre, ce qui l’a renforcée dans ses actions orientées selon les valeurs. C’est cela qui lui a permis de ne pas agir contre ses propres convictions, même devant une offre de huit millions.

Le courage de ses opinions grandit en réaction aux expériences négatives

Singer décrit aussi que des personnes n’ayant eu que peu d’exemples et de stimulations, ont quand même développé des idées de valeurs qui les ont fait devenir des citoyens honnêtes et courageux. C’était le cas lorsque ces personnes se créaient des «pères» et «mères» avec la lecture de biographies auxquelles ils pouvaient s’identifier, et qui sont devenues leur modèle de participation démocratique et de leur courage de ses opinions.
Singer a pu prouver que dans les biographies des citoyens courageux il pouvait y avoir aussi le contraire: Des expériences négatives pouvant être le motif de s’engager pour les autres ou pour des valeurs, parce qu’on ne peut pas oublier ce qu’on a eu à souffrir. Des personnes, qui par exemple ont souffert du manque de liberté, s’engagent pour la liberté d’autrui, et commencent à se libérer de leurs propres sentiments douloureux. L’être humain peut se décider à ne pas oublier ce que lui-même a souffert, ce qui lui a manqué, et cela le rend capable de bien juger une situation et d’orienter ses actes selon ces expériences.
C’est toujours la personne elle-même qui crée quelque chose à partir de ses conditions de vie. La recherche de résilience le prouve de manière impressionnante. Son affirmation centrale est la suivante: Ce ne sont pas les conditions de vie qui façonnent l’être humain. C’est plutôt l’interprétation de ses conditions de vie qui le façonne. Il se les explique et trouve une réponse émotionnelle et adaptée à sa vie. De nombreuses études longitudinales qui documentent des vies entières montrent que des enfants issus de conditions de vie extrêmement difficiles et pesantes sont devenus des adultes très sociables et aptes à affronter la vie. C’était possible quand ils pouvaient établir une relation de confiance avec un adulte, et qu’un bon nombre de petits événements positifs s’y ajoutaient, comme le travail, avec un hobby, une bonne relation élève–enseignant, la création de relations amicales, la sollicitude etc.
Des études longitudinales dans la recherche de la psychologie de l’attachement, du développement et de la pychologie sociale, des études cliniques et l’expérience psychologique pratique, même des représentations personnelles donnent les preuves que l’attachement avec les proches, la coopération dans la confiance et le souhait d’acceptation sociale dans une communauté, représentent une force humaine centrale.
Les êtres humains aspirent à la compétence et à agrandir leurs connaissances. Le sentiment d’impuissance affaiblit chacun qui y reste muré. Si l’être humain commence à donner sa contribution, le sentiment d’impuissance disparaît dans la mesure où il contribue et s’exprime là où il a quelque chose à dire. Le citoyen démocrate est capable de créer activement la communauté. C’est l’essence de l’être humain de le faire dans le sens du bien commun. Chacun est capable d’assumer sa responsabilité aussi contre la volonté d’autrui, là où il est persuadé de la nécessité de ses actes.
Dans le quotidien, il faut une décision consciente indiquant où le citoyen veut se diriger: Se pose-t-il en spectateur ou commence-t-il à agir activement? La question que chacun peut se poser est de savoir si c’est la meilleure partie, la partie la plus forte de nous-mêmes qui est en train d’agir, ou bien si, au plus profond de nous-mêmes, il se trouve une part encore meilleure que nous devrions suivre?
Comment le courage de ses opinions peut-il grandir?
Le courage civique grandit là où la personne se forme une opinion, où elle commence des échanges avec autrui et où elle fait quelque chose. Le cas échéant aussi à contre-courant.

Comment le courage de ses opinions nous fait-il grandir intérieurement?

Chacun porte en soi le désir de contribuer positivement à la réussite de l’ensemble. Le sentiment de ne pas être utile, le sentiment de ne pas avoir d’importance pour autrui peut même amener des douleurs corporelles.4
Lorsque l’être humain commence à s’immiscer, il sent qu’il gagne en importance, il sent qu’il a une valeur pour les autres. Plus encore, il gagne en importance devant soi-même. Celui qui vit en harmonie avec sa conscience responsable n’a pas besoin de se poser la question de savoir pourquoi il n’est pas prêt à entreprendre quelque chose contre les conditions problématiques de notre société. Le courage de ses opinions nous débarrasse des sentiments de petitesse, des insécurités ou angoisses qui, chez la plupart d’entre nous, subsistent encore quelque part, dans les vestiges des temps révolus.
Celui qui commence à s’engager personnellement pour ce qu’il trouve juste, et qui se comporte selon son propre jugement, renforce sa personnalité. Il ne se laisse plus décourager par le pessimisme de certains concitoyens. Il est possible de sonder un comportement, de rester en relation pendant une discussion, c’est-à-dire de ne pas rompre intérieurement la relation avec l’autre, même si ce dernier défend quelque chose d’inacceptable selon notre point de vue. Cela donne une sécurité personnelle intérieure, même si quelqu’un dans une discussion controversée nous dévalorise personnellement.
Le courage de ses opinions aide à renforcer sa propre identité, renforce l’estime de soi et assure le sentiment de sa propre efficacité et sa signification pour autrui.
Résumons: Le courage de ses opinions, l’action dans la démocratie conditionnent le processus de formation de l’opinion. Cela se passe dans l’élaboration de compétences et dans la discussion avec les concitoyens. Les compétences sont la condition de la participation publique. On doit trouver un accès aux informations requises.
Par la suite, la conviction de vouloir faire quelque chose peut grandir et le développement et la discussion des idées sont au centre. Sur la base d’informations, le désir de s’activer grandit.
Agir dans la démocratie, avoir du courage de ses opinions, cela est en accord avec la conception personnelle des êtres humains. Le courage de ses opinions ne se soucie pas du succès, il est issu du besoin de vouloir contribuer à édifier, et à agir de façon responsable.
L’être humain gagne en personnalité, il mûrit et il s’épanouit. Il développe davantage de contentement dans la vie s’il fait quelque chose pour la communauté, et s’il prend sa responsabilité aussi à l’égard des générations futures.
L’on peut ainsi prédire que, du point de vue psychologique, toute personne remplissant ses devoirs démocratiques vivra une croissance personnelle qui l’emplira de satisfaction.    •
(Traduction Horizons et débats)

1    Cité d’après Kurt Singer: Zivilcourage wagen – Wie man lernt, sich einzumischen, Editions Piper, 1992
2    Kurt Singer: Zivilcourage wagen – Wie man lernt, sich einzumischen, Editions Piper, 1992
3     Annemarie Buchholz-Kaiser: Personale Psychologie – Der Beitrag von Psychologie und Pädagogik zur Menschenwürde, in: Mut zur Ethik, Editions Menschenkenntnis, 1997
4     Joachim Bauer: Schmerzgrenze. Vom Ursprung alltäglicher und globaler Gewalt, Editions Blessing, 2011