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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2013  >  N°7, 18 février 2013  >  1992: le Non à l’EEE [Imprimer]

1992: le Non à l’EEE

 par Peter Forster

Le 6 décembre 2012, c’était le 20e anniversaire de la votation mémorable sur l’EEE 1992 – une votation sans précédent et comme elle ne devrait plus avoir lieu de si tôt – à moins que des politiciens déraisonnables n’imposent, contre la volonté de la majorité écrasante de la population suisse, l’adhésion à l’UE.
A l’époque, le 6 décembre 1992, il agissait «seulement» d’adhérer à l’Espace économique européen EEE. Mais le Conseil fédéral avait, en printemps, titulé l’EEE de «camp d’entraînement» pour la Communauté européenne CE d’alors, soit du prédécesseur de l’UE actuelle.

Le «camp d’entraînement»

La demande d’adhésion et le «camp d’entraînement» ont été de véritables passes en chandelle pour les adversaires de l’EEE. Ils ont mis en évidence, pour les nombreux hésitants que le Conseil fédéral aspirait, par le biais de l’EEE, à l’adhésion à la CE.
Le débat précédant la votation s’est caractérisé par une agressivité que les jeunes Suisses ne peuvent pas s’imaginer. Tous les médias, à l’exception des «Schaffhauser Nachrichten» et de la «Thurgauer Zeitung» se sont engagés, presque fanatiquement, en faveur de l’EEE.
Officiellement, l’économie et les partis du centre, tels le PDC et le PLR, se sont exprimés en faveur de l’adhésion; dans la suite, leurs prises de position pointues en faveur de Bruxelles leur a coûté des dizaines de milliers de voix.
De l’autre côté, le Non du 6 décembre 1992, qui était assez juste au sein du peuple, mais massif de la part des cantons, a permis la montée d’un autre parti comme le parti le plus fort du pays.
Au sein de l’économie, il y avait des chefs de file qui, en catimini, étaient contre l’adhésion: ils ont réalisé les inconvénients que l’adhésion aurait entraînés pour l’économie.

«Tenez bon!»

L’auteur de ces lignes était, à l’époque, rédacteur en chef de la «Thurgauer Zeitung» qui s’opposait à l’adhésion à l’EEE. Il a reçu des douzaines d’appels de banquiers et d’industriels de premier plan qui disaient: «Tenez bon! Bruxelles est du poison pour notre économie! Ne vous faites pas intimider par les turbos européens!»
Les partisans de l’EEE disposaient d’un budget de propagande énorme et ont lutté avec tous les moyens immaginables. Ceux qui étaient du côté des adversaires ont été menacés de perdre leur poste de travail. La Société de banques suisses SBS d’alors a chassé le porte-parole de l’opposition à l’EEE de son conseil d’administration car il s’était permis de s’opposer, à Winterthur-Seen, au chef de la banque qui raisonnait en faveur de l’EEE.
Le fossé entre le pour et le contre traversait les associations, les entreprises et les cercles amicaux. Au sein des ateliers graphiques Huber, par exemple, chacun connaissait la position des autres collègues, les composeurs et imprimeurs étaient contre l’EEE, le personnel commercial partiellement pour.

La dernière chemise

Il faut manier précautionneusement la notion de «base»; les représentants du mouvement de 1968, ont réclamé, pendant leur «révolution» échouée, «la base» pour eux.
Mais dans le contexte de l’EEE, la notion de base reprend toute sa validité au sein de la population suisse. C’était en effet la base qui a mobilisé contre Bruxelles, qui a ramassé des dons de 10 ou 20 francs et qui a mis en garde, par le moyen de minuscules annonces, contre l’EEE.
L’auteur de ces lignes était en contact avec des femmes et des hommes appartenant aux couches populaires qui étaient prêts à donner, dans le combat contre Bruxelles, jusqu’à leur dernière chemise. Ils se sont exposés au froid, debout derrière des stands échafaudés à la hâte. Leurs tracts avaient l’aspect pitoyable face aux grandes affiches du comité Pro – mais «à la fin de cette longue journée», en comptant les voix, c’étaient soudainement eux les gagnants: 50,3% de non, alors que 16 des 23 cantons se sont exprimés contre l’adhésion.
Ce qui s’est déroulé par la suite à Berne, était un point bas unique dans l’histoire de la Suisse. Au lieu d’avouer sa défaite, le conseiller fédéral Pascal Delamuraz, s’est moqué des gagnants de la votation. Et c’était encore plus incroyable qu'il s'est permis de reprocher aux adversaires de l’EEE d’avoir créé un «dimanche noir»!

Bonne majorité contre Bruxelles

Pendant un certain temps, le Conseil fédéral a tenté d’adhérer à l’EEE par la bande – avec l’effet que la voie bilatérale s’est imposée. La Confédération a défendu les piliers sur lesquels elle reposait depuis toujours: la démocratie directe, la neutralité armée, le fédéralisme et sa liberté et son indépendance – munie de sa propre armée et de son propre droit.
Si, actuellement, le président du PDC reparle à nouveau de l’EEE, il ferait bien de consulter les sondages: plus que jamais, avec une bonne majorité entre 80 et 90%, le peuple suisse se prononce contre Bruxelles – pour ne pas parler de la majorité des cantons.
Tous ceux qui, il y a dix ans, se sont alignés contre Bruxelles, portent ce combat héroïque dans le cœur: c’est eux qui, contre des forces surpuissantes, ont préservé notre pays du pire.    •

Source: Schweizer Soldat, no 1, janvier 2013

(Traduction Horizons et débats)