Horizons et débats
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Tél.: +41-44-350 65 50
Fax: +41-44-350 65 51
Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité
pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
18 juillet 2016
Impressum



deutsch | english
Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°47, 28 novembre 2011  >  La BRI, création de banquiers internationaux [Imprimer]

La BRI, création de banquiers internationaux

ts. Dans son étude intitulée «La Suisse avant et pendant la Seconde Guerre mondiale», Christian Favre donne un aperçu des dessous réels et complexes de la Seconde Guerre mondiale. Il offre à tous nos contemporains vigilants un correctif bienvenu à la falsification de l’histoire opérée par le Rapport Bergier, par exemple. Il s’agit également d’un complément au livre éclairant et réconfortant de Gotthard Frick «Hitlers Krieg und die Selbstbehauptung der Schweiz 1933-1945» (cf. Horizons et débats no 30 du 25/7/11).
Les traités de Versailles à la fin de la Première Guerre mondiale étaient durs, trop durs, de l’avis non seulement de tous les historiens actuels, mais aussi de nombreux contemporains déjà comme le socialiste français Aristide Briand. Pour lui, ce n’était pas une politique de paix. N’y avait-il pas là déjà le germe d’une autre guerre qui mettrait le pouvoir mondial entre de nouvelles mains, surtout celles des Anglo-Saxons?
Ce sont des banquiers internationaux qui fondèrent, à Bâle, la Banque des règlements internationaux (BRI) au nom anodin. Leur objectif était de faire de l’Allemagne une vache à lait, de la traire et de permettre aux nationaux-socialistes de mettre sur pied une armée puissante. Le fait que plus de 100 sociétés britanniques et américaines en profitèrent – et cela aussi pendant la Seconde Guerre mondiale, en violation de la Loi américaine sur le commerce avec l’ennemi («Trading with the Enemy Act») – est choquant et a déjà été prouvé minutieusement par l’historien américain Herbert R. Reginbogin dans sa vaste étude intitulée «Guerre et neutralité : les neutres face à Hitler». Et cela bien que la plupart des documents concernant la Seconde Guerre mondiale soient encore classifiés aux Etats-Unis. En ce qui concerne la BRI – qui est trop souvent appelée «cette banque de Suisse» et associée aux banques suisses, bien qu’elle ait été fondée par des banquiers internationaux et que ce soit uniquement par hasard que son siège se trouve à Bâle – il serait très souhaitable que la Loi américaine sur la liberté de l’information («Freedom of Informations Act» – FOIA) permette de mieux connaître la structure et le fonctionnement de cet instrument de la haute finance.    •

L’attitude des Américains lors du traité de Versailles est très révélatrice. Voici ce qu’en a rapporté le comte Robert Capelle. Les Belges désiraient obtenir rapidement une réparation de guerre, voici la réponse américaine:
«Pourquoi ne nous soutenez-vous pas dans la mesure où vous nous avez témoigné de la sympathie pendant la guerre? – Les Américains, me répond-il avec franchise ou naïveté, sont des idéalistes et des marchands: par idéalisme, nous nous refusons à prolonger toute espèce de ressentiment né de la guerre; par mercantilisme, nous entendons être remboursés au plus tôt des milliards que nous avons déboursés, en prêts et dépenses de guerre. Ce but ne peut être atteint que par le plein travail de nos débiteurs, les Européens, et en premier lieu les Allemands. Nous repoussons donc a priori tout ce qui pourrait handicaper l’industrie allemande: indemnités de guerre exagérées, privation de matières premières, maintien de listes noires, invasion du marché allemand par les produits alliés.»
Certains de mes compatriotes vont plus loin encore: ils voudraient que les vingt-cinq premiers milliards d’indem­nités payées par l’Allemagne fussent affectés au paiement de matières premières destinées à l’industrie allemande.» (Comte Robert Capelle, Versailles 1919, Histoire de notre temps, 1968)

(Christian Favre, «La Suisse avant et pendant la Seconde Guerre mondiale»,
Lyon 2011, p. 16 sq.)

«S’ils savaient… que c’était loin encore d’être la paix»

A la fin de la Première Guerre mondiale, voici ce que pensait le socialiste français Aristide Briand:
«Comme tous les Français, j’avais participé à la liesse populaire, tout au long de cette journée inoubliable du 11 novembre 1918. Toutefois, en même temps, je n’avais pas non plus cessé d’être le siège d’un sourd malaise. Pourquoi donc ce cœur gros? Je ne me complais pas, de façon générale, en délectations moroses. Mais en regardant, levés vers moi, au Palais Bourbon, ces visages hilares, ex­cités, enthousiastes, je pensais étrangement: ‹S’ils savaient... ›
S’ils savaient quoi? C’était encore confus dans ma pensée. Savaient que rien n’était fini. Que l’arrêt des combats n’était encore qu’une trêve, qu’un entracte. Que c’était loin encore d’être la paix. Que celle-ci dépendrait, pour s’établir et se consolider, de la façon dont on allait s’y prendre maintenant avec l’Allemagne. Or, ce que je voyais poindre, en cette journée de fièvre, ce n’était pas une politique de paix. Ce que je voyais éclater, dans cette foule en délire, c’était l’ivresse sans doute de la délivrance, mais plus encore une ivresse de vengeance. Vae victis! On va leur faire voir, aux Boches! Sous la pression de cet appel, le vaincu serait mis à terre, sous le talon. Outre ses armes, on lui arracherait ses biens, ses territoires, sa propre peau. Or, quelle nation – à moins d’être réduite en cendres – supporterait ce traitement à la longue? Laquelle ne finirait par se jeter dans la révolte?»
Briand, comme Churchill mais contrairement à Clemenceau, pensait qu’il était loin d’être sage de vouloir saigner à blanc l’Allemagne déjà complètement ruinée. Le moins qu’on puisse dire est que l’avenir ne leur donnera pas tort. Mussolini avait la même vision. Les Américains, venus en renfort, avaient bien l’intention, eux aussi, de faire payer leur déplacement. Le traité de Versailles imposait à l’Allemagne de verser un montant de 123 milliards de DM or et à donner annuellement 26% de ses exportations. De telles exigences ne pouvaient que ruiner encore plus le pays, ce qui arriva. Mais au lieu d’adapter le montant au potentiel de l’Allemagne, en permettant petit à petit à l’industrie de fonctionner, c’est une tout autre solution qui allait voir le jour. En effet, des banquiers internationaux créèrent en Suisse, à Bâle, la «Banque pour les règlements internationaux». Ce plan, mis en place sous le nom de plan Young, succéda au plan Dawes. Ce système établi en 1923 permit à l’Allemagne nazie de financer son réarmement; plus d’une centaine d’industries américaines participèrent ainsi en cachette au réarmement de l’Alle­magne et ceci aussi durant la guerre.

(Christian Favre, «La Suisse avant et pen­dant la Seconde Guerre mondiale»,
Lyon 2011, p. 15 sq.)