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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°14, 14 avril 2009  >  La balkanisation du Kivu avance! SOS de Rutshuru, Masisi et Kalehe [Imprimer]

La balkanisation du Kivu avance! SOS de Rutshuru, Masisi et Kalehe

République démocratique du Congo: Association Isôko-Kivu

par Stanislas Bucyalimwe Mararo

La guerre internationale qui sévit sur l’axe qui relie les deux provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu (partie Est de la République démocratique du Congo) depuis mars 1993 et l’ampleur du drame de ces derniers mois démontrent la précarité de la situation locale: uniquement au Nord-Kivu se trouvent environ deux millions de déplacés internes dont trois quarts sont concentrés sur cet axe. Le nombre des morts est inconnu. La récente découverte de fosses communes est en soi révélatrice de ce qui se passe en dehors des caméras et des médias occidentaux. Et beaucoup d’acteurs qui sont au courant de ce qui se passe dans la région préfèrent respecter le mot d’ordre des puissants de ce monde, c’est-à-dire confirmer que tout est au mieux, ou, à défaut, se taire.

La destruction des populations et des infra­structures (scolaires, sanitaires, socio-culturelles et économiques) est systématique. Après l’élimination physique de beaucoup d’intellectuels et de chefs des grandes familles (certaines familles ont même été décimées entièrement), ce sont les jeunes qui sont la cible de cette politique d’annihilation. La transformation de la paroisse catholique de Jomba en siège du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) de Laurent Nkunda, les tueries aveugles des jeunes dans la cité de Kiwanja, l’incéndie de la Paroisse catholique de Nyakariba et du Centre social de Kichanga, la désertion des écoles de l’axe Mishavu–Kibabi–Kinigi–Mbitso/Bukumbiriri sont quelques preuves de ce sombre tableau.
A la paupérisation délibérée (méthode et instrument de domination) s’ajoute l’abandon total des ces trois territoires par le pouvoir et la communauté internationale qui s’intéresse plus à faire asseoir un ordre politique et démographique nouveau. C’est ce qui explique l’actuelle gestion militaire ougando-rwando-burundaise par suppôts interposés et le dépeuplement massif suivi par la ré-occupation des espaces libérés par des étrangers qui viennent de l’Ouganda, du Rwanda et du Burundi.
Les enfants qui sont nés en 1993 et qui viennent d’atteindre l’âge d’adolescence n’ont vécu que dans une situation de guerre. Pire, ces adolescents et leurs cadets ne vont plus à l’école; ce qui est, selon Serge Bailly, une bombe à retardement (Le Monde du 24/10/08).

Témoignages

Les témoignages qui font état des conditions de vie horribles et dénoncent le génocide sont de plus en plus nombreux. En voici quelques-uns tirés au volet.
«Un vrai drame humanitaire qui s’apparente à un génocide silencieux dans l’Est de la RD Congo se déroule sous les yeux de tous. […] Le plus regrettable, c’est que ces événements malheureux (massacres gratuits et à grande échelle des populations civiles, extermination ciblée des jeunes, viols perpétrés comme arme de guerre) ont lieu sous l’œil de ceux qui ont reçu le mandat de maintenir la paix et de protéger la population civile» (CENCO, La RD Congo pleure ses enfants; elle est inconsolable. Kinshasa, le 13/11/08).
«Après plus d’une décennie d’insécurité, la souffrance des enfants perdure à un niveau phénoménal» (www.nouvelobs.com du 4/11/08)
«Plus de 150 000 enfants ne savent plus fréquenter l’école dans le Rutshuru au Nord-Kivu à cause de la rébellion du CNDP» (Le Potentiel, Kinshasa, le 20/11/08).
«Les ONG se disent préoccupés par la malnutrition des enfants et par les maladies infectieuses. Par exemple, un enfant se sert d’un sac en plastique pour collecter l’eau d’un torrent de boue et la boire. Plus loin, d’autres enfants jouent dans l’eau saumâtre» (Les ONG soucieuses des enfants séparés de leurs parents, Associated Press du 19/2/09).
«Un véritable génocide des Hutus congolais est en train d’être perpétrés au Nord-Kivu par Paul Kagame avec l’entremise de l’ex-général félon et paranoïaque Laurent Nkunda. Actuellement, il y a plus de 600 000 per­sonnes déplacées à l’intérieur de cette province, principalement les Hutus congolais qui sont présentement exposés à la maladie, à la famine et aux intempéries avec le retour de la saison de pluie. Nkundabatware et ses soldats de l’Armée patriotique rwandaise (APR) sont en train de perpétrer un véritable génocide des Hutus congolais. Les charniers récemment découverts à Rubare à environ 40 km de Goma, ne représentent que le sommet de l’iceberg des massacres que Paul Kagame est en train de commanditer au Kivu. C’est une politique planifiée de nettoyage ethnique, à fins d’occupation territoriale et d’exploitation des richesses de la RDC.» (Dorcas Lokendo, cité dans Congo-Actualités n° 72 du 1/10/07).
«Le crime est banalisé au Nord-Kivu» (Pole Institute, Goma, 21/1/09).
«L’inversion des priorités de la République: Les Congolais du Kivu, qui s’attendaient à voir tous les déplacés et réfugiés congolais retourner dans leurs milieux d’origine se voient plutôt imposer une nouvelle guerre entre étrangers sur notre sol, synonyme de nouvelles atrocités, de nouveaux génocides, de la poursuite de l’extermination des populations locales en vue du dépeuplement systématique» (Déclaration des Communautés du Nord-Kivu, Kinshasa, le 20/1/09).    •

Un plaidoyer pour une aide en faveur du Petit-Nord-Kivu

par Stanislas Bucyalimwe Mararo

Dans Horizons et débats no 15 du 14 avril 2008, nous avons publié un SOS en provenance des territoires de Masisi, de Rutshuru et Kalehe (Nord-Kivu, Est de la République démocratique du Congo). Depuis cette date la situation s’est empirée.
Les offensives lancées contre le CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) du général Nkunda par les FARDC (Forces armées de la République démocratique du Congo) ont entraîné de nouveaux dégâts humains considérables et de nouvelles vagues de déplacés internes. Les tueries de Kiwanja (Rutshuru) et les déplacements massifs qui ont suivi sur l’axe Rutshuru–Rumangabo–Rugari–Kibati–Goma en octobre et novembre 2008 constituent l’apogée de ce drame humanitaire.
Alors qu’aucune solution n’était encore apportée à ce drame, le président congolais, Joseph Kabila, et le président rwandais, Paul Kagamé, ont signé un accord secret qui autorisait l’intervention des troupes rwandaises dans cette région où la guerre sévit sans interruption depuis mars 1993.

Actions concrètes à mener

A court et à moyen terme, l’Association Isôko–Kivu (AIK) et ses partenaires à la base de nos populations poursuivent et proposent, entre autres, les projets que voilà:

Revalorisation de l’école par l’aide à la scolarisation des enfants, l’encadrement de leurs enseignants, et l’octroi des supports didactiques ainsi que la réhabilitation des infrastructures scolaires et l’achat des équipements, la création et la gestion des établissements d’enseignement supérieur et universitaire dans ce coin qui est resté longtemps un trou noir par rapport aux diocèse et archidiocèse voisins de Lubero-Beni (au nord) et de Bukavu (au sud). La première phase consiste à concentrer les efforts sur quelques projets-pilotes.

Projet Rumangabo

Il s’agit de la création d’un Institut supérieur de gestion des aires protégées tropicales. Les responsables pour l’AIK sont François Habiyaremye Muhashyi, PhD, et Jean-Paul Segihobe Bigira, PhD candidat. Pour l’association GASET le responsable est Augustin Mashagiro Ngagi (tél. +243 815 188 466).

Projet Mweso

Il s’agit de la création de l’Université Nyamuragira. Les responsables pour l’AIK sont Pater Prosper Kanyamuhanda, PhD, et John Bigirimana Mugabushaka. Pour le CADEP ont peut s’adresser à Viateur Mujogo (tél. +243 812 562 880).

Projet Mululu-Kinigi

Ecole primaire Mululu et Institut Mululu; école primaire Kinigi (protestant) et Institut Kinigi. Le responsable pour l’AIK est Juvénal Twaje et pour l’ACODES Damien Ndabahimye (tél. +243 811 512 256), Bakongomani Biruru (tél. +243 853 361 492) et Gatsimbanyi Sakabaka (tél. +243 808 416 174).

Projet Karuba-Ngungu

Ecoles primaire et secondaire (Karuba), Institut Kisimba (Ngungu). Les responsables pour l’AIK sont Jean-Baptiste Nzapfakumusi Shamba et Oswald Hakorinama et pour l’ACODES Dieudonné Habimana (tél. +243 853 453 910), Edouard Niyonzima (tél. +243 853 273 562) et Ntawurenganzire Bazigiye.
Les interlocuteurs de l’AIK auprès des amis de l’Allemagne et de la Suisse sont Bucyalimwe Mararo Stanislas et Pater Jean de Dieu Batenderana. Leurs coordonnées peuvent être obtenues auprès de la rédaction d’Horizons et débats.

Fait à Anvers, le 20 février 2009
Pour l’Association Isôko–Kivu (AIK)
Stanislas Bucyalimwe Mararo, président