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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2015  >  N° 11, 20 avril 2015  >  «L’eugénisme ne doit pas s’installer» [Imprimer]

«L’eugénisme ne doit pas s’installer»

Interview de Christine Bulliard-Marbach, conseillère nationale, PDC Fribourg

Horizons et débats: Pourquoi êtes-vous contre cette modification constitutionnelle? Qu’est-ce qui arriverait si cet article passait?

Christine Bulliard-Marbach: Je me prononce clairement contre cet article parce que je suis contre une sélection. Je m’oppose à ce que la médecine puisse décider quelle vie est digne d’être vécue ou pas. Ma conviction est si forte que je ne voudrais pas que ça arrive un jour. L’eugénisme ne doit pas s’installer. Il est inadmissible que nous, êtres humains, puissions choisir la physionomie d’un enfant. Car c’est là que ça va aboutir.

Quels sont les objectifs de l’eugénisme?

C’est moi qui décide à quoi ressemblera l’être humain à naître, c’est à l’encontre de toute éthique. Nous avons des exemples historiques concernant cette façon de penser, il ne faut en aucun cas l’encourager.

Quelles seraient les conséquences de cet article constitutionnel?

Il ouvre les portes à la sélection. Lorsque la Constitution l’autorise, on peut supposer qu’on profitera de ces nouvelles possibilités et je ne peux que mettre en garde avec insistance. Nous ne devons pas en oublier l’effet sur les jeunes couples qui ne veulent pas faire ces analyses et qui seraient exposés à une immense pression. Ça concerne avant tout des femmes qui tombent enceinte de façon naturelle sans faire recours à toutes ces méthodes et se fient à la nature. Pour cette raison je le trouve très dangereux, car toute vie a le droit d’être vécue.

A quoi pensez-vous en particulier?

Nous connaissons des exemples de personnes porteuses de la trisomie 21. Ce sont des personnes heureuses, qui savent montrer leurs émotions, qui savent être drôles, mais aussi tristes, tout comme les autres êtres humains. J’en suis fermement convaincue.

Qu’en est-il des parents ayant une prédisposition héréditaire?

Lorsque les parents sont porteurs de maladies héréditaires, le DPI peut certainement être appliqué. Je ne m’y oppose pas. Il faut profiter du progrès médical dans ces cas-là. Mais on ne doit pas sélectionner des embryons à tout prix. Nous aurions alors plusieurs de ces embryons. Si le premier ne convient pas, nous choisirons le deuxième ou le troisième etc. A la fin la question se pose de savoir ce qui arrivera avec les embryons en surplus.

Qui en décidera?

Oui, dans ce cas-là les parents sont dans une situation extrêmement difficile lorsqu’ils doivent décider ce qu’ils vont en faire. Nous devons laisser la nature faire les choses. C’est pourquoi je suis clairement contre le DPI. Dans des cas de maladies héréditaires lourdes avec une grande probabilité de transmission, je ne suis pas contre le DIP.

Existe-il un intérêt de l’industrie pharmaceutique pour ce développement?

On peut être sûr qu’il existe un intérêt de sa part. Il s’agit de faire des affaires pourquoi pas, mais pour moi la question éthique est plus importante et l’économie doit rester au second plan. Que l’industrie pharmaceutique ait un intérêt direct, c’est certainement le cas et ce n’est pas seulement négatif. Nous avons aussi besoin de l’industrie pharmaceutique pour le progrès scientifique. Il s’agit pourtant toujours de savoir pour qui et pourquoi.

Madame la conseillère, merci beaucoup de cet entretien.    •