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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2015  >  N° 14, 1er juin 2015  >  L’arbitraire n’est jamais une voie conduisant à la pacification [Imprimer]

L’arbitraire n’est jamais une voie conduisant à la pacification

par Willi Wimmer, ancien secrétaire d’Etat au ministre fédéral de la Défense et vice-président de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE

La Macédoine, c’est quoi? Voilà la question que se sont posée de nombreuses personnes il y a quinze jours, après avoir entendu les nouvelles du week-end parlant de combats avec de nombreuses personnes tuées ou blessées dans une ville macédonienne. Au fil des années, la Macédoine a disparu de l’orbite des médias et du public d’Europe occidentale. A la fin des altercations militaires au sujet du Kosovo, lorsque des combats ont éclaté pour provoquer la séparation d’autres groupes ethniques en Macédoinem Etat limitrophe du Kosovo, la situation était toute différente. A l’époque, l’idée de la Grande Albanie réapparut, car il n’était guère possible de douter que les combattants albanais en Macédoine profitaient d’un soutien militaire ouvert et secret de l’armée américaine et d’autres autorités gouvernementales étatsuniennes. Ces forces étaient armées et entraînées par ceux qui à l’aide de l’UCK kosovare surent faire prévaloir leurs intérêts jusqu’à imposer le déclanchement de la guerre du Kosovo. Cela démontra clairement les objectifs visés:

  1. Le développement et la future structure étatique de chaque Etat balkanique dépend uniquement de la volonté d’une puissance: celle des Etats-Unis;
  2. le devoir des Européens est de se quereller durablement et mutuellement et de se montrer serviables et dociles face aux plans américains;
  3. surtout ne pas permettre de solution satisfaisante dans l’équilibre des intérêts, car, finalement on ne sait jamais …;
  4. créer une structure balkanique telle que toute influence réelle ou supposée de la Fédération de Russie dans cette région et jusqu’à l’Adriatique soit éliminée;
  5. comme nous avons déjà pu l’apprendre à l’époque de la Wehrmacht dans les Balkans, il était nécessaire qu’un groupe ethnique puisse acquérir une base extérieure et puissante dans cette région pour la défense de leurs propres intérêts en vue de les associer avec ceux du puissant allié à l’encontre des pays voisins. Ces derniers étaient les victimes de leur stratégie;
  6. mettre, si possible, en œuvre le modèle que les pays baltes imposèrent à leurs minorités avec un grand succès. Leur exemple consiste à ne pas accorder aux propres minorités une position juridique interne comparable à la norme européenne. Toute tentative de l’extérieur de parvenir à une amélioration de la situation juridique des minorités est transformée en une «menace russe» afin de placer les pays baltes uniquement sous la protection de l’article 5 du traité de l’OTAN. Les Etats baltes ont développé cela selon la perfection européenne, mais on peut aussi faire la même chose à un autre endroit;
  7. pour la Macédoine, il faut absolument maintenir un état de «fragilité visible». Celle-ci réside dans le fait que le voisin grec ne lui reconnaît pas le nom d’Etat «Macédoine» et renforce ainsi à l’échelle internationale l’impression que la répartition entre les acteurs de cette région n’est pas terminée.

Les médias alignés de nos pays ne disposaient pas sur leurs écrans des images sur les événements sanglants dans ce pays des Balkans et le public bien disposé ne pouvait pas s’attendre à être informé sérieusement sur les causes réelles ou supposées des combats. On prétend qu’il s’agit de lutte contre la corruption, dont probablement presque chaque habitant des Balkans a déjà été suspecté. Cela n’est certainement pas la raison pour laquelle l’OTAN, l’UE et consorts tentent de prendre influence, car tout le monde est bien conscient de la ferveur avec laquelle ces acteurs s’occupent de la corruption ukrainienne. Après qu’un ministre allemand des Affaires étrangères a transformé la production d’héroïne en Afghanistan en un pilier du développement économique de cette communauté, il ne faudrait plus trop accorder de crédit aux affirmations de ce genre de la part de hauts dirigeants européens. Les personnes qui se rassemblent derrière de tels slogans pour descendre dans la rue devraient savoir la chose suivante: ils ne font que courir après des arguments présentés de manière très médiatique peu crédibles aux yeux mêmes des auteurs.
Il est donc plus probable que, selon certaines sources, les combats avaient pour but d’influencer les plans biens réels de la construction d’un gazoduc russe pour approvisionner en gaz le sud de l’Europe. Le manque de perspective dans lequel l’OTAN, l’UE et le monde de l’après-Lehman-Brothers a placé ces pays éveille naturellement et bien évidemment leur intérêt lors de propositions financières russes. Pourquoi sombrer dans la misère en continuant à croire au désespoir occidental, alors que le soleil se lève – comme autrefois – à nouveau à l’Est? Les combats macédoniens sont, dans ces circonstances, les premiers signes d’un affrontement sur un nouveau front. Les déclarations du président serbe Nicolic concernant le Kosovo et sa reconquête sont explicites. Les lignes de fracture dans les Balkans se formeront à l’avenir selon un nouveau modèle. Qui a misé sur quel côté et qui va gagner? Moscou est de retour, sans avoir jamais disparu.    •
(Traduction Horizons et débats)