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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°48, 14 decembre 2009  >  Initiative citoyenne en faveur d’une solidarité et d’une autonomie durables [Imprimer]

Initiative citoyenne en faveur d’une solidarité et d’une autonomie durables

par Karl Müller

Le 4 décembre, le Bundestag a voté, à la majorité des voix de la CDU-CSU et du FDP, la «Loi sur l’accélération de la croissance économique». Celle-ci prévoit de baisser les impôts de 8 milliards d’euros par an à partir du 1er janvier 2010 dans différents domaines. On souhaite ainsi que les réductions d’impôts permettent de relancer l’économie. Le gouvernement allemand espère qu’à partir du 1er janvier les bénéficiaires vont dépenser l’argent, auparavant réservé aux impôts, ce qui devrait favoriser la relance et inciter à créer des emplois à moyen terme.
Il existe pourtant un grand scepticisme face à la nouvelle loi: tout d’abord, on doute que l’argent libéré soit dépensé de manière à promouvoir la croissance. Ensuite on se demande si les réductions d’impôts sont compatibles avec l’endettement public allemand qui a atteint des sommets effrayants à tous les niveaux: Fédération, Länder et com­munes.
Les Länder pauvres et surtout un grand nombre de communes en difficultés déplorent en outre le fait d’être ainsi confrontés à de nouvelles pertes d’impôts, alors que leur déficit budgétaire est déjà considérable et qu’il faudra encore rogner davantage sur les dépenses sociales.
Le dilemme devant lequel se trouvent la politique allemande et celle de beaucoup d’autres gouvernements est évident: La crise financière et économique mondiale a montré que l’idée des responsables politiques qu’on peut la pallier en dépensant l’argent public a révélé ses limites puisqu’un très grand nombre d’Etats sont surendettés et sont incapables de supporter de nouvelles dettes.
Maintenant, même des politiques allemands évoquent, à juste titre, l’imminence d’une incontournable spirale d’endettement où les contraintes du service de la dette empêchent le gouvernement d’agir. Il ne faut pas oublier que la dette publique allemande des années 1965 à 2008 qui a atteint, pour la totalité des budgets publics, la somme de 1,34 billion d’euros, les seuls intérêts (sans l’amortissement!) s’élève à 1,51 billion d’euros!1 Or, au cours des 45 dernières années, les sommes nécessaires à payer les intérêts ont dépassé le montant des nouvelles dettes.
De nombreux observateurs craignent, et avec raison également, que la passivité et le fait d’attendre la relance uniquement des «forces du marché» entraînent une hausse du chômage et des émeutes d’une ampleur sans précédent.
A cela s’ajoute le fait que l’on constate maintenant que les billions que les Etats ont débloqués pour le «sauvetage» du monde de la finance n’ont pratiquement pas apporté la stabilité et n’ont que peu aidé l’économie réelle. Au contraire, ils ont provoqué une nouvelle vague gigantesque de spéculations financières.
Le remède de l’Etat s’est ainsi transformé en drogue. Les grandes banques, plus concentrées aujourd’hui qu’avant la crise, continuent d’amasser des milliards de profits provenant de la spéculation et non pas des crédits. Aussi le magazine allemand «Der Spiegel» a-t-il placé à sa une, le 23 novembre, et cela également avec raison, le titre suivant: «La bombe des billions. Pourquoi, après la crise économique du siècle, la suivante menace.»
Le néolibéralisme, qui prône la concurrence de tous contre tous et «la victoire du plus fort» nous montre depuis des années sa face grimaçante. Rien à espérer donc de ce côté-là. Cependant il apparaît clairement que la croyance dans les pouvoirs de l’Etat, dans le fait que d’avantage d’Etat peut améliorer la situation mène à une impasse.
Aussi le moment ne serait-il pas venu de mettre toute son énergie à faire naître une authentique société civile qui soit durable? Une société dans laquelle le sens du bien commun ne soit plus méprisé et qu’il offre une perspective en direction d’une vie communautaire libérale, solidaire et fondée sur le principe de subsidiarité. Le village écolo­gique de Brodowin, dans le Brandebourg, en est un bon exemple.
Partout, les hommes sont capables de faire de nécessité vertu. Créer avec les autres, dans l’indépendance, quelque chose qui n’assure pas seulement l’existence mais sert en même temps le bien commun, voilà une bonne perspective. De nombreuses coopératives l’ont déjà fait. Il est possible de contribuer à accélérer une réorientation, avec des idées, des savoir-faire, des encouragements et des sou­tiens, de redécouvrir ce qui caractérise le genre humain: sa capacité à collaborer dans un esprit de liberté et d’égalité et à résoudre ainsi les problèmes les plus difficiles. Une «Initiative citoyenne en faveur d’une solidarité et d’une autonomie durables», concernant le pays tout entier, serait une bonne chose.
Il faut dire aux individus et aux institutions qui créent ou soutiennent des projets d’aide à l’autonomie, notamment les églises chrétiennes qui œuvrent dans ces domaines depuis des années et disposent de beaucoup d’expérience: Informez l’opinion plus que vous ne le faites déjà; faites-lui part de vos succès; cessez de travailler dans l’ombre et faites que davantage d’hommes et de femmes apprennent ce qu’il est possible de réaliser quand on s’investit dans l’aide à l’autonomie.
Il incombe aux médias d’informer exhaustivement sur ces précieuses initiatives. Eux aussi peuvent amener nos compatriotes à tirer profit de la crise pour créer quelque chose de nouveau, d’utile et de digne.    •

1    Ces chiffres sont tirés de l’analyse de Dieter Meyer: «Die Schuldenfalle. Eine Untersuchung
der Staatsverschuldung ab 1965 bis 2025
(mit Ausblick auf den Zeitraum bis 2040).»
(www.staatsverschuldung-online.de)