Horizons et débats
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Tél.: +41-44-350 65 50
Fax: +41-44-350 65 51
Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité
pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
18 juillet 2016
Impressum



deutsch | english
Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°25, 29 juin 2009  >  A propos d’élections en Autriche d’un pseudo-parlement de l’Union européenne [Imprimer]

A propos d’élections en Autriche d’un pseudo-parlement de l’Union européenne

par Henri Houlmann, La Chaux-de-Fonds

Chaque encyclopédie vous dira qu’un parlement est le siège de députés élus par le peuple avec les compétences
•    d’édicter des lois,
•    de déterminer le budget,
•    de contrôler le gouvernement.
Ce qui se fait appeler «Parlement» dans l’Union européenne ne possède aucune de ces compétences. De plus, il n’est pas européen, l’Union européenne comptant 27 pays sur 45. Enfin, il ne peut pas même sou­mettre des propositions de lois, ce privilège étant réservé à la Commission européenne, qui ne jouit d’aucune légitimation.
Pas plus d’ailleurs que de donner une ligne de conduite politique. Cette dernière repose sur le principe défini dans le Traité de Maastricht, toujours en vigueur:
Le Conseil européen qui réunit les chefs d’Etat ou de gouvernement des membres ainsi que le Président de la Commission donne à l’Union les impulsions nécessaires à son développement et en définit les orientations politiques générales. Les décisions du Conseil européen – prescriptions, directives, décisions – se prennent après proposition de la Commission européenne et audition d’experts; ces propositions peuvent être acceptées, modifiées ou refusées sans recours.
Selon une étude parue dans la NZZ du 30 mai, il y a actuellement dans l’UE quatre processus de décisions différents auxquels est associé le Parlement. Dans certains domaines, notamment la «Politique extérieure et de sécurité», il n’a pas son mot à dire.
•    La forme la plus insignifiante de cette association est l’audition. Dans ce cas, les propositions de lois doivent être soumises au Parlement pour consultation, avant de pouvoir entrer en vigueur.
•    Dans le processus d’approbation le Parlement doit donner son accord: il a donc un droit de veto. Mais il n’a aucune influence sur le contenu. Ce processus est applicable par exemple lors d’extensions.
•    Le processus de coopération a largement perdu de son importance, n’étant plus guère valable que dans les domaines de l’union économique et monétaire. Depuis 1999, il n’a été utilisé qu’une seule fois. Le Parlement peut toutefois modifier ou compléter des projets de lois, mais peut être mis en minorité par le Conseil des Etats membres, en consensus.
•    Le processus de co-décision est devenu le processus de législation le plus important; il serait encore étendu à d’autres domaines politiques en cas d’acceptation du Traité de Lisbonne. Il s’agit du fait que tant le Parle­ment que le Conseil des Etats-membres traitent un projet de loi. Le projet en question ne peut toutefois être traité que trois fois; si le Parlement et le Conseil ne trouvent pas de compromis, on renonce au projet.
Lorsqu’on procède à une analyse de ce langage, on constate que le terme de décision n’existe pas. Le Parlement ne décide pas. On trouve les termes et expressions suivants:
associé – pas son mot à dire – consultation – accord – aucune influence – perdre son importance – être mis en minorité – tant le Parlement que le Conseil des Etats-membres traitent un projet de loi.
On constate aussi que ce pseudo-parlement est chapeauté, soit par le Conseil des mi­nistres, soit pas la Commission, il est donc toujours en arrière-plan.
Ce qui fait dire à Robert Menasse, auteur autrichien contemporain très connu, que «Maintenant nous allons élire le Parlement européen qui n’a guère de compétences. A l’opposé de la Commission – que nous n’avons toutefois pas élue».
On peut donc légitimement se poser la question de la valeur des élections. C’est bien ce que se demandent les populations, d’où un taux de participation ridiculement bas (pour l’ensemble de l’UE 43,1% contre 45,5% lors des élections en 2004). Il apparaît aussi très rapidement qu’elles ne portent, en fait, pas sur l’Union européenne, mais restent largement fixées sur les problèmes de chaque pays.

Les slogans

On retrouve ce phénomène dans la propagande électorale de presque tous les partis. Toutefois la plupart des slogans ne veulent rien dire, p.ex. «Pour renforcer l’Autriche, votez pour nous» ou «L’équipe A pour l’Europe» ou «C’est juste pour l’Europe» ou «C’est mieux pour l’Europe». En lisant attentivement la presse, par exemple «Die Presse», journal plutôt favorable à l’Union européenne, on constate qu’il y a quelque prise de conscience des graves problèmes de sécurité. Cependant, comme presque personne ne veut s’attaquer à ces difficultés de la population, la propagande politique tourne à l’attaque personnelle. On pense, en traitant les autres de «nazis», pouvoir occulter les problèmes; qu’il suffit de pousser des cris d’orfraie pour avoir raison de se taire sur l’essentiel. On assiste ainsi à un véritable festival d’hypocrisie.

Les résultats en Autriche

Le taux de participation a atteint 42,4% – les partis favorables à l’UE, telle qu’elle se présente actuellement, ont perdu des voix (socialistes –9,48%; conservateurs –3,01%; les Verts –3,39%). En revanche les listes nettement opposées à cette UE ont gagné: Hans-Peter Martin (ancien journaliste au Spiegel, importante revue politique allemande), soutenu par le journal de masse «Die Krone», a atteint 17,87%, soit +3,89% et le FPÖ 13,08%, soit +6,77%. Il est intéressant d’établir un parallèle:
En 1994, lors de la votation pour l’adhésion à l’UE 81% des votants se rendirent aux urnes, 64% approuvant l’adhésion, ce qui représentait 53% du corps électoral. Lorsqu’on prend maintenant les pourcentages de celles et ceux qui ont voté en opposition à l’UE (donc Martin, FPÖ et BZÖ, ‹ancien parti de feu Jörg Haider›) on atteint 35,61%, soit un tiers des votants. Donc 64,39% peuvent passer pour favorable à l’UE, mais sur seulement 42,4% de participation, ce qui représente 15% du corps électoral, contre 53% il y a 15 ans. Ce résultat en dit long.
Certes, la grande majorité des opposants à l’UE ne sont pas des partisans d’un retrait de leur pays. Il existe bien un mouvement «Heimat und Umwelt» qui s’engage fortement pour faire sortir l’Autriche de l’UE, mais il reste encore très faible. Les gens ressentent quelques craintes face au caractère agressif des instances de l’UE. Ils n’ont pas oublié l’agression de l’an 2000.    •