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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  N°38|39, 17 septembre 2012  >  L’Allemagne doit redevenir un Etat de droit [Imprimer]

L’Allemagne doit redevenir un Etat de droit

par Karl Müller

Le 10 septembre, la nouvelle année scolaire a commencé dans notre pays voisin du Bade-Wurtemberg. Environ 40 écoles dites «communautaires» (Gemeinschaftschulen) débuteront pour la première fois leurs cours.
Les arguments éducatifs contre ce nouveau type d’école sont maintenant bien documentés (www.arbeitskreis-schule-und-bildung.de). D’un point de vue de droit politique et constitutionnel et bien que les transformations faites dans la loi sur l’éducation soient amendées par les partis vert et rouge du Parlement du Bade-Wurtemberg, il faut signaler que le modèle de ce type d’école est très discutable. Car la Constitution du Land Bade-Wurtemberg est, avec ses objectifs pédagogiques clairs, toujours valable. Comme par le passé, les paragraphes introductifs de la loi sur l’éducation du Bade-Wurtemberg restent valides, y compris la Constitution du Land sur la base des objectifs pédagogiques pour les enseignants dans les écoles publiques. Le modèle de l’école dite «communautaire» a des objectifs qui conduisent dans une direction diamétralement opposée.
De tels développements sont particulièrement regrettables quand la législation allemande n’a plus la maîtrise des lois allemandes qu’il met en place, mais que des majorités parlementaires suivent d’autres maîtres et oublient leurs électeurs. A cet égard, l’actuelle pratique parlementaire allemande viole la démocratie représentative et ses idéaux ainsi que ses principes constitutionnels. L’Allemagne se rapproche de plus en plus d’une forme très dangereuse d’«état d’urgence».
Cela s’applique également à la législation dans le secteur de l’éducation. Concrètement, on parle du fait que des institutions telle que l’UE et l’OCDE (sous l’influence des Etats-Unis), nullement légitimées ni par la Constitution ni par la Loi, ont exercé ou essaient encore d’exercer une influence sur la législation allemande.
Une interview de la «Frankfurter Rundschau» (13/7/12) avec le «chef de PISA» Andreas Schleicher, employé par l’OCDE, illustre cela de manière exemplaire. Dans cette interview se trouve une sorte de modèle pour ce qui doit être mis en œuvre dans le Bade-Wurtemberg avec les écoles dites «communautaires». Pour cela, il faudra contourner les traditions juridiques nationales et des contextes juridiques. La violation de la loi nationale est, dans le cadre du programme de destruction des Etats-nations, même voulue.
A quel point ces plans internationalistes sont hors normes et destructeurs, est illustré par exemple, par l’exigence de Schleicher d’une formation professionnelle plus académique. Malgré la protestation récente des experts locaux contre l’augmentation continue des taux de diplômés en Allemagne, et en même temps le constat du manque d’ouvriers qualifiés («Mitteldeutsche Zeitung» du 29/8/12: «L’augmentation du nombre d’étudiants constitue, du point de vue d’experts du marché du travail, une menace pour la compétitivité de l’économie allemande»; «Berliner Zeitung» du 30/8/12: «Beaucoup d’étudiants, peu d’apprentis – les universitaires sont de plus en plus un problème»).
La violation de la loi sur l’éducation est un des domaines, de plusieurs, où l’Etat de droit allemand perd de son autorité. Cela va de la continuelle participation allemande dans des guerres d’aggression illégales, jusqu’à la préparation de missions anticonstitutionnelles de la Bundeswehr, à l’intérieur du pays contre ses propres citoyens (Centre d’exercises au combat, GÜZ, Altmark) et le mépris de la souveraineté des Etats voisins (attaques contre la Suisse, incitation au vol et au recel de données bancaires volées), jusqu’à la violation de traités internationaux, y compris dans le cadre des traités européens, et de l’attaque contre le droit budgetaire national et les droits de propriété des citoyens.
La dernière décision du Conseil de la Banque centrale européenne (BCE) fait également partie de cette série, selon laquelle il est maintenant possible d’acheter des obligations d’Etat de pays endettés, illimitées en nombre et en temps – le pays dont les représentants étaient les seuls à voter contre, doit payer le plus, à savoir 27%.
Que des députés allemands, le président de la Deutsche Bundesbank, des experts financiers de renom et des juristes ont soulevé l’illégalité de la décision de la BCE et maintenant, à l’unisson réclament le retour en droit, cela représente pourtant une petite lumière au bout du tunnel.
L’ancien juge à la Cour constitutionnelle fédérale, Paul Kirchhof écrit dans son livre publié récemment, «Deutschland im Schuldensog. Der Weg vom Bürgen zum Bürger» (2012, ISBN 978-3-406-64043-8): «La crise a surgi parce que nous avons ignoré le droit. […] Si nous avions respecté le droit, il n’y aurait pas de crise d’endettement. Par conséquent, il est grand temps de restaurer l’autorité du droit.»     •