Horizons et débats
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Tél.: +41-44-350 65 50
Fax: +41-44-350 65 51
Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité
pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
18 juillet 2016
Impressum



deutsch | english
Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°28, 20 juillet 2009  >  On ne résout pas ses difficultés en mentant aux autres et à soi-même [Imprimer]

On ne résout pas ses difficultés en mentant aux autres et à soi-même

C’est en s’engageant pour les autres et en s’efforçant d’être vrai qu’on fait preuve de sens des responsabilités

Réflexions sur l’arrêt de la Cour constitutionnelle allemande sur le Traité de Lisbonne et sur l’encyclique «Caritas in Veritate»

Deux documents importants ont paru fin juin/début juillet, qui, à première vue, n’ont rien de commun. Toutefois, en les étudiant de façon approfondie, on découvre qu’ils contiennent tous les deux des orientations pour notre pensée et notre action.
Le premier document est le texte de l’arrêt de la Cour constitutionnelle allemande du 30 juin à propos de la plainte déposée contre la loi d’accompagnement à la ratification du Traité de Lisbonne qui se trouve sur le site Internet de ladite Cour (www.bundesverfassungsgericht.de). Quant au deuxième document, il s’agit de l’encyclique du Pape Benoît XVI du 29 juin concernant le développement humain intégral et intitulée «Caritas in Veritate». Le texte complet se trouve sur www.vatican.va.
Nous ne nous attarderons pas outre mesure sur ces documents, cela d’autant qu’il serait incongru de la part d’un laïc de vouloir présenter, voire discuter un texte comme l’encyclique du Pape.
Ayant lu des deux textes, nous donnerons quelques impressions sur l’ensemble, évitant les détails. Ce qui nous intéresse, ce sont les remarques de fond qui peuvent être importantes pour l’approche des tâches de l’humanité. Nous le ferons brièvement, car nous ne pouvons qu’exprimer notre souhait d’un intense échange d’opinions.
Occupons-nous d’abord de l’arrêt de la Cour constitutionnelle. La politique de l’Union européenne et celle des gouvernements des pays membres qui la soutiennent et l’élaborent, ont perdu la confiance de larges couches des peuples européens en raison de leurs manquements considérables et de leurs décisions erronées. De plus, les populations européennes, mais pas seulement elles, ont le sentiment que leurs critiques justifiées sont ignorées, ce qui enlève tout caractère démocratique à l’Union européenne et également aux Etats qui en font partie. Les plaintes allemandes contre le Traité de Lisbonne ont précisément mis le doigt sur cette absence de démocratie et d’esprit républicain. D’ailleurs, la Cour constitutionnelle a mis la démocratie au centre de son arrêt.
Mais, en fait, il s’agit d’une tromperie. Certes l’importance de la démocratie pour une vie dans la dignité est mise en avant, on affirme se préoccuper de la démocratie en Europe, on parle même d’un déficit structurel de démocratie dans l’Union européenne mais on se contente de proposer quelques retouches mineures.
Nous ne nous prononcerons pas sur la question de savoir si c’est voulu ou simplement le fruit d’une attitude qui consiste à «s’en laver les mains» de la part de la Cour suprême allemande; C’est l’expression de l’aveuglement de celui qui sait ce qui est juste ou faux mais n’arrive pas à se décider et n’assume pas ses responsabilités. Il en résulte que la Cour, par son arrêté, contribue de manière tout à fait déterminante à jeter de la poudre aux yeux non seulement des Allemands, mais des peuples d’Europe en leur faisant croire que tout se passe de façon démocratique alors que c’est le contraire qui est vrai. On dupe les peuples et on trahit la vérité.
On ne saurait minimiser le fait que, comme l’a souligné un spécialiste du droit international, l’on ne pouvait s’attendre à un autre arrêt du moment que la Cour «est partie intégrante du système de pouvoir de l’Etat et que, par conséquent, sur une question aussi essentielle, aux dimensions internationales, que l’adoption [du Traité] de Lisbonne, il ne pouvait prendre une décision allant à l’encontre de la politique actuelle.» Nous ne voulons pas les condamner mais nous devons reconnaître que les juges de la Cour constitutionnelle sont responsables de leurs actes, en tant qu’individus et que titulaires d’une très haute fonction.
Nous devons cependant nous habituer à l’idée qu’on nous cache des actes répréhensibles par de belles paroles. Nombreux sont ceux qui craignent à juste titre que le nouveau président des Etats-Unis donne dans cette direction.
Il en va tout autrement de l’encyclique du Pape.
On lit ce texte, mais lentement, phrase après phrase, car chacune d’entre elles donne à réfléchir. Le laïc constate avec quel soin et quel engagement ce document reflète le souci des humains et de leur bien. On se rend compte du nombre de questions auxquelles il faut réfléchir quand on veut s’engager en faveur de l’humanité. Cette encyclique est un appel sincère au dialogue.
Il serait injuste de vouloir tirer quelques points de cette encyclique pour les pro­poser isolément; nous y renonçons donc. On comprend toutefois pourquoi le combat dans notre monde est d’abord un combat d’idées et qu’on ne peut affronter les idéologies que dans la vérité.
On est toutefois impressionné par ces paroles simples, et sans aucun doute par ces simplifications et on ne peut qu’inviter chacun à lire ce texte, à en discuter, à dire comment il le comprend, à prendre son contenu au sérieux.
Lorsqu’on a demandé au rédacteur en chef de la section allemande de Radio Vatican pourquoi il a fallu autant de temps pour rendre publique cette encyclique, il a répondu: «Parce que cette encyclique, cette déclaration devait être substantielle et elle l’est. C’est pourquoi il y a eu ce long processus de réflexion mené par des personnes connaissant la matière dans le monde entier, de l’Amérique latine à l’Asie. C’est la raison de ce long délai. Il fallait que ce texte soit vraiment profond, qu’il tienne compte de tous les points de vue possibles.»
On s’est donc mis au travail dans un esprit interdisciplinaire et dans le monde entier. C’est une grande joie de constater que tant de monde s’est mis à réfléchir et à vouloir s’engager pour le bien et le développement de l’humanité. C’est une magnifique invitation à participer à cette mission.

Karl Müller