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Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  N°13, 2 avril 2012  >  Comment le capitalisme américain arriva chez nous [Imprimer]

Comment le capitalisme américain arriva chez nous

Les problèmes sont de nature systémique

Le capitalisme américain se distingue en premier lieu par une pensée à court terme axée sur le rendement, avec répartition des bénéfices maximale (dividende trimestriel, bonus exorbitants) alors que des réflexions sur le risque, le principe de précaution, des régulations étatiques (au lieu de la protection de l’économie nationale, le principe du cassis de Dijon et la liberté de la circulation des capitaux) des préoccupations morales et sociales (assurances sociales, santé publique, instruction publique, démocratie directe) ou la protection de l’environnement (génétique, brevet vital, CO2) sont refoulés ou totalement occultés.

pa. L’exemple qui suit montre comment, partant des USA depuis la fin de l’empire soviétique, la mondialisation a été imposée dans presque tous les Etats, particulièrement par la privatisation du service public.1 La carrière d’un de ses protagonistes les plus importants en Suisse – ayant un rayonnement international2 – illustre cela:
Ernst Buschor, né en 1943, après ses études et son doctorat à l’Université de Saint-Gall (HSG) obtint en 1971 un mandat d’expert en affaires financières du Conseil de l’Europe. En 1975 il devint chef de la gestion financière du Canton de Zurich où il introduisit – un prototype pour la Suisse – le «nouveau modèle de calcul» emprunté à l’économie privée,3 lequel permet, par opposition au calcul traditionnel étatique entrées/sorties (caméralistique), une politique étendue de la dette et une cosmétique du bilan (par ex. «constitution de capital» par l’activation de routes et de forêts non commercialisables, etc). En 1985 Buschor fut appelé comme professeur à la HSG, où il encouragea l’importation de théories provenant de l’espace anglo-saxon, exerça une activité de conseiller riche et variée et contribua de façon déterminante à la formation d’un modèle suisse de la réforme administrative américaine en «New Public Management (NPM)»4 la soi disante «direction administrative orientée vers l’efficience».
En 1993 Ernst Buschor entra au gouvernement du canton de Zurich. Dans les années 1990, Buschor réussit à introduire des réformes néolibérales aux conséquences imprévisibles dans l’administration publique, dans l’instruction publique et dans la santé publique. Il inaugura une politique des caisses vides et des promesses à tous les partis prétendant qu’on pouvait économiser de l’argent sans diminuer les prestations et sans devoir remettre en cause des acquis sociaux, tout en éliminant de larges portions du processus démocratique de la politique budgétaire et en ignorant toute stratégie de communication rigoureuse.5
Après avoir chamboulé, en tant que chef de la direction de la Santé publique et d’Assistance publique, la Santé publique au moyen de réformes NPM, Buschor fut, de 1995 à 2003 en tant que directeur de l’instruction publique, responsable des réformes NPM du système éducatif, réformes profondes et anti-pédagogiques.6 Au début, son ambitieux «projet d’école 21», avec l’anglais et l’utilisation d’ordinateurs dès la première année primaire, dont le modèle l’avait enthousiasmé en Californie, échoua. Plus tard, il imposa l’anglais précoce et le contesté système MAB d’évaluation des maîtres et il introduisit des écoles comme des «Profit Centers avec CEO». Lorsqu’à la fin 2002 Ernst Buschor voulut garantir ses réformes NPM dans la loi sur l’école primaire avec douze projets partiels, le peuple zurichois la refusa par une majorité négative de 52%. En même temps Buschor mit à exécution les réformes NPM à l’université, ce qui entraîna un changement culturel en direction de «l’auto-organisation» et – comme dans les universités américaines – à l’influence de sponsors de l’économie sur le domaine de la recherche scientifique qui jusqu’ici avait été libre.
Les influences de Buschor – même au-delà de la Suisse – consistant à agir dans le sens du capitalisme américain étaient extraordinaires. Le cumul de positons élitaires dirigeantes dans diverses sociétés promut Buschor dans une situation de réformateur efficacement puissant. Il était membre de nombreuses commissions, dont l’harmonisation suisse des ménages publics (présidence), président du programme national de recherche «efficacité des mesures étatiques», président de la commission suisse de planification universitaire, président de la société suisse des sciences administratives qui se transforma dans les années 90 en un important forum de diffusion du «New Public Management». De 1998 à 2003, Buschor fut membre du conseil des Hautes écoles suisses et en 2001/02 vice-président de la conférence universitaire suisse. De 2004 à 2007 il fut vice-président du conseil des écoles polytechniques fédérales (EPF). Depuis 2003 il siègea au conseil de fondation de la fondation Jacobs et au conseil de fondation de la fondation Careum Zurich, depuis 2004 au conseil consultatif du Centre pour le développement de l’université (CDU). En 2005 il devint membre du comité directeur de la fondation Avenir à Zurich. De 2005 à 2007 il présida le conseil d’administration de la fondation Bertelsmann à Gütersloh. Il est membre correspondant de l’institut allemand de l’administration publique à Speyer.7,8,9
Bien qu’assez tôt des voix critiques se manifestèrent (p. ex. celle de Fred Malik, HSG) contre le modèle américain prétendument tellement efficace et que la presse faisait mousser, que le capitalisme américain et sa pratique de comptabilité générale pour l’établissement des bilans eût contribué en 2002 déjà aux plus grandes faillites d’entreprises mondiales (WorldCom, Enron «The World’s Greatest Company», Arthur Andersen «Big five», Tyco, Global Crossing) et que des groupes suisses durent assainir leurs filiales américaines à coup de milliards de dollars, le capitalisme américain continuait à passer pour un modèle.
Les réformes suisses de l’administration et du droit administratif (réforme du droit des actionnaires etc.) furent poursuivies selon ce modèle, des managers américains furent hissés à la tête de groupes suisses et les «bonus d’arnaque» devinrent la règle en Suisse aussi. La grande récession de 2008 débuta en Amérique et se répandit en peu de temps dans le monde entier – rien qu’en Chine vingt millions d’emplois furent perdus – et des millions de personnes s’appauvrirent. L’économie politique moderne avec sa croyance au marché libre et à la globalisation avait promis le bien-être pour tous. Ces doctrines fondées sur l’économie de marché avaient prétendu, durant ces dernières 25 années, que les marchés libres et illimités étaient efficients et corrigeraient rapidement les erreurs. L’Etat devait se limiter aux tâches nécessaires parce que les régulations entravaient la force d’innovation de l’économie.
Le prix Nobel Stiglitz voit l’issue de la crise de l’économie mondiale actuelle dans une réorganisation du système de l’économie mondiale (cf. Horizons et débats, no 21 du 31 mai 2010, «Le triomphe de la cupidité»): «La crise actuelle a révélé des vices fondamentaux du système capitaliste, ou du moins de la variante du capitalisme qui a émergé aux Etats-Unis dans les dernières décennies du XXe siècle (parfois nommée capitalisme ‹de style américain› ou ‹à l’américaine›) […] Face à des problèmes aussi omniprésents et permanents que ceux qui ont accablé le système financier américain, on ne peut tirer qu’une seule conclusion: ils sont systémiques. Avec ses fortes rémunérations et son obsession du profit, Wall Street attire peut-être plus que sa part de personnages éthiquement faibles, mais l’universalité du problème indique qu’il y a des vices fondamentaux dans le système.»    •

1    Zbigniew Brzezinski, Le grand échiquier. L’Amérique et le reste du monde. (Original anglais: The Grand Chessboard. American Primacy and its geostrategic Imperatives.)
2    E. Buschor: «Das Ausmass der Globalisierung wird nicht in Zürich entschieden.» «Wissensgesellschaft: Die Zukunft beginnt auf der Baustelle.» Revue Bilanz, 8/8/03
3    Buschor, Ernst: «Das neue Rechnungsmodell für Kantone und Gemeinden» 1978, dans: Forum statisticum 10 (1978), p. 3–12
4    Buschor, Ernst: «New Public Management als neuer Retter in der Not: Der anspruchsvolle Weg zum New Public Management.» 1997, dans: Reflegs – Informations- und Personalmagazin des GS EMD 1997, no 7
5    Pelizzari, A.: Die Ökonomisierung des Politischen: new public management und der neoliberale Angriff auf die öffentlichen Dienste, Konstanz 2001. ISBN 3-89669-998-9, Kapitel 3: Finanzpolitik und gesellschaftspolitische Gegenreformen im Kanton Zürich
6    Le conseiller d’Etat E. Buschor aurait promis quelques mois après son passage à la direction de l’instruction publique de «faire descendre le système scolaire zurichois du haut de sa monture pédagogique et de le convertir en une entreprise de services».
7         Buschor, Ernst: «New Public Management: Reformbedarf auf Bundesstufe.» 2000, in: Vom Service Public zum Service au Public Zürich, 2000, p. 63–69, ISBN 3858238562
8        Buschor, Ernst: New public management. Internationale Erfahrungen und Beiträge Ernst Buschor, Verlag Heidelberg Zündel & Partner Hrsg. 1996
9        http://de.wikipedia.org/wiki/Ernst_Buschor_ %28%C3%96konom%29

Conseil fédéral: interdiction de portables à cause du danger d’espionnage?

Pour des raisons de sécurité, il est dorénavant interdit d’avoir un portable sur soi lors des séances du Conseil fédéral. Le Conseil fédéral est-il soumis à l’espionnage? Pour les experts, cela semble tout à fait possible.
De nouveaux détails concernant l’interdiction de portables lors des séances du Conseil fédéral ont été rendus public: le porte-parole André Simonazzi a confirmé au «Blick» que cette décision avait été prise pour des «raisons de sécurité». Jusqu’à présent, on soupçonnait que des indiscrétions avaient fait pencher la balance. Le Conseil fédéral est-il soumis à l’espionnage? Techniquement cela ne poserait pas de problème, a déclaré le spécialiste IT Ulrich Fiedler. «Si l’on introduit clandestinement un code correspondant dans un portable, on peut enregistrer des entretiens par le micro du portable ou les transmettre au réseau. Le portable fonctionne alors comme un micro caché.» Pour cela, il suffit qu’un spécialiste ait brièvement en main ce portable. Mais on pourrait aussi pirater des informations à l’aide d’un poste d’écoute.
En cachette, on discute et se demande qui pourrait bien être intéressé à épier le Conseil fédéral.
L’expert en stratégie Albert A. Stahel y voit avant tout une raison. «Les gouvernements des Etats-Unis, de la France, de l’Allemagne etc. s’intéressent aux informations sur la stratégie du Conseil fédéral concernant les négociations au sujet de la place financière suisse. Leurs services secrets pourraient avoir reçu l’ordre d’épier le Conseil fédéral.» Avec de telles informations les gouvernements développeraient et réaliseraient des contre-stratégies. [...]

Source: www.20minuten.ch  du 22/3/12  (Simona Marty)
(Traduction Horizons et débats)