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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°17, 4 mai 2009  >  La Suisse ne doit en aucun cas adhérer à l’UE [Imprimer]

La Suisse ne doit en aucun cas adhérer à l’UE

par Frédéric Walthard, Estavayer-le-Lac

Le ministre allemand des Finances, soutenu par la chancelière, jadis plutôt retenue, recourt à des propos violents pour attaquer le secret bancaire suisse. Les Américains, habituellement plutôt honnêtes à l’égard de la Suisse, se comportent comme si elle était une quelconque république bananière et la principale responsable de la crise financière et économique qu’ils ont pourtant déclenchée, comme chacun sait. Le président français et ses «suiveurs» au sein de l’UE et de l’OCDE profitent de l’occasion pour nous menacer de nous inscrire sur une liste noire ou grise dont on ne sait d’ailleurs pas si elle existe vraiment ou si elle a été inventée pour servir d’épouvantail. Et maintenant le Conseil fédéral parle de fuite en avant. Où précisément? Naturellement au sein de l’UE qui semble être, pour un nombre croissant de Suisses, la seule voie prometteuse.
Il va de soi que pour ceux qui se sont habitués, en tant que simples fournisseurs, à trouver auprès de leurs voisins directs, surtout l’Allemagne, des partenaires économiques commodes permettant un commerce particulièrement lucratif, le marché commun tel qu’il est offert par l’UE constitue la solution idéale. Pour survivre, ils ne seront plus contraints, comme ce fut le cas des généra­tions précédentes, de faire preuve de courage et d’esprit d’entreprise pour réussir à diversifier dans le monde entier et de diversifier, par une savante logique de répartition des risques, leurs relations économiques et commerciales entre une multitude de partenaires difficiles mais d’autant plus sûrs. Ces partenariats reposaient sur un échange équilibré, donc sur la confiance qui contribuait à un développement du commerce mondial aussi juste que possible et ainsi au développement salutaire des pays et des peuples. Or la création de grands marchés communs tels que l’UE et beaucoup d’autres a abouti, à la suite de la mondialisation qui l’a accompagnée, à une situation où les marchés et les pays de petite taille dépendent unilatéralement de ces grands marchés nouvellement créés et des groupements d’Etats qui leur correspondent.
La baisse des exportations suisses, qui a pris une ampleur menaçante est la conséquence de la crise européenne, en particulier de celle des exportations allemandes.

Où en est la Suisse aujourd’hui?

La Suisse, qui était le pays par excellence des échanges commerciaux avec le monde entier, qui servait de partenaire et d’intermédiaire non seulement au niveau des grands mais aussi des petits marchés, a, après avoir signé les accords bilatéraux I et II avec l’UE, réorienté sa politique commerciale vers le grand marché commun européen et vers un nombre restreint d’autres grands marchés tels que ceux des Etats-Unis, de la Chine et du Japon. En conséquence, elle a perdu son caractère de nation commerciale indépendante. En raison de son actuelle dépendance des grands marchés, notamment de celui de l’UE, elle se voit aujourd’hui réduite au rôle unique de fournisseur, ce qui a certes l’avantage de procurer aux entrepreneurs des affaires beaucoup plus rentables et moins risquées dans les périodes calmes.
Personne, ni les politiques ni les industriels, même pas les responsables de PME, ne semble avoir pensé aux conséquences de cette dépendance d’un ou deux grands marchés, lesquelles sont apparues à l’horizon économique comme de sombres nuages menaçants.
Aujourd’hui où cela va mal pour les grands partenaires de la Suisse, les petits fournisseurs suisses, loyaux et fiables jusqu’à présent, sont juste bons à passer à la caisse. Et cela à plusieurs égards: il y a moins de possibilités de faire du commerce; le chômage se reporte sur les partenaires de moindre importance; on leur demande de participer au plans de sauvetage à hauteur de milliards; on poursuit comme des criminels ceux qui placent leur argent en Suisse pour échapper à des impôts démesurés qui n’ont généralement pas été décidés démocratiquement par les citoyens; on brandit des listes noires ou grises et des menaces de rétorsion draconiennes pour sanctionner on ne sait quels crimes.
Les autorités et les organisations respon­sables du commerce extérieur ainsi que les nombreux entrepreneurs et commerçants suisses désemparés essaient de trouver le salut en prônant l’adhésion à l’UE. Ainsi, disent-ils, nous ne serons plus traités comme des marginaux. Nous serons membres du club (l’UE) et aurons notre mot à dire. On pourrait même, à en croire certains stratèges superfutés et clairvoyants, se mettre à assouplir de l’intérieur les règles strictes du club, voire inciter les petits Etats, notamment ceux de l’Est, à se révolter contre les poids lourds tels que l’Allemagne et la France ou leurs compagnons de route, les membres fondateurs du club comme le Benelux.
Or, au sein d’un club de structure suffisamment démocratique où les membres jouissent des mêmes droits et dont les lois fondamentales ou les statuts (pour ne pas utiliser le terme grandiose de «constitution») ont été acceptés par tous les membres – ce qui correspondrait, au niveau de l’UE, à des consultations organisées démocratiquement – et où toutes les lois consécutives seraient elles aussi soumises au vote des citoyens, les petits Etats auraient peut-être la possibilité de se faire entendre. Mais ce serait une illusion dangereuse par rapport à une structure telle que l’UE dans laquelle les leaders ont l’impression d’être à la tête d’un Etat unitaire figé qu’ils dirigent de manière autocratique.
En tout cas, le tandem Merkel/Sarkozy semble en être persuadé. Toutefois cette structure reposant à Bruxelles sur un gigantesque appareil administratif et sur des fondements juridiquement assez boiteux, n’est rien d’autre qu’une alliance imposée par les gouvernements des Etats membres qui s’est donné le nom d’Union et tire sa légitimité du Traité de Lisbonne, non encore ratifié, rédigé par le président français Sarkozy sur la base de la suspecte Constitution européenne due à la plume de Giscard et refusée par le peuple français. Comme personne n’a apparemment l’intention de soumettre ce texte à l’approbation des citoyens européens, on peut lui dénier toute légitimité démocratique. L’UE n’est qu’une structure de pouvoir.
Par conséquent, prenons nos distances par rapport à cette structure antidémocratique. Restons fermes, comme l’a déclaré notre président Hans Rudolf Merz, même si on nous inscrit sur une liste noire ou grise. Ce ne serait ni la première ni la dernière fois.
Nous devons, dans notre démocratie directe, de la gauche à la droite, en nous appuyant sur notre Constitution et les lois qui en sont issues, être prêts à négocier fermement et à riposter aux mesures de rétorsion dirigées contre nous par nos contre-mesures, par exemple:
•    en prenant des mesures de rétorsion contre les citoyens de l’UE (Schengen ou pas) qui se sont confortablement incrustés chez nous et s’y sont enrichis (par exemple à la tête d’entreprises traditionnellement suisses);
•    en empêchant la libre circulation des marchandises en réponse au blocus de nos exportations vers les pays européens;
•    en rendant difficiles les transactions financières …
Par le passé, nous avons survécu à plus d’une guerre économique et l’UE se rendra vite compte que, dans beaucoup de domaines, c’est nous qui sommes les plus forts. Nous achetons davantage chez eux qu’ils n’achètent chez nous; ils ont besoin de nos institutions de recherche et de formation, de nos spécialistes hautement qualifiés, de notre savoir-faire proverbial qui les a aidés à surmonter la crise consécutive à la Seconde Guerre mondiale. Rappelons les nombreux crédits grâce auxquels il fut possible d’exporter nos biens d’équipement qui ont permis la reconstruction de l’économie et de l’industrie allemandes ainsi que celles de la plupart des autres pays aujourd’hui membres de l’UE.

Ne soyons pas pusillanimes

Si l’UE ou quelques-uns de ses Etats membres veulent nous déclarer la guerre économique à cause de notre secret bancaire, nous disposons, grâce à notre économie et à notre place financière, de suffisamment d’atouts pour montrer que cette attitude de repli défensif sur nous-même, que redoutèrent déjà les généraux d’Hitler, n’est pas morte.
Une fois membre de l’UE, nous perdrions définitivement cette possibilité. Par conséquent, la Suisse ne doit en aucun cas adhérer à l’UE.    •