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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2010  >  N° 33, 23 août 2010  >  Non aux spéculations sur les produits agricoles [Imprimer]

Non aux spéculations sur les produits agricoles

thk. «Le blé vous enrichit!» C’est le genre de publicité qu’on trouve sur Internet pour inciter à l’achat de blé à la bourse. On en est stupéfait! Le blé, cette matière première si importante pour nourrir les populations est devenue depuis des décennies l’objet de spéculations sauvages. Dans l’ensemble, les humains ne jouent pas avec une nourriture aussi importante, sachant quels effets dévastateurs la spéculation dans ce domaine provoque. C’est pourquoi une telle publicité ne peut que déclencher malaise et dégoût.
Ceux qui ont vu le film documentaire «Blé de septembre», projeté dans les cinémas vers la fin des années septante, début huitante, n’aura pas oublié à quel point une mauvaise récolte dans l’Union soviétique avait fait grimper les prix du blé à la ­bourse américaine, réjouissant les investisseurs. Il est bien possible que certains aient pensé qu’il s’agissait d’un dévoiement capitaliste du communisme et n’aient pas accordé toute l’attention nécessaire à cette ­triste réalité. Mais 30 ans plus tard, après avoir vécu la crise financière et économique, on ne peut qu’être horrifié par la répétition de ce phénomène, image d’une réalité brutale. Est-ce cela le résultat d’une société ­moderne au XXIe siècle?
Les terribles incendies de forêts et de tourbières, dont les causes ne sont pas à chercher seulement dans les chaleurs estivales qui sont monnaie courante dans un climat continental, ont incité la Russie à décréter – du 15 août au 31 décembre 2010 – une interdiction d’exportations de blé, du fait de la destruction d’une grande partie de cette récolte. Le Premier ministre Poutine fit savoir qu’il fallait en premier lieu assurer la subsistance de la population, avant de penser à des exportations.
Cette décision logique de la Russie a provoqué une explosion des cours, déclenchée par les spéculateurs en bourse. Depuis fin juin, le prix du blé a augmenté de 75%, une véritable catastrophe pour le ravitaillement. Ceux qui en souffriront le plus sont les pays qui, du fait du libre-échange, dépendent des importations de céréales, ayant négligé, voire supprimé ce type de cultures, étant donné que les importations étaient meilleur marché. Mais aussi les pays qui ne sont pas capables, du fait de leurs conditions climatiques ou topographiques, d’assurer une production agricole suffisante pour nourrir leur population. Et cette spéculation éhontée ne touche pas que le blé, mais aussi le sucre qui a augmenté d’une fois et demie.
L’approvisionnement de l’humanité en produits agricoles, notamment alimentaires, est une nécessité fondamentale. Selon les résultats scientifiques du Rapport sur l’agriculture mondiale publié en 2008, il est possible de l’assurer avec une agriculture des petits espaces, fournissant les marchés locaux et régionaux.
Assurer l’alimentation de sa propre population par une agriculture nationale est indispensable si l’on veut conserver une souveraineté dans ce domaine. Un libre échange genre OMC est dépassé. Ce dont on a besoin, ce sont des contrats honnêtes et conclus sur un pied d’égalité entre les Etats, assurant un avantage à tout le monde et pas seulement à quelques multinationales âpres au gain.
Les catastrophes, aux causes incertaines, dont souffrent la Russie, la Chine, l’Inde et le Pakistan, montrent à quel point un sys­tème agraire global, fondé sur le seul profit, est fragile. L’été actuel causera aussi dans notre pays des récoltes amoindries, notamment en ce qui concerne le blé. La longue période de sécheresse, suivie de fortes pluies a diminué la qualité du blé, ce qui a pour effet, selon Hansjörg Walter, président de l’Union suisse des paysans, que près d’un tiers de la récolte ne peut être utilisée que pour nourrir le bétail. Ce qui se reporte naturellement sur les revenus, alors que l’agriculture est déjà à la limite de ses capacités financières.
L’économie agricole, dont dépend le ravitaillement des populations, est trop pré­cieuse pour être laissée à la libre disposition des spéculateurs. C’est un droit fondamental des hommes d’avoir suffisamment de nourriture. Il faut donc en finir avec cette légende du marché libre et s’engager, en tant que citoyens conscients, pour une agriculture ca­pable de répondre à sa mission fondamentale: le ravitaillement des populations en quantité suffisante.    •

Le 1er juillet 2010, soit juste au début de la moisson, le Département fédéral de l’économie (DFE) a, sans avertissement, réduit de 14.- frs/100 kilos les taxes de douane pour la farine. Cette décision unilatérale met en danger la production de céréales panifiables en Suisse, à laquelle sont liés des milliers d’emplois. Le monde politique a vite réagi: l’UDC estime inacceptable de mettre en danger le ravitaillement et l’indépendance du pays, du fait d’une politique agricole erronée et anticonstitutionnelle.
La conseillère fédérale PDC Leuthard et le DFE sont priés de remettre fondamentalement en question cette voie internationaliste de la politique agricole, d’en tirer les conséquences néces­saires en redonnant sa place à la production indigène, qui est de grande qualité. […]

Source: Vertraulicher Schweizer Brief du 3/8/10