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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  N° 43|44, 22 octobre 2012  >  Des «sorcières» à l’école maternelle [Imprimer]

Des «sorcières» à l’école maternelle

ks. Le sujet des «sorcières» a commencé après les vacances de Pâques, a été poursuivi jusqu’à la fin de l’année scolaire et s’est terminé par des scènes de théâtre traitant de sorcières.
Avant les vacances de Pâques, les parents ont reçu une lettre des maîtresses de l’école maternelle, dans laquelle elles les priaient de donner une jupe et un livre à leurs enfants pour qu’ils puissent les couper en morceaux et en faire autre chose. Le livre se transformerait en coffret contenant des trésors et des formules magiques.
Une des maîtresses a reçu ses élèves, déguisée en sorcière. Quelques enfants ont eu peur. Ils ne savaient pas ce qui s’était passé avec leur «ancienne» maîtresse. Ils ne se sont pas calmés avant qu’elle se fasse connaître. Le jardin d’enfant était «décoré» de toiles d’araignée et d’araignées. Le coin, où les enfants jouaient normalement avec des poupées et des bébés, était vide, sauf que, à un endroit, il y avait un tas de jupes et de foulards pour permettre aux enfants de se déguiser. Selon les maîtresses, les enfants devaient «se plonger entièrement dans ce thème». Tout était concentré là-dessus: les fiches de travail, les bricolages (balai et chapeau de sorcière) et l’histoire que les maîtresses ont lue aux enfants («Die kleine Hexe» par Ottfried Preussler). Les enfants devaient s’appeler par leurs noms lus à l’envers (Peter – Retep, Simon – Nomis, …), et apprendre par cœur des dictions de non-sens (pour apprendre les coupures des mots) et des formules magiques. Lors d’un anniversaire, ils ont joué à préparer une pizza de sorcière (garnie de serpents et d’yeux de grenouille). Quand, lors de travaux de bricolage, un enfant a demandé des ciseaux à la maîtresse, elle lui a répondu: «Abracadabra, voilà les ciseaux!»
Après les vacances, une des maîtresses est arrivée avec des cheveux de couleur paille (avant, elle avait des cheveux bruns foncé). Elle a raconté aux enfants: «Pendant mes vacances, j’ai été un jour très en hâte, mais je devais absolument aller chez le coiffeur pour me faire couper les cheveux. Par hasard, j’ai rencontré la petite sorcière et je lui ai parlé de mes soucis. Elle m’a répondu: ‹Pas de problème, je sais faire de la magie. Je vais prononcer une formule magique et tout de suite tes cheveux seront coupés.› Elle a donc prononcé sa formule magique. Mais comme la petite sorcière manquait encore d’entraînement, elle s’est trompée et c’est pour cela que j’ai des cheveux de couleur paille.» Au lieu d’une nouvelle coiffure, la maîtresse a maintenant des cheveux blond clair. Cela a beaucoup préoccupé les enfants.
L’excursion de l’école maternelle a été annoncée comme visite d’une «cabane mystérieuse dans la forêt». Les enfants ont fait une randonnée en forêt et sont arrivés à une cabane. Ils y ont trouvé un bout de papier, écrit par la petite sorcière, qui disait que normalement elle habitait bien là, mais qu’actuellement elle était malheureusement absente.
Pour la fin de l’année scolaire, les enfants ont préparé et répété une pièce de théâtre traitant de sorcières: la petite sorcière a – sans en avoir eu la permission – assisté à la nuit de Walpurgis et maintenant le chef des magiciens et les autres sorcières discutent du châtiment qu’il faut lui faire subir. Les sorcières ont proposé diverses possibilités:
La sorcière aux fines herbes: «Je lui prépare un thé horrible qu’elle devra boire.»
La sorcière aux orties: «Je la fais marcher pieds nus dans les orties.»
D’autres sorcières: «Je la frappe avec une pierre sur la tête.» «Comme punition, nous pourrions jeter ce crapaud insolent un moment dans le feu.» «Donnez-la-moi, je l’immerge jusqu’au cou dans un bourbier.» Les enfants font une danse de sorcières avec des tambours de sorcières, on leur offre des boissons vertes et des snacks préparés avec des colorants alimentaires.
Quelles en sont les répercussions:
1.    Les enfants doivent «franchir» une résistance intérieure naturelle, notamment en détruisant quelque chose, en coupant en morceaux un livre ou un vêtement.
2.    Ils doivent cacher (aux adultes) des «trésors», des choses précieuses, dans un livre.
3.    On introduit les enfants dans un monde irréel qu’on leur demande d’influencer à l’aide de formules magiques. Quand ils sont confrontés à un problème, ils souhaitent tout à coup avoir à disposition une formule magique.
4.    Dans l’âme de l’enfant, la sorcellerie est ainsi mise au même niveau que les activités divines: «Ce que font les sorcières, c’est comme ce que fait Dieu. Il sait, tout simplement, faire de la magie.»
5.    Après l’anniversaire, pour lequel la maîtresse avait préparé avec les enfants une «pizza de sorcière», les enfants étaient complètement perturbés. Plusieurs mères ont raconté que leurs enfants étaient très confus et excités en rentrant à la maison.
6.    Les enfants qualifient de «sorcières» certaines femmes qui ressemblent un peu à cette image (nez prononcé, personne âgée, dos courbé).
7.    Des femmes avec des connaissances particulières dans le domaine des fines herbes, des remèdes et de la médecine douce sont intuitivement mises sur le même niveau que les sorcières. C’est ainsi qu’on pose déjà à l’école maternelle, au niveau émotionnel, les bases de la discrimination. Plus tard, les enfants manqueront de résistance intérieure, quand il s’agira de mener des guerres contre des peuples d’indigènes ou des peuples avec des femmes qui ont des connaissances particulières en médecine douce.     •