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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°45, 30 novembre 2009  >  Les écoles d’agriculture en cours de transformation [Imprimer]

Les écoles d’agriculture en cours de transformation

L’exemple du Plantahof à Landquart

par Heini Hofmann

L’agriculture se trouve en pleine transformation, elle est redimensionnée. Le nombre d’exploitations paysannes fond comme neige au soleil. C’est pourquoi, les écoles d’agriculture souffrent; certaines ont été fermées, d’autres réaménagées ou désaffectées. Ici, on a complètement négligé un aspect important. La fermeture d’écoles d’agriculture dans les différentes régions du pays pourrait bientôt se révéler comme une erreur de planification grave et provoquer un effet de boomerang dangereux. Si le nombre d’exploitations agricoles diminue, on n’a plus besoin du même nombre d’instituts de formation pour les futurs agriculteurs qu’auparavant. Ce qui manque cependant, c’est l’information objective et de première main de la population des agglomérations qui est de plus en plus éloignée de la nature et de la production primaire des aliments, sans aucun contact avec l’agriculture. Le canton des Grisons, qui se trouve à cet égard encore dans une situation privilégiée, montre avec son «Plantahof» comment faire mieux.

Des signes précurseurs modifiés

C’est justement parce que la grande majorité des consommateurs n’a plus de contact avec la production des aliments de base, que leurs exigences face aux produits alimentaires augmentent de plus en plus, ce qui augmente du même coup la pression sur la production. Un cercle vicieux! C’est pourquoi par exemple la France est en train de construire 700 fermes éducatives, parce qu’on a réalisé que la transmission d’informations agricoles fondamentales à la société de consommation – qui a perdu tout lien avec la terre – représentait un problème très urgent.
Dans le contexte actuel fortement modifié, l’agriculture n’est plus automatiquement l’enfant chéri de la nation. Elle doit s’affirmer sur le marché. Et avant tout, elle doit à nouveau marquer sa présence et se faire aimer par une société sans aucun lien à la terre, pour qui l’existence permanente d’aliments de bonne qualité et bon marchés est devenue une évidence à peine remise en question. Avec son réseau d’écoles d’agriculture (y compris leur corps enseignant) qui recouvrent tout le pays, la Suisse aurait eu à cette fin un outil optimal et bien organisé. On aurait juste dû reformuler le programme d’apprentissage: 10% pour former les paysans et 90% pour transmettre les connaissances fondamentales sur les produits à une société de consommation devenue étrangère à la terre. Il y aurait beaucoup à reconstruire. Par exemple, de recréer la motivation à s’occuper d’un jardin: jardins naturels, jardins de fleurs et de légumes, jardins communaux, jardins familiaux, mais aussi de se charger de la protection de la biodiversité en s’occupant des plantes et des petits animaux de rapport menacés. Alors nos enfants apporteraient avec joie et fierté un chou-rave planté par eux-mêmes à la cuisine pour leur goûter.

Une exception méritoire

Malheureusement, on s’est trompé et on a déjà sacrifié un nombre considérable d’écoles d’agriculture dans toutes les régions du pays. Ce manque de perspicacité aura des conséquences fâcheuses; car dans un avenir prévisible, on devra payer cher pour créer un nouvel instrument de remplacement. Par bonheur, le canton des Grisons est une exception méritoire dans ce domaine, son école d’agriculture, son centre de formation et de conseils étant un modèle.
Le Plantahof remplit aujourd’hui une triple tâche: c’est premièrement un centre professionnel pour la transmission du savoir agricole, deuxièmement un berceau émotionnel pour les familles paysannes des Grisons et finalement de plus en plus un intermédiaire entre le domaine agricole et non-agricole, c’est-à-dire à la fois un centre d’information pour tout un chacun et un partenaire du tourisme et de l’économie. Afin que la «semence paysanne» soit, également à l’avenir, à la hauteur des exigences qui se modifient constamment, le Plantahof reste dans sa manière de penser et d’agir d’une actualité brûlante.
Cette institution s’est transformée d’une simple école d’agriculture en un centre de compétences multifonctionnel pour la formation et la formation continue. Il transmet un savoir global facilitant la relève dans les exploitations agricoles et il sert en outre de lieu de rencontre pour une meilleure compréhension mutuelle entre milieux paysans et non-paysans. Cette diversité dans les tâches se reflète aussi dans la structure de l’entreprise divisée en plusieurs parties: environ 90 employés travaillent dans les domaines de la formation, du conseil, de l’exploitation agricole et du centre de rencontres.

La pensée en réseau

Les objectifs fixés sont élevés. On se veut un centre de formation et de conseil de premier plan pour l’agriculture en région alpine, un lieu d’où émanent de nouvelles impulsions. Des articles de presse montrent que cela réussit effectivement. Quand, en Suisse, il est question d’écoles d’agriculture, le nom de «Plantahof» est toujours cité. On le constate même au-delà des frontières. C’est ainsi par exemple qu’on a développé un jumelage fructueux avec une école professionnelle d’agriculture et de sylviculture du Tyrol du Sud où on envie ceux du Plantahof de disposer d’une exploitation agricole intégrée.
Ainsi, les réseaux et les jumelages dans l’agriculture constituent la recette du succès pour une planification future qui atteint ses buts. Le Plantahof coopère donc étroitement au sein du projet de la «plate-forme agricole» avec l’Office cantonal de l’économie et du tourisme et avec celui de l’agriculture et de l’amélioration des structures pour promouvoir la commercialisation des produits régionaux et alpins. Une telle alliance montre l’exemple et a des effets aussi au niveau inférieur; il se crée des exploitations en coopération avec des étables communes, des groupements pour l’utilisation des machines agricoles, des coopératives d’achat et des organisations de vente pour la commercialisation des produits à la ferme. Bref: le vieux proverbe «Ensemble, c’est mieux», revit.

Prendre les rênes en main!

La situation n’est bien sûr pas facile. Actuellement, l’agriculture se voit confrontée à un environnement très complexe: au niveau international, il y a l’OMC, les accords de libre-échange et les accords bilatéraux, et au niveau national, la pression vers un changement de la politique régionale avec des effets massifs sur les régions périphériques. Cela signifie au niveau de l’exploitation, notamment dans un canton de montagne: mange ou meurs! Il faut réduire les coûts, innover et saisir les rênes au lieu de peindre le diable sur la muraille! Si une école transmet de telles impulsions, alors elle a rempli sa mission!
Finalement, autrefois aussi il a fallu résoudre des problèmes et l’agriculture des Grisons a survécu à un grand nombre de phases de transformation par le passé. Citons ici l’introduction de la mécanisation de l’exploitation en zone de forte pente il y a bientôt 50 ans, la révolution dans l’élevage du bétail grâce à la marche triomphale de l’insémination artificielle qui a débuté il y a environ 30 ans et l’écologisation il y a bientôt 20 ans. C’est pourquoi le directeur du Plantahof Peter Küchler est confiant qu’on arrivera à maîtriser les nouveaux défis à l’aide de stratégies innovatrices pour résoudre les problèmes – pour l’exprimer en visionnaire: «Dans 15 ans, chaque exploitation dans le canton des Grisons aura une conception claire qui lui indiquera la voie vers l’avenir.»    •

(Traduction Horizons et débats)

Le cœur, la main et la raison
hh. Contrairement à la tendance actuelle des formations trop intellectuelles, celle de l’agriculture est une formation équilibrée qui provoque encore des callosités aux mains. Les apprentis venant des cantons des Grisons et de Glaris suivent leur formation de base à l’école professionnelle d’agriculture. Celui qui apprend l’agriculture comme second métier est dispensé des cours de culture générale. On a suivi la pensée de Pestalozzi en introduisant une classe avec attestation professionnelle. On y offre à des jeunes ayant des difficultés scolaires mais doués au niveau pratique – qui auparavant échouaient – une alternative à l’apprentissage agricole ordinaire. Après deux ans passés au sein d’une exploitation, ils terminent leur formation par un examen final. Un tel «agriculteur avec attestation professionnelle» est également autorisé à toucher des paiements directs. Un bel exemple d’encouragement sensé!