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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°18, 5 mai 2008  >  Augmentation du prix des produits alimentaires – que fait la DDC? [Imprimer]

Augmentation du prix des produits alimentaires – que fait la DDC?

Direction du développement et de la coopération, Suisse

L’augmentation des prix des produits alimentaires de base compromet la sécurité alimentaire et menace la paix sociale dans le monde entier. Des troubles sont survenus dans plus de quarante pays. La Direction du développement et de la coopération (DDC) du Département fédéral des Affaires étrangères apporte sa contribution à l’apaisement de la situation en prenant des mesures immédiates et en lançant des programmes à long terme dans le secteur de l’agriculture. Dans l’immédiat, des moyens financiers supplémentaires et des experts seront mis à la disposition du Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies. L’engagement à long terme de la DDC comprend l’encouragement de l’agriculture et de la recherche agricole dans les pays en développement ainsi que l’engagement en faveur de négociations commerciales prenant en considération les besoins des pays en développement.
La spéculation sur les marchés boursiers des matières premières a fortement accéléré les hausses de prix. Toutefois, les motifs en sont beaucoup plus profonds: l’élaboration de carburants à partir de produits alimentaires (biocarburants), la croissance de la consommation de produits alimentaires, en particulier de la viande, de mauvaises récoltes, l’arrêt des exportations de produits alimentaires et les prix élevés du mazout et du diesel sont des facteurs importants de l’augmentation des prix. La superposition de problèmes temporaires et structurels a entraîné de considérables augmentations des prix sur les marchés des produits alimentaires. En sa qualité de centre de compétences de la Confédération pour la coopération internationale et la lutte contre la pauvreté, la DDC est appelée à apporter sa contribution pour remédier à cette crise. Elle le fait au moyen d’un ensemble de mesures à court terme et par son engagement à long terme dans les pays en développement dans le domaine de la production alimentaire, de la recherche agraire et par le dialogue politique. Concrètement, la DDC agit aux plans suivants:

Aide humanitaire

La considérable augmentation des prix, en particulier du riz, du maïs et du blé, a pour conséquence que le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies n’est plus en mesure d’approvisionner les près de 4,5 millions de réfugiés et les 27 millions de personnes déplacées de l’intérieur avec les moyens de son budget de 2,9 milliards de dollars prévus pour 2008. Chaque année, la DDC fournit une aide alimentaire au PAM et à de nombreuses ONG à concurrence de 45,5 millions de francs. Mesure immédiate: l’aide humanitaire de la Confédération va verser au PAM les 6,8 millions de francs prévus. En outre, deux millions supplémentaires lui seront également versés et d’autres experts seront aussi mis à sa disposition dans les domaines de la gestion, de la logistique et des transports. D’autres mesures à court terme sont en cours d’examen.

Investissements supplémentaires dans l’agriculture durable, en particulier dans les pays en développement les plus pauvres

Chaque année, la DDC investit environ 150  millions de francs dans l’agriculture des pays en développement. Ces moyens revêtent une importance d’autant plus grande que d’autres donateurs ont réduit leurs engagements dans l’agriculture au cours des vingt dernières années. La Suisse met à profit sa forte position dans l’agriculture pour rechercher des partenariats avec d’autres donateurs et pour encourager les efforts qu’accomplissent eux-mêmes les pays en développement. Les petites exploitations agricoles, souvent conduites par des femmes, offrent le plus grand potentiel de réduction à moyen terme de la pauvreté et de la faim dans les zones rurales, et pour apporter une contribution à l’approvisionnement alimentaire des villes.
 Des effets de catalyse résultent en particulier des investissements dans le système international de recherche agraire, le CGIAR (Consultative Group on International Agriculture Research) auquel la DDC apporte chaque année son soutien à hauteur de 12 millions de francs. Chaque franc investi dans le CGIAR rapporte neuf francs aux couches les plus défavorisées de la population. Les systèmes nationaux généralement  faibles de recherche et de conseil dans les pays en développement tirent parti du CGIAR et d’autres institutions apparentées pour apporter un soutien technique et pour protéger la diversité des espèces végétales.

Politiques nationales de sécurité alimentaire dans les pays en développement et dans les pays émergents

La DDC apporte son soutien aux pays en développement par la formulation de politiques nationales de nature à protéger le droit à l’alimentation de l’ensemble de la population. Ces politiques varient de pays à pays, mais elles comprennent toutes des investissements appropriés dans la recherche et le conseil agraire, pour des stratégies de stockage, pour la promotion des marchés locaux et régionaux, ainsi que pour des mesures de soutien social aux couches les plus pauvres de la population. La promotion des possibilités de revenus dans et en dehors de l’agriculture est au centre de cette action. Il s’agit aussi de planifier des infrastructures, dans la perspective également de la sécurité alimentaire de la population. Des prix stables des produits alimentaires, mais aussi lucratifs, sont des incitations positives pour la croissance durable de la production des petites exploitations et en faveur d’investissements du secteur public dans l’agriculture. Il en résulte aussi, en particulier sur les marchés régionaux, de nouvelles possibilités de revenus pour les plus petits des pays en développement.
Une trop forte dépendance des importations de produits alimentaires recèle des risques pour la sécurité alimentaire nationale. Les pays en développement doivent avoir le droit de décider eux même de leur taux d’autosuffisance et de protéger les produits agricoles sensibles. De nombreux pays s’en sont excessivement remis au marché international pour acheter des produits agricoles bon marché, notamment aussi parce que ces prix ont été maintenus artificiellement bas par les pays industrialisés.

Relations commerciales internationales et mesures prises par la Suisse

La réglementation des relations commerci­ales internationales doit être renégociée. La DDC s’engage en faveur de la reprise le plus tôt possible des négociations de Doha, actuellement en situation de blocage, afin de tenir tout particulièrement compte des intérêts des pays en développement les plus pauvres.
 L’importation de carburants tirés de produits de l’agriculture ne doit pas être subventionnée par le biais d’exonérations fiscales. Il peut toutefois être opportun pour certains pays d’encourager la production de carburants tirés de produits de l’agriculture.    •

La politique agricole doit miser davantage sur l’agriculture paysanne

Le délégué du Parlement européen Graefe zu Baringdorf* mise sur l’agriculture écologique

L’intensification de l’agriculture a été accompagnée de nombreux problèmes sur le plan mondial, mais également en Europe. L’agriculture paysanne a été fortement refoulée puisque la baisse continuelle des prix, dans le passé, a conduit à la diminution des chances de ce mode écologique, surtout dans les pays du Tiers-Monde. Et cela se manifeste maintenant durement. Nombreux sont ceux qui ont été séparés de leurs terres, et la hausse des prix les touche pour la deuxième fois de manière très forte. […]
Ce que nous sommes en train de vivre actuellement, a à voir avec la politique erronée de ces dernières années et décennies, parce que le dumping pratiqué dans l’exportation a fait baisser les prix dans les pays du Tiers-Monde de sorte que ni l’agriculture ni la petite agriculture ni l’économie de subsistance n’avaient plus aucune chance. Des marchés régionaux ont été détruits. Et maintenant , en ce moment où tout va en sens inverse, le fondement du marketing autonome régional, de la subsistance, des semences adaptées aux régions: tout manque!
On a essayé d’offrir des semences génétiquement modifiées à ces pays. Tout cela nous a induits en erreur, selon les propositions des 400 scientifiques travaillant à la charge de l’ONU et de la Banque mondiale. Il faut retourner à l’agriculture paysanne et écologique, aussi difficile cela soit-il pour nous, et là où elle existe encore, il faut la stabiliser. Nous ne serions pas en mesure de nourrir le monde depuis ici.
Dans l‘agriculture paysanne et écologique, nous avons, avec les quantités qui en résultent, en matière de récoltes, des rendements moins grands. Nous avons cependant, grâce à un input moins important, en ce qui concerne le pétrole en particulier, un plus grand rendement quant au bilan énergétique et moins de dégâts environnementaux. Pour produire une tonne d’azote il faut deux tonnes de pétrole. Cela veut dire que, si vous avez sur le papier un grand rendement et que vous ne faites pas le bilan, la production industrielle semble rapporter davantage. Celle-ci ne constitue pourtant pas une partie de la solution, mais fait partie du problème.     •
*    Friedrich-Wilhelm Graefe zu Baringdorf est vice-président de la Commission de l’agriculture et du développement rural du Parlement européen.

Source: Deutschlandfunk du 23/04/08