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Horizons et debats  >  archives  >  2013  >  N°35/36, 25 novembre 2013  >  Encore un expert international qui appelle le TDAH une invention [Imprimer]

Encore un expert international qui appelle le TDAH une invention

par Moritz Nestor

Au printemps 2012, le Spiegel a cité l’inventeur du diagnostic TDAH qui soulignait que celui-ci n’était pas un diagnostic, mais une invention. (cf. encadré p. III ainsi que Horizons et débats no 8 du 27/2/12). Dans le Spiegel du 30/7/12, le psychologue du développement renommé Jerome Kagan (83 ans) était encore plus clair:1 selon le Spiegel, Kagan n’est pas n’importe qui: «Sur une liste des 100 psychologues les plus importants du XXe siècle […] ce psychologue de 83 ans figure sur la place 22 – encore avant Carl Gustav Jung […] et Ivan Pavlov.»2
Spiegel: «Des experts disent que 5,4 millions d’enfants américains montrent les symptômes typiques du TDAH. Et vous voulez dire que cette maladie psychique serait juste une invention?»
Kagan: «C’est correct, il s’agit d’une invention. Chaque enfant, qui ne réussit pas à l’école aujourd’hui, est envoyé chez le pédiatre qui lui dit: c’est le TDAH, et voilà la Ritaline. Pourtant, 90% de ces 5,4 millions d’enfants n’ont pas du tout leur métabolisme de la dopamine perturbé. Le problème est le suivant: si les médecins disposent d’un médicament, ils font aussi le diagnostic correspondant.»
Dans les années 60, les troubles psychiques chez les enfants n’étaient à peine connus. En Allemagne, entre 2000 et 2010, le nombre de traitements d’enfants et d’adolescents en psychiatrie et en psychothérapie a augmenté de 29 949 à 43 498, une hausse de 45%! En même temps, les doses quotidiennes prescrites de Ritaline/Concerta ont augmenté de 11 à 56 millions en Allemagne. Cela est dû à la «pratique floue du diagnostic», affirme Kagan: «En faisant des interviews avec des enfants et des adolescents de 12 à 19 ans, il y en aura jusqu’à 40% qui se sentent angoissés ou dépressifs. Mais en regardant de plus près et en leur demandant à quel point ils sont sérieusement concernés dans leur vie quotidienne, le nombre baisse à 8%. C’est ridicule de désigner chaque enfant qui a l’air abattu ou angoissé comme étant psychiquement malade. Quand j’avais cinq ans, j’ai commencé à bégayer. Ma mère m’a dit: ‹Ce n’est pas si grave, ton esprit travaille plus vite que ta langue.› Et moi, je me suis dit: ‹Génial, je bégaie seulement, parce que je suis drôlement intelligent.›»
Pour Kagan, l’importance politique de ce diagnostic est claire: «Cela signifie avant tout davantage d’argent pour l’industrie pharmaceutique ainsi que pour les psychiatres et les chercheurs.» Et pour les enfants concernés, c’est «un signal que quelque chose ne va pas bien chez eux – et cela peut avoir des effets paralysants. Je ne suis pas le seul psychologue à avancer ces arguments. Mais nous nous voyons confrontés à une alliance puissante: les multinationales pharmaceutiques, qui font des affaires de plusieurs milliards, et un corps de métier qui poursuit ses propres intérêts.»
La leçon la plus importante qu’il en tire: «Il est important de ne pas considérer uniquement les symptômes, mais aussi les causes.» A cela, il n’y a rien à ajouter. Au travail.    •

1    «Nachhilfe statt Pille». In: Spiegel 31/2012, p. 94sqq.
2    cf. aussi: Haggbloom, S. J. et al. (2002). «The 100 Most Eminent Psychologists of the 20th Century»