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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  Nº32, 6 août 2012  >  La constitution économique de la Suisse – une troisième voie? (1ère partie) [Imprimer]

La constitution économique de la Suisse – une troisième voie? (1ère partie)

par Werner Wüthrich

hd. C’est à cause de la crise financière actuelle que ce n’est pas seulement le système monétaire, mais aussi le système économique qui doit être réexaminé.
Dans plusieurs pays, des interventions sont déposées, exigeant de nouvelles bases pour l’économie. En Suisse, Willy Cretegny et un groupe de vignerons ont déposé, il y a peu, une initiative populaire intitulée «Pour une économie utile à tous» (cf. Horizons et débats no 26 du 25 juin 2012). Elle demande aux citoyens de réfléchir mûrement à la question de l’ordre économique suisse, sur la toile de fonds des expériences faites avec la mondialisation, et d’en discuter. L’article suivant décrira les lignes de la tradition sur laquelle l’initiative se fonde. La deuxième partie de l’article paraîtra dans un des prochains numéros d’Horizons et débats.

Bien des observateurs se demandent pourquoi le «modèle suisse» libéral s’est révélé plutôt couronné de succès lors de la crise. Il y a quelques semaines, une thèse juridique a paru à l’Université de Bâle, intitulée «Grundsatz der Wirtschaftsfreiheit» (Principe de la liberté économique) (Saint-Gall/Zurich 2011) de Johannes Reich – aujourd’hui maître de conférence en droit public et d’administration à l’Université de Zurich. Il n’a pas seulement examiné le principe de la liberté économique du point de vue juridique, mais il a aussi démontré comment ce principe s’est formé comme cadre réglementaire après la fondation de l’Etat fédéral en 1848 et comment il s’est développé jusqu’à nos jours. Dans son investigation scientifique, Reich prend en compte de nombreux facteurs politiques, économiques et sociaux dans leur développement historique. C’est ce qui rend cette œuvre de 500 pages si précieuse. Par la suite, les idées fondamentales – en relation avec d’autres auteurs – seront relatées aussi pour des lecteurs non habitués aux expressions juridiques.

Ordre de corporations et coopératives ressemblant aux corporations

21 cantons autonomes se sont réunis en 1848 dans un Etat fédéral. Ainsi, des régions économiquement très différentes ont été rassemblées en une unité politique. Du point de vue économique il s’agissait en premier lieu de simplifier le transport des marchandises et l’échange de services en franchissant les frontières cantonales. Fixer un cadre réglementaire, valable pour l’économie du pays entier, n’était pas du tout possible.
L’économie de la Suisse avant 1848 a été marquée dans beaucoup de régions citadines par le système des corporations. Les corporations sont des associations d’artisans et de commerçants, organisées en coopératives, mentionnées pour la première fois à Bâle en 1226. Le besoin d’un revenu adapté était primordial – et non pas un maximum de bénéfices. Les salaires, les prix et les quantités de production régularisés servaient à cet objectif. Ce qui caractérise également les cor­porations ce sont les standards de qualité très élevés et la formation soigneuse des apprentis. Les corporations n’étaient cependant pas uniquement des associations économiques, mais aussi des associations solidaires dans un espace restreint. Leurs statuts n’étaient pas axés sur la maximalisation des bénéfices mais sur l’assurance de la subsistance en s’entraidant, y inclus le soutien des membres de la famille. Zurich, Schaffhouse, Bâle et Saint-Gall étaient des villes corporatives typiques. La soi-disant contrainte à la corporation faisait partie du système de corporations et était exigée par les autorités des villes. Uniquement les membres des corporations étaient autorisés à exercer un métier.
Dans les cantons de montagnes, les muletiers se sont rassemblés depuis des générations en des coopératives ressemblant aux corporations, transportant des biens et des personnes à travers les Alpes. Ces coopératives avaient leurs racines au XIIIe siècle, lorsque les Confédérés se sont battus pour leurs droits contre les Habsbourg.

Facteurs d’un développement économique profitable en Suisse

Manufactures, travail industriel à domicile et commerce peuvent être observés déjà au Moyen Age – avant tout pour la fabrication de montres et de textiles. Les matières premières (à l’époque du coton, de la soie et des métaux) ont été importées et les produits finis de grande qualité ont été pour la plus grande partie exportés. (Aujourd’hui encore, presque la moitié des produits et des services sont réexportés.) Au Moyen Age, les droits de douane étaient pour la plupart de pures sources financières réclamées aux voyageurs sur l’importation et l’exportation. Le commerçant payait les droits de douane à son passage. Peu importait que les douanes se trouvassent aux frontières du pays ou à l’intérieur. Cela a changé avec l’avènement des Etats nations. Le ministre français de l’Economie, Colbert, a développé au XVIIe siècle le système du mercantilisme. Avec un système ingénieux de direction de l’économie, il voulait développer le bien-être du peuple, c’est-à-dire financer le déploiement du pouvoir de la noblesse. Les manufactures indigènes étaient subventionnées par l’Etat et protégées contre la concurrence étrangère avec des droits de douane protectionnistes aux frontières. Les conditions n’étaient cependant pas partout les mêmes. Avant tout les grands Etats centralistes tels que la France et l’Angleterre étaient capables de diriger leur économie de cette façon. Ainsi Alfred Bosshardt a écrit dans le livre «Die Schweiz als Kleinstaat in der Weltwirtschaft» («La Suisse comme petit Etat dans l’économie mondiale», édité par un groupe de professeurs de l’université de Saint-Gall en 1941): «Les petits Etats d’Europe étaient bien moins pris par le mercantilisme, et le moins certainement la Suisse. Tous les historiens sont unanimes sur ce point que la Suisse n’a qu’à peine été touchée par l’esprit mercantiliste. La structure fédérative de l’Etat suisse, le manque d’un pouvoir politique central et finalement le chiisme religieux du début du XVIe siècle, ont empêché pendant trois siècles toute coordination serrée des forces politiques et économiques dans notre pays. […] La seule chose que la Fédération des Etats suisses pouvait offrir aux entrepreneurs était la liberté économique. […] La concurrence incessante a forcé les fabricants à développer leurs meilleures qualités commerciales et techniques, les a obligés à rechercher toujours de nouveaux marchés et à créer toujours de nouveaux produits.
Il y a eu d’autres facteurs qui à l’époque ont marqué le développement économique de la Suisse:
–    La politique de neutralité s’est avérée comme avantage économique parce que le pays a été épargné des guerres et a pu faire l’économie d’une politique impériale. Cela a eu des conséquences directes sur les impôts. En 1845 – juste avant la fondation de l’Etat fédéral – la charge d’impôts à Zurich était 14 fois moins élevée qu’à Londres et 6 fois moins élevée qu’à Paris.
–    Depuis le XVIe siècle, beaucoup de réfugiés protestants ont fui les guerres de religion, avant tout en France et en Italie, et sont venus en Suisse. Bosshardt écrit: «Un potentiel énorme d’expériences commerciales et artisanales, d’intelligence technique ainsi que de force morale fut ainsi introduit vers la Suisse.»
William E. Rappard, un autre auteur du groupe de professeurs de l’Université de Saint-Gall, a désigné la Suisse entre 1500 et 1800 comme la région la plus riche en industrie de l’Europe, luttant contre la politique mercantiliste des grandes puissances. On a réussi par exemple à conclure avec la France des accords de libre-échange à long terme, dans lesquels la Suisse avait offert en contrepartie des frontières ouvertes à «l’exportation» de mercenaires. Lorsque les barrières de droits de douane devenaient trop élevées pour la Suisse, le marché d’outre-mer devint pour l’industrie suisse la dernière planche de salut. «Les indiennes aux couleurs somptueuses et les mouchoirs des manufactures de tissage à la main du Toggenbourg, et les fameux Sarongs et Batiks de l’imprimerie du coton glaronnaise ont trouvé leur chemin, passant par la Turquie vers la Perse et les Indes, vers les îles malayennes et les Philippines et le Japon ainsi qu’à l’intérieur de l’Afrique.»

La lutte pour une Constitution économique

Revenons à la thèse de Johannes Reich: Dans la Constitution fédérale de 1848, un cadre réglementaire comprenant toute la Suisse n’existait qu’en grandes lignes. L’échange de biens entre les 21 cantons devait être facilité et d’éventuels obstacles éliminés. Le premier règlement des droits de douane pour toute la Suisse sur la base de la Constitution fédérale de 1848 n’était que purement fiscal. Il donna à l’Etat fédéral, qui à l’époque ne percevait pas d’impôts, les moyens financiers pour pouvoir fonctionner. Il n’y avait que peu de voix dans les cantons à demander, d’après l’exemple de l’étranger, des taxes à l’importation protégeant l’économie intérieure. Les années suivantes, il s’agissait de créer dans toutes les parties du pays, par-dessus les frontières cantonales, une sorte de «marché intérieur» (pour utiliser un terme courant de nos jours).
Il fut vite clair, que l’ordre corporatif fermé des grandes villes n’aurait plus de place dans un espace économique commun. Beaucoup d’acquis du système corporatif ont cependant pu être maintenus – comme par exemple la formation professionnelle soigneuse – mais pas l’obligation d’adhérer aux corporations. La bourgeoisie n’avait pas trop de difficultés à suivre de nouvelles voies. Elle a pu constater que l’industrialisation pouvait mieux se développer dans les régions rurales sans le règlement des corporations. Nous trouvons donc bien des monuments industriels – surtout des usines textiles – de cette époque dans les régions rurales. Un prolétariat comme il s’était formé par exemple en Angleterre autour de grandes villes telles que Manchester n’existait guère. Les ouvriers des usines à la campagne avaient souvent à côté de leur travail une petite ferme à exploiter et étaient prêts à accepter de longs trajets pour arriver à leur travail.
Pour les cantons de montagne, il n’était pas non plus facile de s’adapter à cet espace économique commun. Des coopératives ressemblant à des corporations ont organisé le trafic des biens et des personnes à travers les cols alpins. Ces sociétés de transport avaient – comme déjà mentionné ci-dessus – leurs racines au XIIIe siècle, lorsque les Confédérés ont commencé à se battre pour leurs droits et leur liberté. Après 1848 sont arrivées beaucoup de plaintes et des recours contre la politique du nouvel Etat fédéral, qui visait l’installation d’un marché intérieur pour toute la Suisse. Le Conseil fédéral et le parlement ont pris ces recours très au sérieux et ont consacré beaucoup de temps à résoudre les conflits à l’amiable.
Un exemple: Un règlement du canton d’Uri régla le transport de biens et de voyageurs à travers les cols alpins. Il fixa les taxes de port et de transport et stipula qu’un ménage ne devait pas posséder plus de six chevaux. La société de transport était ouverte à chaque habitant du district de Urseren sous réserve qu’il était citoyen suisse. Ainsi les muletiers de Urseren avaient le monopole du transport de la route du Gothard.
C’est alors qu’une commission du Conseil des Etats a dû examiner ce règlement. Les parlementaires ont trouvé que des tarifs communs seraient admissibles, mais sans la clause qu’uniquement les habitants du district d’Urseren pouvaient devenir coopérateurs. La commission a souligné que les coopératives ressemblant à une corporation avaient méritoirement maintenu pendant des siècles les routes à travers les Alpes, mais que désormais, le canton serait responsable et le monopole ne serait plus justifiable. Dans ce sens-là, les cantons montagnards ont changé ou supprimé une multitude de règlements. Au cours de ces débats s’est développé peu à peu le principe de la «liberté économique», qui est entré dans la Constitution fédérale de 1874 comme «Principe de la liberté économique». Des tarifs communs et aussi des statuts de coopératives seraient admissibles, ils ne devraient cependant pas protéger les métiers de la concurrence, comme l’avaient fait auparavant les corporations dans les villes et les coopératives ressemblant à une corporation dans les cantons de montagne.
Dans le droit des coopératives, le principe de la «porte ouverte» est toujours valable aujourd’hui. Une coopérative peut en tout temps recevoir de nouveaux membres. Les statuts peuvent, sous réserve de ce qui est prescrit quant au nombre variable des associés, régler les conditions particulières de l’admission; ces conditions ne doivent pas rendre l’entrée onéreuse à l’excès (CO 839).
L’industrie orientée vers l’exportation et ses représentants ont plaidé pour le maintien du libre-échange tel qu’ils l’avaient connu depuis des siècles.

Haut niveau de la démocratie directe déjà au XIXe siècle

Les efforts politiques dans les années après 1848 étaient guidés par l’objectif de donner un cadre règlementaire commun à l’économie de l’Etat fédéral fraîchement créé. En 1866, on a voté pour la première fois des points controversés sur le plan fédéral. Les citoyens ont voté neuf projets de loi, dont la plupart concernaient directement ou indirectement des questions économiques – telles que par exemple le règlement de la propriété intellectuelle, les droits des étrangers établis, l’imposition, les mesures et les poids et autres. Les citoyens ont refusé 8 projets, ce qui a amené le Parlement à revoir le tout. En 1872, une nouvelle Constitution totalement révisée et pleine d’innovations a été soumise au vote, elle a été refusée (parce que les citoyens l’ont trouvée trop centraliste). De nouveau, le Parlement a entrepris des corrections. En 1874, le peuple a adopté la nouvelle Constitution avec plus de 60% des voix. Elle contenait toujours beaucoup d’innovations – par exemple le droit de l’initiative populaire et du référendum. Les citoyens pouvaient, avec 30 000 signatures (Art. 89), demander une votation sur une loi fédérale votée par le Parlement (référendum facultatif). Ou bien avec 50 000 signatures, ils pouvaient demander une révision de la Constitution qui devait également être votée (initiative populaire, Art. 120). Ces innovations étendues n’étaient possibles que parce que la population dans les communes et les cantons avait appris et exercé la démocratie directe depuis longtemps. – Il faut se rendre compte, que la population suisse (et pas seulement une élite instruite!) était estimée, au XIXe siècle déjà, capable de décider des questions complexes de l’économie et de statuer sur une révision totale de la Constitution fédérale!

Constitution économique de 1874

La nouvelle Constitution de 1874 a donné à l’économie un règlement-cadre commun, qui peut être qualifiée de «Constitution économique», pour utiliser une désignation moderne. Ce cadre sera répété ici dans son texte intégral:

Art. 31. La liberté du commerce et d’industrie est garantie dans toute la Confédération.
Sous réserves:
a.    La régale du sel et de la poudre de guerre, les péages fédéraux, les droits d’entrée sur le vin et les autres boissons spiritueuses, ainsi que les autres droits de consommation formellement reconnus par la Confédération, à teneur de l’article 32;
b.    Les mesures de police sanitaire contre les épidémies et les épizooties;
c.    Les dispositions touchant l’exercice des professions commerciales et industrielles, les impôts qui s’y rattachent et la police des routes.
Ces dispositions ne peuvent rien renfermer de contraire au principe de la liberté de commerce et d’industrie.

Explications

Ces quelques lignes contiennent le noyau de la Constitution économique suisse – jusqu’aujourd’hui. La Constitution actuelle est formulée de façon plus moderne et plus détaillée. Sa teneur cependant est restée la même. Ces lignes sont si denses, qu’elles doivent être expliquées:
Johannes Reich l’explique ainsi: La liberté de commerce et d’industrie – aujourd’hui liberté économique – est en Suisse un droit fondamental de tout citoyen, garanti par la Constitution – comme par exemple la liberté de réunion et d’établissement. Chaque droit de liberté trouve ses limites dans les intérêts de la communauté. La sécurité ou la santé publique, ou bien aussi les affaires de politique sociales, posent des limites. Ainsi, l’article 34 de la Constitution de 1874 décrète expressément: «La Confédération a le droit de statuer des prescriptions uniformes sur le travail des enfants dans les fabriques, sur la durée du travail […], ainsi que sur la protection à accorder aux ouvriers contre l’exercice des industries insalubres et dangereuses.» Cela est arrivé quelques années plus tard dans une loi fédérale sur les usines – une loi très progressiste à l’époque – et plus tard dans la loi sur le travail.
Un autre exemple: La Constitution de 1874 a interdit l’exploitation de maisons de jeux, pour protéger les familles de la ruine. Cette interdiction a été allégée en 1928 et en 1958 lors de deux autres votations. La mise était limitée à 10 francs suisses. Les citoyens ont annulé cette interdiction dans une autre votation il y a quelques années, parce qu’elle n’est plus au goût du jour. Il faut cependant faire la remarque qu’il aurait peut-être mieux valu élargir l’interdiction des maisons de jeux aux banques qui jouent avec l’argent de façon imprudente.

Principe de la liberté économique

L’article 31 de la Constitution fédérale de l’époque stipule que le droit du citoyen à la liberté de commerce et d’industrie (aujourd’hui liberté économique) peut être restreinte. Ces restrictions ne doivent pourtant pas porter préjudice au principe de la liberté économique. Qu’est-ce que cela veut dire?
Citons un autre exemple du travail de Johannes Reich: Dans la lutte contre l’alcoolisme, les cantons, déjà à l’époque, ont restreint le commerce des boissons alcooliques – comme ils le font encore aujourd’hui. De nombreuses communes ont fait à l’époque un pas de plus et ont restreint le nombre de bistrots dans l’enceinte de leur commune. L’écrivain Jeremias Gotthelf (1797–1854) a décrit dans ses romans les dangers émanant des bistrots de façon impressionnante. Une commune enfreindrait cependant le principe de la liberté économique si elle avait l’intention de protéger les patrons de restaurants de la concurrence. Seulement, peut-on constater cela sans équivoque? Une commission du Conseil des Etats a considéré de telles questions comme «extrêmement délicates et difficiles à résoudre». En 1874, le Conseil fédéral a envoyé par conséquent une circulaire à tous les gouvernements de cantons avec le contenu suivant: La détermination du nombre maximum de restaurants violerait le principe de la liberté économique et les cantons devraient combattre l’alcoolisme avant tout au moyen d’impôts. Mais avec cela tout n’était pas dit.
La Société d’utilité publique suisse et aussi des organisations des églises n’ont pas été d’accord avec le Conseil fédéral et ont récolté 50 000 signatures pour une initiative populaire visant à donner dans la Constitution le droit aux communes de restreindre le nombre de restaurants sur leur territoire. – En 1885, elle a été votée et les initiants ont obtenu gain de cause.
Les citoyens ont le dernier mot, aussi lorsqu’il s’agit de fixer le règlement-cadre de l’économie – dans notre exemple pour les restaurants. L’exemple ci-dessus montre que le principe de la liberté économique n’est pas absolu. Des divergences sont possibles, si elles sont prévues dans la Constitution.    •

«RBC-Daily»: Des billions de dollars sur les comptes offshore internationaux

Le montant des fonds que maintiennent les hommes riches du monde entier sur les comptes offshore non déclarés, pourrait s’élever à 32 billions de dollars, estime James Henry, l’ancien économiste en chef du cabinet McKinsey & Co. Depuis le début des privatisations en 1990, environ 800 milliards de dollars ont afflué de Russie, selon le journal économique «RBC Daily», qui a cité l’analyse d’Henry, lundi dernier. Seulement de Chine, il y a encore plus d’argent qui a afflué, soit 1,2 billions de dollars, mais cela au cours de 40 ans.
«Comme l’a montré une analyse des données collectées auprès du Fonds monétaire international, des banques de règlements internationaux et des banques centrales nationales, le volume des actifs financiers dissimulés sur des comptes non déclarés s’élève à au moins 21 billions et au maximum 32 billions de dollars», écrit le journal. «Henry taxe sa propre estimation de conservatrice, car elle ne tient compte que des actifs financiers, sans immobiliers, yachts et objets d’art.»
«Dans cette étude, on a analysé 129 Etats parmi les pays à revenu moyen et à revenu moyen inférieur, représentant 85% de la population mondiale, 51% du PIB mondial, 75% des réserves en or et en devises et 4,1 billions de dollars de dettes extérieures. […] Selon James Henry, 798 milliards de dollars ont été transférés de Russie. ‹On a tenté d’analyser le plus loin possible dans le passé, mais les institutions internationales nous ont seulement offert l’espace depuis 1990›, a dit James Henry dans une interview accordée au journal. Globalement, la Chine est en tête de la liste avec 1189 milliards de dollars, mais les fonds ont été retirés du pays au cours de 40 ans. A la troisième place se trouve la Corée du Sud avec 779 milliards de dollars, suivie par le Brésil avec 520 milliards, le Koweït avec 496 milliards de dollars, le Mexique (417), le Venezuela (406) et l’Argentine (399).»
«En ce qui concerne la Russie, selon Henry, une grande partie des fonds retirés de la Russie, a été gagnée à la suite de la privatisation des actifs de l’Etat dans les années 1990. En partie, ces fonds des comptes offshore reviennent en Russie sous forme d’investissements, mais officiellement ils sont enregistrés comme ‹investissements étrangers›.»
«Ces capitaux mondiaux dissimulés appartiennent à moins de 10 millions de personnes», ajoute Henry. Les banques privées jouent un rôle actif dans cette fraude fiscale (dans le rapport elles sont appelées «banques pirates»).

Source: de.rian.ru/business/20120723/264040483.html
(Traduction Horizons et débats)

«Cette fois, c’est différent»
hk. Lors de chaque crise économique, on a fait croire au peuple qu’il n’y avait aucune raison de s’inquiéter, et qu’il fallait seulement laisser faire les experts financiers. Dans ce contexte, les deux auteurs ont intitulé leurs réflexions sur les crises économiques et financières dans des siècles différents: «Cette fois, c’est différent». Actuellement, on entend aussi ce slogan qui est encore complété par la formule: «There is no alternative». Le peuple, qui est le souverain en démocratie, a droit à tout, sauf à la réflexion.
Les auteurs, Carmen M. Reinhart et Kenneth S. Rogoff ont récolté toutes les données accessibles de 66 pays, portant sur une période de 800 ans, menant à des crises gouvernementales ou bancaires, et qui ont eu comme conséquence une baisse constante et claire de la performance économique d’un pays.
Sur la base d’une sérieuse analyse scientifique des données, les auteurs convainquent le lecteur de la possibilité de pouvoir prévoir les crises et également de pouvoir les empêcher à temps. Leur thèse est basée sur des exemples allant jusqu’à nos jours. Les auteurs rappellent que les gouvernements et les banques, avant une nouvelle crise, répètent à l’infini: Cette fois, ce sera différent. Les auteurs ont démontré cela de manière particulièrement explicite à l’exemple de la (deuxième) crise économique mondiale actuelle.
Pour éviter de futures crises, ils proposent de créer une autorité internationale centralisée qui exige des données importantes sur le comportement par rapport à l’octroi de crédits de toutes les banques et de tous les gouvernements du monde afin de les évaluer. Cette autorité doit aussi leur prescrire les mesures à prendre pour étouffer déjà dans l’œuf une crise prévisible. Selon nous, cette autorité sape la souveraineté des Etats du monde, tout comme le MES sape celle des Etats européens. En plus, les banques ne seront pas prêtes à livrer leurs données secrètes.
Le conseiller principal des deux auteurs est Vincent Reinhart (un parent de Carmen M. Reinhart?). Il a travaillé pour la FED pendant environ 25 ans. Les auteurs puisent leurs arguments dans un point de vue inhérent au système, ils décrivent les symptômes de façon très consciencieuse et avec soin et proposent une solution pour un traitement des symptômes. Mais aucun mot sur la vraie cause de la maladie de notre système économique: Notre argent d’aujourd’hui rapporte des intérêts qui sont fixés par la FED dans son propre intérêt (elle fut créée par les familles les plus riches des USA en 1913, et influence aujourd’hui les banques centrales du monde entier.)
Les intérêts et les intérêts cumulés multiplient la fortune des plus riches à une vitesse exponentielle aux frais des citoyens créant des valeurs. Les dettes des citoyens et de leurs gouvernements par contre, diminuent à la même vitesse exponentielle. Sans tenir compte des causes de la maladie, ses symptômes sont décrits et valorisés largement et en détail. Seul cela ne peut pas, selon nous, mener vers une solution fondamentale du problème.
Nous pensons aussi qu’une autorité centralisée qui pourrait juguler les gouvernements et les banques du monde entier, serait un instrument dangereux, parce qu’il renforcerait la haute finance et restreindrait les droits des citoyens à régler leurs affaires eux-mêmes.