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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2010  >  N°40, 18 octobre 2010  >  Joseph Deiss: L’Assemblée générale de l’ONU est le forum le plus important du débat global [Imprimer]

Joseph Deiss: L’Assemblée générale de l’ONU est le forum le plus important du débat global

La 65e session de l’Assemblée générale des Nations Unies a été ouverte à New York le 14 septembre et dans ce cadre, les débats généraux auxquels ont participé environ 150 chefs d’Etats et de gouvernements et d’autres représentants des 192 Etats-membres ont eu lieu du 23 au 29 septembre.

ef. L’Assemblée générale a été ouverte par son président actuel, le Suisse Joseph Deiss. Depuis l’adhésion de la Suisse à l’ONU il y a huit ans, c’est la première fois qu’un Suisse accède à la plus haute fonction formelle de l’ONU. Il a ainsi la possibilité, en raison de sa connaissance de l’Etat suisse, de redonner du poids à l’ONU. En effet, la Suisse en tant que pays apprécié à l’ONU comme Etat ­neutre n’appartenant à aucune alliance militaire et comme intermédiaire et partenaire hon­nête dans les négociations, parce que sans agenda caché, est prédestinée à encourager le dia­logue d’égal à égal entre les Etats-membres. La démocratie directe de la Suisse et les solutions qu’elle permet de trouver aux problèmes de société, appartiennent également à l’ordre du jour, de même que la signification de la neutralité.
La Suisse peut apporter son expérience de démocratie et sa culture du dialogue et du consensus. Les institutions suisses peuvent servir d’exemple, déclarait Deiss la semaine dernière, lors de l’accueil du Grand Conseil de Fribourg, dont il avait été membre pendant de longues années. La démocratie di­recte a fait ses preuves en tant que modèle pour la paix et peut offrir une ligne directrice dans de nombreux conflits.
Deiss a présenté son discours d’ouverture à l’Assemblée générale le 14 septembre sous le thème «l’Assemblée générale: forum principal du débat global». Il a insisté sur la notion d’égalité de tous les Etats. Il a souligné que l’Assemblée générale devrait avoir plus d’importance: selon la Charte de l’ONU, elle devrait être le forum principal du débat global. Dans la conférence de presse, il déclara catégoriquement: «Tous les grands thèmes, qui concernent notre planète doivent être discutés à l’Assemblée générale.»
L’Assemblée générale est le plénum de l’organisation mondiale, dans lequel tous les 192 Etats-membres ont une voix, indépendamment de leur grandeur et de leur puis­sance. Avec sa revendication, le Suisse Joseph Deiss se joint à la demande de son prédécesseur dans cette fonction, en 2008/2009, ­Miguel D’Escoto Brockmann. Celui-ci avait exigé – devant le constat des effets dévastateurs de la crise financière mondiale, qui touchait particulièrement les pays les plus pauvres, et face à l’arrogance du G20 (non légitimé démocratiquement et s’autodésignant autorité de décision) – que tous les Etats-membres de l’ONU doivent être entendus et impliqués. Deiss y ajoute le point de vue suisse. Il a mis en garde contre le danger de vouloir construire une deuxième ONU avec ses propres instances décisionnelles à l’extérieur des Nations Unies et ainsi d’enterrer le principe d’égalité de tous les Etats.
L’ONU, selon lui, risque d’être marginalisée par des grands acteurs tels que le G20. Pour prévenir cela, il a exigé du G20, à la fin du débat général, un «échange ouvert et permanent avec l’Assemblée générale».
La présidente de la Confédération Doris Leuthard et la ministre des Affaires étran­gères Micheline Calmy-Rey ont pris part aux rencontres de haut rang dans le cadre de l’ouverture de la 65e session de l’Assemblée générale. La présidente de la Confédération Doris Leuthard a participé au débat général avec un discours dans lequel elle a souligné la légitimité unique de l’ONU en raison de son universalité pour la résolution des problèmes mondiaux. Elle a exigé la contribution de chaque Etat-membre mais aussi de chaque individu à la réalisation de l’idée de l’ONU.
Nous publions ci-dessous des extraits issus des deux discours du président de l’Assemblée générale, Joseph Deiss, et de la prési­dente de la Confédération Doris Leuthard devant l’Assemblée générale.    •

La Charte de l’ONU doit rester notre guide ultime

«[...] Aujourd’hui, toutes les populations touchées par la pauvreté, menacées par la ­guerre, par le réchauffement climatique ou par les catastrophes naturelles, toutes et tous sont en droit d’attendre de nous que nos délibérations et nos actions viennent soulager leur souffrance et leur peine.
Nous tous qui constituons cette Assemblée générale avons à notre disposition un instrument important pour affronter les grandes questions d’aujourd’hui. J’en suis persuadé.
En effet, nous dit la Charte, l’Assemblée générale est le lieu prééminent du débat global. Elle doit être le lieu de convergence des forces et des institutions appelées à mettre en place et à assumer la gouvernance mondiale. Il n’y a pas de sujet qui touche à ­l’homme et à notre planète qui puisse être étranger à nos débats.
Pourtant, trop souvent prévaut dans l’opinion publique, l’image d’une Organisation des Nations Unies dont l’Assemblée générale est impuissante, simple moulin à paroles, ‹talk shop›, sans retombées concrètes. Je souhaite que la 65e session qui s’ouvre montre que nous pouvons faire une différence.
Je souhaite que cette session soit à la hauteur des grandes attentes placées en nous. Nous avons une obligation de résultats. Les questions dont nous avons à débattre sont trop graves pour que ceci ne soit pas notre motivation première, qui nous pousse à aller au-delà de nos intérêts purement nationaux et à œuvrer véritablement pour le bien-être commun. [...]
La charte doit rester notre guide ultime
La paix et la sécurité sont notre vocation première et les chantiers restent nombreux. Je pense à tous les conflits qui ravagent encore et toujours notre monde et poussent des centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants dans la détresse et la souffrance.
C’est la coopération internationale et l’amitié entre les peuples qui nous permettront de progresser dans le domaine des droits de l’homme, du développement, de l’aide humanitaire, du désarmement, et de la lutte ­contre le terrorisme.
C’est la coopération internationale et l’amitié entre les peuples qui nous permettront de progresser dans le domaine de la santé, et dans celui de l’environnement.
Ce sont ces valeurs qui nous permettront de fonder un véritable partenariat mondial et d’avancer dans tous les domaines essentiels pour la paix et la sécurité.

Excellences, Mesdames et Messieurs,
Ma vision est celle d’une Assemblée géné­rale forte, qui soit le forum principal du débat global. Mais cela demande que nous sachions nous écouter, les uns les autres. Je vous assure de ma disponibilité pour que nous puissions agir en bonne harmonie. Ma porte est ou­verte. Je vous offre mon leadership pour pouvoir avancer mais surtout, je vous ­exhorte à surmonter nos égoïsmes et nos rivalités pour le bien de l’humanité.

Extraits du discours prononcé par le président Joseph Deiss lors de l’ouverture de la 65e Assemblée générale de l’ONU du 14/9/ 2010


Pour une revitalisation de l’Assemblée générale de l’ONU

Nous croyons en la valeur de l’ONU. De nombreux dirigeants l’ont dit: l’ONU est la pièce centrale dans le système de gouvernance globale. L’ONU est universelle et jouit d’une légitimité unique. […]
Si nous sommes d’accord sur l’importance de l’instrument que constitue l’ONU, est-ce que nous l’utilisons au mieux? Faisons-nous ce qu’il faut pour que nous puissions l’utiliser au mieux?
Sommes-nous prêts à renforcer l’ONU aujourd’hui? Ne sommes-nous pas en train de recomposer l’ONU à l’extérieur de l’ONU en multipliant les forums de discussion et les instances de décision? Ne devrions-nous pas plutôt agir de manière résolue, pour adapter rapidement l’ONU aux réalités actuelles?
Des réformes impératives sont en cours, je pense notamment à la revitalisation de l’Assemblée générale, à la réforme du Conseil de sécurité, mais aussi à la revue du Conseil des droits de l’homme et à la revue de la Commission de consolidation de la paix, faisons-les avancer! Nous devons aussi revaloriser les organisations économiques de l’ONU et leur permettre de jouer pleinement le rôle pour lequel elles ont été créées.
C’est en définitive à vous, les Etats membres, de faire de l’ONU l’instrument fort qui puisse jouer un rôle central pour affronter ces défis globaux et œuvrer pour le bien commun.

Extrait de la déclaration de Joseph Deiss au terme du débat général de la 65e Assemblée générale de l’ONU du 29 septembre 2010


Charte des Nations Unies

Fonctions et pouvoirs de l’Assemblée générale

Article 10
L’Assemblée générale peut discuter toutes questions ou affaires rentrant dans le cadre de la présente Charte ou se rapportant aux pouvoirs et fonctions de l’un quelconque des organes prévus dans la présente Charte, et, sous réserve des dispositions de l’Article 12, formuler sur ces questions ou affaires des recommandations aux Membres de l’Organisation des Nations Unies, au Conseil de sécurité, ou aux Membres de l’Organisation et au Conseil de sécurité.

Article 11
1. L’Assemblée générale peut étudier les principes généraux de coopération pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, y compris les principes régissant le désarmement et la réglementation des armements, et faire, sur ces principes, des recommandations soit aux Membres de l’Organisation, soit au Conseil de sécurité, soit aux Membres de l’Organisation et au Conseil de sécurité.
2. L’Assemblée générale peut discuter ­toutes questions se rattachant au maintien de la paix et de la sécurité internationales dont elle aura été saisie par l’une quel­conque des Membres des Nations Unies, ou par le Conseil de sécurité, ou par un Etat qui n’est pas Membre de l’Organisation conformément aux dispositions du paragraphe 2 de l’Article 35, et, sous réserve de l’Article 12, faire sur toutes questions de ce genre des recommandations soit à l’Etat ou aux Etats intéressés, soit au Conseil de sécurité, soit aux Etats et au Conseil de sécurité. Toute question de ce genre qui appelle une action est renvoyée au Conseil de sécurité par l’Assemblée générale, avant ou après discussion.
3. L’Assemblée générale peut attirer l’attention du Conseil de sécurité sur les situations qui semblent devoir mettre en danger la paix et la sécurité internationales. […]

Article 12
2. Le Secrétaire général, avec l’assentiment du Conseil de sécurité, porte à la connaissance de l’Assemblée générale, lors de chaque session, les affaires relatives au maintien de la paix et de la sécurité internationales dont s’occupe le Conseil de sécurité; il avise de même l’Assemblée générale ou, si l’Assemblée générale ne siège pas, les Membres de l’Organisation, dès que le Conseil de sécurité cesse de s’occuper desdites affaires.

Article 13
1. L’Assemblée générale provoque des études et fait des recommandations en vue de:
a. Développer la coopération internationale dans le domaine politique et encourager le développement progressif du droit international et sa codification;
b. Développer la coopération interna­tionale dans les domaines économique, social, de la culture intellectuelle et de l’éducation, de la santé publique, et faciliter pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion, la jouissance des droits de l’homme et des libertés fondamentales. […]

Article 14
Sous réserve des dispositions de l’Article 12, l’Assemblée générale peut recommander les mesures propres à assurer l’ajustement paci­fique de toute situation, quelle qu’en soit l’origine, qui lui semble de nature à nuire au bien général ou à compromettre les relations amicales entre nations, y compris les situations résultant d’une infraction aux dispositions de la présente Charte où sont énoncés les buts et les principes des Nations Unies.

Article 15
1. L’Assemblée générale reçoit et étudie les rapports annuels et les rapports spéciaux du Conseil de sécurité; ces rapports comprennent un compte rendu des mesures que le Conseil de sécurité a décidées ou prises pour main­tenir la paix et la sécurité internationales.
2. L’Assemblée générale reçoit et étudie les rapports des autres organes de l’Organisation.


Ensemble pour un monde plus juste, plus pacifique et plus prospère

[…] Il nous faut une ONU qui sache relever les défis de l’avenir pour le bien de tous. Il nous faut une ONU qui contribue effectivement à la résolution des problèmes de notre ­planète. Il nous faut des Etats membres de l’ONU qui assument leur pleine responsabilité dans la construction d’un monde meilleur.
[…] Dans un monde plus globalisé, nous devons chérir et défendre les principes contenus dans la Charte des Nations Unies. Nous devons veiller au bon fonctionnement de notre édifice commun dans un esprit de solidarité, de respect et de responsabilité. […]
L’ONU dispose d’une légitimité unique du fait de sa composition universelle. Cette légitimité est également dérivée des thèmes qui y sont traités, qui nous concernent tous. L’agenda de cette semaine en est le meilleur témoignage.
[…] Car si l’ONU n’agit pas, d’autres ­groupes, qui ne reflèteront qu’une partie des pays du monde, prendront les devants dans un souci d’efficacité et joueront un rôle central dans la gouvernance globale. Pour la ­Suisse, de tels groupes manquent de légitimité en raison de leur composition restreinte. Il est donc crucial que l’ONU et ses organes principaux demeurent au centre de la gouvernance mondiale. C’est pourquoi nous devons veiller à ce que la légitimité de l’organisation universelle ne souffre pas d’un manque d’efficacité. Pour progresser dans la construction d’un monde meilleur, il est de notre responsabilité collective d’apporter à un défi global, une réponse globale. La Suisse veut contribuer à cet effort commun. […]
Nous ne devons pas faire de l’ONU un «monument historique» immuable, mais une organisation dynamique. Elle est l’unique organisation légitime du monde qui représente tous les peuples et toutes les nations. Elle est ­l’unique organisation légitime capable d’atténuer les différences, capable d’établir l’équi­libre entre les régions. Pour que cela fonc­tionne, chacun doit prendre ses responsabilités et commencer par faire le ménage dans sa propre maison. Toutefois, il ne suffit pas de parler ou de faire des rapports. Nous devons agir. Chaque pays membre de l’ONU doit s’engager avec clarté ici, au sein de l’ONU, pour répondre aux questions ­urgentes concernant le monde d’aujourd’hui et de demain. La confiance et la crédibilité de notre organisation en sortiront renforcées. La Suisse reste fermement convaincue de la pertinence d’une approche multilatérale, dont les Nations Unies sont le centre. Ensemble, avec la contribution de vous tous, nous serons capables de créer un monde plus juste, plus pacifique et plus prospère. […]

Extrait de la déclaration de Doris Leuthard, Présidente de la Confédération suisse, 65e Assemblée générale de l’ONU du 23 septembre 2010