Les paysans et les ouvriers résistent

Bien haut, mais pacifiquement plus de 5000 personnes ont manifesté, le 19 mars, à Berne, contre les projets visant à redimensionner CFF-Cargo. Il y avait de nombreuses femmes, des enfants et personnes âgées qui ont témoigné leur solidarité avec les syndicats, venus par trains spéciaux en provenance du Tessin. Les familles des ouvriers habitant à Bellinzone connaissent très bien les raisons pour lesquelles ils entrent dans une «insurrection populaire». Des chœurs des manifestants criaient «vergogna» (honte!) en direction du Palais fédéral. Il en va, pour eux, de bien devantage que la perte des emplois. Ils sont d’avis que le Tessin, ce n’est pas seulement un Boccalino, la chambre ensoleillée, un endroit pour les touristes, mais ils y travaillent et ils y vivent. Ils sont d’avis que le Tessin, c’est la région où ils sont profondément enracinés, où ils se sont ancrés par leurs traditions et où ils entendent vivre dans l’avenir.
Une Conseillère nationale tessinoise a rappelé que leurs aïeuls avaient gagné leur vie aux chantiers des CFF et qu’ils n’avaient pas été obligés d’émigrer – contrairement à leurs ancêtres. Les générations suivantes ont ainsi pu apprendre une profession lucrative ou faire des études et se bâtir une existence assurée au Tessin. Est-ce qu’il est prévu de sacrifier leur existence à une privatisation partielle? Maintenant on demande que CFF-Cargo soit soumis – et cela au détriment de la communauté – aux lois de la rentabilité et du profit pour pouvoir en reprendre le contrôle, tout à fait selon la devise «les pertes pour l’Etat, les gains et les profits pour les rapaces».
La conseillère fédérale, Mme Leuthard, a exigé que les employés de CFF-Cargo mettent fin à leur grève tout de suite. Une tendance anti-sociale qui se fait jour également chez les producteurs du blé. Le même jour, environ 400 producteurs de froment ont défilé devant l’Office fédéral de l’Agriculture (BLW) pour donner libre cours à leur colère. Ils voulaient s’assurer l’oreille de Berne à cause du démantèlement rampant de la protection des frontières concernant le blé requis pour la production du pain. On raconte comme un conte de fée aux consommateurs que les prix des vivres vont diminuer. L’Association Suisse des Paysans (ASP), elle, part de la thèse que les revenus agricoles, conséquemment à une convention de libre-échange, seraient diminués de moitié.
Le principe du Cassis-de-Dijon, pour lequel la conseillère fédérale Leuthard fait la publicité, ruinera notre production alimentaire, et nous serons encore plus dépendants du marché mondial. Ce processus aura aussi des effets désastreux pour les générations à venir.

Ursula Felber