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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°24, 16 juin 2008  >  La démocratie directe et le fédéralisme, fondement d’une Europe libre des peuples [Imprimer]

La démocratie directe et le fédéralisme, fondement d’une Europe libre des peuples

Les Irlandais ont dit NON

par Erika Vögeli

Comme nous le savons, ils étaient les seuls qui pouvaient s’exprimer, leur Constitution leur en donnant le droit. Les 497 millions de citoyens restants sont privés de voix, car leurs élites ont décidé que le peuple n’avait pas à s’exprimer sur son destin. Pour la centrale de Bruxelles et ses représentants dans les différents gouvernements, la situation était claire: le peuple de nombreux pays s’oppose au vieux vin de Nice versé dans les nouveaux flacons de Lisbonne et il y a lieu, en outre, d’empêcher que la volonté des Français et des Néerlandais déjà exprimée par les urnes ne l’emporte. Les élites souhaitent décider sans le peuple, dans des structures «légères et efficaces», que les défis de notre époque rendent prétendument nécessaires pour créer une Europe «unie» dans la «paix et la prospérité». Les citoyens entendent les chants des sirènes, ils les comparent à leurs expériences quotidiennes et restent sceptiques. Ils constatent l’écart toujours plus marqué entre riches et pauvres dans les divers pays, les profits des trusts, la diminution de la solidarité sociale, la domination croissante de l’argent et de la corruption qui lui est liée et qui pénètre dans tous les secteurs sociaux, de la politique et de l’administration à la science, en passant par l’économie.
Le NON des Irlandais pourrait aboutir à une pause de réflexion. Il pourrait inviter à repenser les expériences historiques faites avec de grandes structures centralisées; le siècle dernier en était riche d’exemples. Pourquoi la bouillie unitaire de Bruxelles – cuisinée par plus de 15 000 lobbyistes de trusts et quelques commissaires européens et approuvée par quelques représentants de gouvernements – devrait-elle plaire à tout un chacun? Est-ce la «démocratie» prêchée par l’UE dans le monde entier, qui n’accorde même pas à son propre «Parlement» les compétences allant de soi attribuées à sa représentation populaire?
La dignité humaine veut que l’on soit libre de décider de ses propres affaires.
Les expériences que la Suisse a faites avec sa démocratie directe montrent que c’est justement cette liberté qui favorise l’ouverture et la flexibilité sociales de même que le sens des responsabilités et le lien avec les événements. La démocratie directe permet à l’individu davantage de participation et encourage ainsi l’intérêt pour la politique qui ne se mesure pas uniquement à la participation aux votations mais aussi notamment aux très nombreuses activités modestes mais efficaces aux plans communal, social et politique de même que dans les nombreux projets privés en faveur des pays en développement qui témoignent souvent d’une créativité, d’un sens de l’initiative et d’une aptitude à la collaboration incroyables dans des environnements totalement nouveaux.
La démocratie directe et le fédéralisme, fondement d’une Europe libre des peuples, une Europe de la diversité dans laquelle le droit protège les plus faibles et non le profit, dans laquelle l’ouverture ne se mesure pas seulement aux aspects économiques du marché mais est aussi une ouverture spirituelle à la diversité des hommes, des peuples, de leur histoire et des conditions dans lesquelles ils vivent, une ouverture à la diversité des solutions apportées aux problèmes des hommes, ne serait-ce pas là une meilleure option pour l’Europe que cette structure centraliste qui prévoit une augmentation du budget des armées et des opérations militaires pour garantir l’accès aux matières premières et qui voudrait bien, pour y parvenir, supprimer l’expression de la volonté populaire. L’expérience suisse d’un Etat fondé sur la liberté et la responsabilité des citoyens n’est pas seule à le prouver, mais elle le montre très clairement.1     •

1    cf. P. Widmer. Kleines Land mit grosser Wirkung. Die Schweiz – wie sinnvoll ist der Sonderfall im Zeitalter der Globalisierung? NZZ du 9/6/08