Horizons et débats
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Tél.: +41-44-350 65 50
Fax: +41-44-350 65 51
Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité
pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
18 juillet 2016
Impressum



deutsch | english
Horizons et debats  >  archives  >  2013  >  N°23/24, 25 juillet 2013  >  Les Constitutions des länder allemands définissent clairement les buts de la politique de l’enseignement [Imprimer]

Les Constitutions des länder allemands définissent clairement les buts de la politique de l’enseignement

par Karl Müller

Face aux enquêtes «Pisa» et à la série de réformes qu’elles ont engendrées, face à toutes les influences exercées par l’OCDE et l’UE, face aux «rankings» et à la «concurrence», face à la fureur de tout mesurer et comparer (sous l’étiquette d’«évaluation») et face aux réformes scolaires interminables avec leurs nouvelles expérimentations (qui ne sont souvent pas si neuves que cela) on transforme nos écoles en utilisant nos enfants et nos adolescents comme cobayes …, on risque de perdre de vue le sens de l’éducation et de l’enseignement et le sens de nos écoles publiques.
Par conséquent, il est bien compréhensible que l’on assiste aujourd’hui à la publication de livres écrits par des pédagogues expérimentés intitulés par exemple «Mettons un terme au bavardage sur la formation!» [«Schluss mit dem Bildungsgerede!»], ouvrage qui reçoit une grande approbation – tant et si bien que même la Centrale fédérale à la Formation politique [«Bundeszentrale für Politische Bildung»] a réédité ce petit livre à grand tirage. «Mettons un terme au bavardage sur la formation» – le titre ne propose pas de ne plus réfléchir à l’enseignement et la formation. Tout au contraire, l’auteur critique le regard fixé sur l’inflation de «réformes» ayant complètement perdu de vue l’essentiel et qui fait donc courir le corps enseignant, haletant, derrière les prescriptions et arrêtés publiés continuellement par les ministères de la culture des länder.
Faut-il réellement réinventer la roue pédagogique en Allemagne? Non certainement pas, un coup d’oeil dans les Constitutions des länder allemands suffit pour disposer d'une orientation et doit donner un sens aux réels buts de nos écoles. Car ces Constitutions donnent au législateur, à chaque école et à chaque enseignant, le cadre et les buts généraux sur le fond desquels l’enseignement et la vie scolaire doivent se dérouler. Certaines Constitutions de länder ont même plus de légitimité que la Loi fondamentale allemande, car celles-ci ont été votées par les citoyens dont leur Constitution a été adoptée à la suite d'un vote populaire.
12 des 16 länder allemands ont intégré dans leurs Constitutions des paragraphes sur l’éducation, la formation et l’enseignement (cf. tableau). Dans la Loi fondamentale, de telles dispositions font défaut. La cause en est la suivante: après la dictature national-socialiste et la centralisation du pouvoir et des décisions politiques ayant ouvert la voie, on s’est décidé dans la nouvelle République allemande fédérale et plus tard dans l’Allemagne réunifiée, à un retour au fédéralisme et à un ordre fédéral dans lequel les länder resteraient autonomes dans maints domaines. On a ainsi confié la souveraineté fédérale sur les écoles à la compétence des länder.
Après de longs débats acharnés, la réforme allemande du fédéralisme de 2006 a confirmé cette décision, qui avait entre-temps été minée par le mélange des compétences de l’Etat fédéral et des länder. Avec «Pisa» et d’autres «constructions à chiffres» semblables, le fédéralisme à de nouveau été mis en cause, notamment par la tentative de remettre en question, à l’aide de soi-disant «standards de formation» unifiés, la souveraineté scolaire des länder. C’est du pain bénit que certains länder aient refusé de se soumettre à cette folie de la mesure et du nivellement accompagné du slogan «seul le résultat compte» [«Output-Orientierung»].
La lecture des dispositions des divers länder définissant les buts de l’enseignement et de la formation – dispositions qu’on retrouve en général dans des formules identiques et souvent plus détaillées, dans les lois scolaires des länder, auxquelles tout enseignant doit se tenir – nous informe de façon très claire, de l’immense écart existant entre celles-ci et les réformes scolaires actuelles. Il est évident qu’aucune fiche d’évaluation ne peut mesurer «la compétence» atteinte par un élève concernant «le respect de Dieu», «l’amour chrétien du prochain», «le respect de la dignité humaine», «l’amour de la paix», «l’amour du peuple et de la patrie», «le sentiment de responsabilité morale et politique», «l’orientation libérale-démocratique», «la formation du cœur et du caractère» et à tant d’autres choses, buts nommés dans les Constitutions des länder. Aucun élève ne peut cocher de tels buts comme «appris» ou «atteint» sur une quelconque feuille souvent dénommée «trame de compétences» ou après avoir passé un test. Pourtant aucun individu sensé ne doutera que ce sont précisément de tels buts que nos écoles devraient, voire doivent, enseigner. Le tableau publié ci-dessous est sensé encourager à la réflexion … et motiver à l’action nécessaire.    •

Les buts de l'enseignement dans les Constitutions des länder

 

Tabelle à imprimer