La Croix-Rouge suisse au Kirghizistan: la promotion de la santé en région rurale est une réussiteAuparavant, il faut un entrainement spécifique en comportement non-dominantpar Gabriela Neuhaushd. Ecouter et à accepter son vis-à-vis d’égal à égal doit être appris. Puisque même l’équipe de la Croix-Rouge suisse de Tobias Schüth a grandement profité de telles réflexions avant de s’attaquer à la promotion de la santé en région rurale au Kirghizistan, il faudrait qu’également les coopérants originaires d’autres pays prennent cela en considération. Reste que les Suisses sont habitués à un comportement d’égal à égal de la vie au sein de leur propre commune. Le Kirghizes assimile cela avec plaisir. Qu’ils soient menuisiers, institutrices ou femmes au foyer, des milliers de Kirghizes s’activent bénévolement dans les villages pour améliorer la santé et le bien-être de leurs concitoyens. Œuvrant en partenariat avec du personnel soignant professionnel, les membres des comités de santé locaux jouent un rôle crucial dans les régions rurales: ils cernent les besoins des gens, font des visites à domicile, organisent des séances d’information, lancent des projets de cultures potagères ou mènent des campagnes contre l’alcoolisme. Investir dans l’infrastructureLe programme destiné à réformer le système de santé kirghize prévoyait de mettre en place des soins de santé primaires. Dans la phase initiale, le gouvernement a toutefois accordé la priorité à l’indispensable rénovation des hôpitaux. Au cours de la première année de son intervention, la DDC, qui a contribué depuis 1999 à la réforme de la santé dans l’oblast (région) de Narin, s’est donc concentrée sur la réhabilitation et la restructuration des hôpitaux. Cette mesure avait pour but de réduire leurs coûts de fonctionnement.? Activités axées sur les besoinsLe projet visant les campagnes a misé sur une approche innovante: persuadés qu’il n’est possible d’améliorer la santé de la population qu’avec le concours des personnes directement concernées, les responsables ont invité les villageois à faire part de leurs préoccupations aux médecins locaux et au personnel soignant. «Les médecins et les infirmières vivent certes dans les villages, mais c’est la première fois qu’ils allaient sur le terrain pour demander aux gens leur avis, au lieu de simplement leur prodiguer des conseils», explique Tobias Schüth. Ce dialogue à un niveau tout à fait différent fut essentiel pour la suite. Au terme des discussions, les habitants ont remercié les médecins de les avoir écoutés. Les professionnels de la santé se sont dits impressionnés par l’étendue des connaissances de la population sur ce thème. Ouverture et souplesseD’une part, les rencontres dans les villages ont suscité la formation de comités de santé. D’autre part, elles ont permis de réunir des informations de première main sur les problèmes médicaux les plus pressants dans les zones rurales. A partir de là, les responsables du projet ont prévu une vaste palette d’activités en collaboration avec les intervenants. Ils ont pu le faire parce que la DDC a renoncé à fixer un cadre budgétaire strict et leur a laissé une grande autonomie: «Nous voulions mettre au point un modèle de promotion de la santé en région rurale. A cet effet, nous avions besoin d’argent pour les rencontres et les cours. Nous ne savions rien de plus», se souvient Tobias Schüth. Selon lui, c’est la souplesse du donateur qui a permis d’élaborer un modèle bien adapté au contexte kirghize. Du projet pilote au programmeLes rencontres organisées avec les villageois ont révélé que l’anémie constituait le principal problème de santé. Dans le cadre d’une étude, le projet CAH a donc testé l’efficacité d’un mélange de micronutriments appelé Sprinkles. Il s’agit d’une poudre contenant du fer, des vitamines, du zinc et de l’acide folique, que l’on ajoute aux aliments pour enfants. Grâce à cette nouvelle méthode, le recul de l’anémie a atteint jusqu’à 40% dans les régions pilotes. Encouragé par ce succès, le Kirghizistan a été le premier pays du monde à lancer en 2011 un programme national de distribution de sachets de Sprinkles. Source: Un seul monde No 4 / Décembre 2012 Difficile transition au Kirghizistan?Jusqu’au début des années 90, la couverture médicale au Kirghizistan était efficace, gratuite et accessible à tous. Après la chute de l’Union soviétique, les ressources ont fait défaut pour préserver ce système. Dans le même temps, la pauvreté croissante ainsi que le délabrement des infrastructures d’adduction d’eau et de gestion des déchets ont détérioré la santé de la population. Malgré ses moyens limités, le gouvernement s’est engagé résolument dans la mise en place d’un nouveau système de santé: avec l’appui de l’OMS, de la Banque mondiale et de l’Agence de développement américaine USAID, il a lancé en 1996 un réseau de médecins de famille, qui fonctionne aujourd’hui très bien. De plus, la réforme du système de santé semble en bonne voie. Le manque aigu de médecins se fait toutefois durement sentir, surtout dans les régions rurales. Beaucoup émigrent à l’étranger où ils gagnent bien mieux leur vie. |