Plan d’études 21, enseignement axé sur les compétences, apprentissage autoguidé: les cantons s’apprêtent à réformer leurs écoles de fond en combleLa Suisse ne doit pas détruire son système d’éducationpar Thomas DählerPersonne ne niera que le système scolaire suisse fait partie de l’histoire du succès suisse. L’école obligatoire reposant sur une formation générale solide prépare aujourd’hui au mieux aussi bien pour une carrière académique que pour une carrière partant d’une formation professionnelle. Elle prépare, il faut le dire, à la vie! Cependant, une vague de réformes presque inimaginable a submergé la Suisse. Un tsunami ayant le potentiel de détruire tout le paysage éducatif fédéraliste de la Suisse. Les nombreuses réformes du système scolaire suisse à succès mettent en danger son niveau de formation élevé, reposant sur une excellente formation générale à l’école obligatoire et sur un système dual de formation professionnelle performant – garantissant ainsi prospérité économique et niveau de vie élevé. L’école en tant qu’entrepriseS’éloignant des principes d’éducation basés sur la tradition humaniste, cette restructuration mène vers une instrumentalisation utilitariste de l’instruction publique. C’est au début des années 1990 qu’Ernst Buschor, jadis chef du Département de l’Instruction publique zurichoise, a imposé à l’administration scolaire de son canton, l’introduction du New Public Management, a déclaré que les écoles devaient toutes avoir leur Corporate Identity et a donné la préférence à l’anglais précoce à l’école primaire, apparemment plus utile qu’une seconde langue du pays. Le Plan d’études 21 reflète l’esprit régnant à Zurich à cette époque. Il conçoit les enseignants comme prestataires de services et tant les parents que les élèves comme des clients – une école qui érige à l’instar de l’économie l’offre et la demande en maxime suprême. Une notion de compétences floueDéjà l’historique de ce Plan d’études 21 a rendu bon nombre de personnes extérieures méfiantes. Au début, les enseignants et journalistes se sont vus refuser l’accès aux contenus du Plan d’études 21. Le projet top-down devait apparemment passer sans critiques. C’est seulement lors de la publication du projet, après 3 années de silence, que des critiques ont pu être émises. Ainsi, de multiples souhaits de correction ont été apportés lors de la consultation et ce rafistolage a été adopté par les directeurs cantonaux de l’Instruction publique de la Suisse alémanique. On voit vite qu’il s’agit d’un rafistolage: il traite toutes les matières différemment, la notion de compétences reste floue. On a affaire à un mélange de connaissances, d’objectifs d’apprentissage et de réelles compétences. Laquais des spécialistes de l’éducationAvec le Plan d’études 21 et les réformes qui en font partie, on n’harmonisera pas seulement, comme déclaré, les systèmes scolaires. Il s’agit plutôt de transformer l’école en une industrie de test, dans laquelle les enseignants ont avant tout le rôle de contrôler si les élèves travaillent pour atteindre les objectifs prescrits. Les enseignants seront donc largement dispensés de leur fonction pédagogique, de même que de leur mission d’animer les élèves à la pensée critique. Ils ne seront que les laquais des spécialistes de l’éducation. Source: Basler Zeitung du 30/4/16 (Traduction Horizons et débats) |