Economisation excessive de l’aide au développement?Global+ Restons-en aux objectifs sociaux au lieu de céder à des fantasmes globaux et à la bulle économique vertepar Michèle LaubscherL’OCDE, club des pays industrialisés, revient dans son Rapport sur la coopération pour le développement 2011 sur les 50 dernières années et s’interroge sur les défis à venir.1 Neuf auteurs s’y expriment, parmi lesquels James Wolfensohn, ancien président de la Banque mondiale, Michelle Bachelet, directrice d’ONU Femmes et Donald Kaberuka, président de la Banque africaine de développement. Il en résulte une série de postulats qui n’offrent pas une idée d’ensemble très claire mais confirment certaines tendances. Critique des ODMLe Rapport reconnaît l’importance des Objectifs du Millénaire (ODM) qui ont donné un nouvel élan à l’aide au développement et à son financement, mais en même temps, il les critique parce qu’ils sont trop axés sur la dimension sociale et négligent la croissance économique. Approvisionnements de base vs biens publics mondiauxCertes, les biens publics mondiaux jouent un rôle décisif dans le développement d’un pays, mais il serait dangereux d’en déduire que la mission de la coopération pour le développement consiste à conserver ces biens ou à les mettre à disposition pour que les pays pauvres puissent se développer. Richard Manning en montre très clairement les risques: les pays pauvres pourraient se voir contraints d’investir l’aide au développement d’une manière qui profite avant tout aux autres. Il mentionne l’exemple des technologies énergétiques coûteuses. Il est à craindre que ces investissements forcés dans des biens publics mondiaux empêchent quasiment les pays dépendants de l’aide d’investir de manière équilibrée les moyens mis à leur disposition. Qui va payer?Mais le Rapport ne dit pas comment financer ces nouvelles missions. Seul Severino s’exprime à ce sujet, mais de manière assez vague. Il propose d’imposer les élites riches de tous les pays au moyen d’une taxe sur les billets d’avion, mais il ne dit rien de la seule mesure qui serait vraiment efficace, c’est-à-dire une taxe sur les opérations de change. Selon une estimation du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), une taxe de 0,005% rapporterait chaque année 40 milliards de dollars. En déplaçant la virgule d’une position vers la droite, cette taxe resterait minime mais elle rapporterait suffisamment pour financer les ODM et les mesures de lutte contre le changement climatique nécessaires dans les pays en développement. Source: Global+, no 44 2011/2012 (Traduction Horizons et débats) 1 Development Cooperation Report 2011, www.oecd.org/dataoecd/40/S3/488o6367.pdf La Suisse suit le mouvementml. De plus en plus, la Suisse investit également son aide au développement dans la gestion des biens publics mondiaux. Elle finance de plus en plus des domaines dont notre pays tire un profit direct, comme la stabilisation du climat ou la lutte contre les migrations incontrôlées. Et à l’instar d’autres pays industrialisés, elle s’oppose à de nouveaux moyens de financement des missions supplémentaires, comme la taxe sur les billets d’avion ou celle sur les opérations de change. En outre, elle ne veut pas utiliser une partie de la taxe carbone pour financer les mesures de lutte contre le changement climatique. En revanche, elle ne s’est guère prononcée sur les nouvelles propositions comptables. A vrai dire, elle profite déjà considérablement des astuces comptables existantes: L’année dernière, les frais de prise en charge des demandeurs d’asile venant de pays en développement ont représenté plus de 16% de l’aide au développement. Aucun autre pays de l’OCDE n’arrive à un pourcentage aussi élevé. |