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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°41, 26 octobre 2009  >  La Commission européenne tire la sonnette d’alarme [Imprimer]

La Commission européenne tire la sonnette d’alarme

Le Conseil fédéral suisse veut lier notre pays encore plus fortement à l’UE par un accord cadre. Il se pourrait bien que ce soit un préliminaire à l’adhésion. A quoi devons-nous nous attendre – par exemple dans le domaine des finances, qui apparaît aujourd’hui particulièrement important?

ww. Les Etats de l’UE ont depuis l’année dernière déversé de nombreux milliards dans leurs économies et dans les banques, afin d’empêcher la déroute du système financier et une grave crise économique. Ces deux dangers semblent pour l’instant être maîtrisés. On peut toutefois se demander si ce succès tiendra. A moins qu’il ne s’agisse que d’un feu de paille, qui s’éteindra une fois ou l’autre, dès que l’apport d’argent destiné à sauver les meubles et à redonner un départ aura tari. – On n’en sait rien.
On connaît toutefois déjà le prix de cette politique et cela inquiète de plus en plus les responsables. La Commission européenne a lancé un cri d’alarme:
1.    Il y a trois semaines, la Commission a lancé une procédure contre 9 pays en déficit budgétaire, c’est-à-dire ceux qui ne respectent pas le plafond de 3% de déficit du Produit intérieur brut (PIB) de chacun des pays fixé dans le Pacte de stabilité et de croissance (PSC). Parmi ces pays déficitaires on trouve l’Allemagne, l’Italie, l’Autriche, les Pays-Bas et la Belgique, tous faisant partie du noyau dur de l’UE. Du fait de la crise, ils peuvent certainement escompter être ménagés. Le rapport souligne toutefois que l’endettement de la plupart des Etats de l’UE est insupportable.
2.    La semaine dernière a paru un nouveau rapport venu de Bruxelles. Les auteurs mettent en garde contre les accumulations de dettes qui prennent des proportions inquiétantes. Les efforts entrepris au cours de ces dernières années pour assainir les finances publiques se retrouvent au point de départ. En 2007, les Etats de l’UE présentaient encore en moyenne un déficit de 0,7% du PIB; cette année il a grimpé à 6% et on s’attend à 7% pour l’année prochaine. Et le fait que les Etats-Unis ont vu tripler leur déficit et atteindre 10% de leur PIB n’est pas une consolation.
Jusqu’en 2010, l’endettement des pays de l’UE augmentera de 20% en moyenne pour atteindre 80% du PIB. Le nombre de pays qui ne seraient actuellement plus en mesure d’adhérer à l’Union monétaire passe de 8 à 13. L’avenir est toutefois différencié. On ne peut guère comparer d’un pays à l’autre les finances publiques, la situation de l’économie et l’état des assurances sociales. La Commission divise les Etats-membres en trois catégories à risques. La Suède, le Danemark, la Finlande, l’Estonie et la Bulgarie présentent relativement peu de risques. Par contre, 13 Etats sont en grand danger, dont la Grande-Bretagne, l’Irlande, les Pays-Bas, l’Espagne, ainsi que la plupart des nouveaux pays-membres, notamment la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, la Tchéquie et Chypre. Quant aux autres Etats, ils font partie de la catégorie moyenne.

Comment la Suisse doit-elle se comporter?

La Suisse doit-elle conclure un accord cadre et se lier encore plus étroitement à l’UE aussi en matière de finances?
Les deux rapports dont il est question ci-dessus mettent en vue le fait que l’UE tente de «diriger» le problème de l’endettement par le haut, c’est-à-dire par des rapports, des procédures, des sanctions, d’autres dispositions, des subventions prises des différents fonds d’entraide de l’UE, etc.
Et comment la Suisse dirige-t-elle son problème d’endettement? Le gouvernement suisse ne s’attend pas à un déficit pour cette année. Les mesures de sauvetage, ainsi que les mesures de soutien à la conjoncture restent dans des limites raisonnables, comparées aux autres pays. Quant à l’endettement public total d’environ 50% du PIB, il reste modeste comparé aux 80% en moyenne de l’UE. Pour beaucoup de Suisses, avant tout des citoyens âgés, c’est beaucoup trop. En effet, ils ont constaté qu’après la Seconde Guerre mondiale, les autorités ont, pendant des décennies, géré leur budget pratiquement sans s’endetter.

D’où vient ce sens relatif de l’économie en Suisse?

Dans un pays aussi fédéraliste que la Suisse, avec 26 cantons et environ 2600 communes indépendantes, chacune avec sa propre fiscalité, les citoyennes et citoyens contrôlent eux-mêmes leurs finances. Ils veillent à ce que les politiciens dépensent raisonnablement les deniers publics. Les dépenses et les investissements importants dans les com­munes, dans les cantons ou au niveau fédéral doivent être soumis à la votation populaire. Il n’est pas possible d’augmenter les impôts sans l’aval de la population par votation. De plus, un frein à l’endettement, inscrit dans la Constitution, permet de réfréner les envies de dépenses des politiciens. Ce contrôle financier direct fonctionne au mieux dans les petites unités telles que les communes et les cantons, du fait de la proximité existant entre les citoyens et les autorités. C’est ainsi que le plus petit canton suisse, Appenzell ­Rhodes-Intérieures avec ses 15’000 habitants, a le moins de dettes par habitant. La Confédération présente un résultat nettement moins bon depuis vingt ans.
De nombreuses communes et beaucoup de cantons n’ont actuellement pratiquement pas de dettes, du fait que les citoyens et citoyennes peuvent contrôler les finances plus directement que dans les autres pays. Cela présente des avantages, notamment en temps de crise: le grand canton de Zurich, économiquement le plus fort, a par exemple ­presque entièrement remboursé ses dettes de 12 milliards de francs au cours des 10 dernières années. Certes, l’avenir est sombre, suite à la crise, l’endettement pourrait de nouveau grimper à 8 milliards jusqu’en 2012. N’ayant plus d’anciennes dettes, cette nouvelle charge sera plus facile à supporter.
En bref: c’est un avantage certain sur le plan financier pour la population de pouvoir contrôler directement les finances à tous les niveaux politiques, au lieu de laisser faire des politiciens élus ou une quelconque commission européenne. La Suisse ne pourrait qu’y perdre.•