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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°9, 7 mars 2011  >  Fusionner les armées de l’air suisse et autrichienne serait une erreur au regard du droit international [Imprimer]

Fusionner les armées de l’air suisse et autrichienne serait une erreur au regard du droit international

par Albert A. Stahel, Institut d’études stratégiques, Wädenswil

thk. Ce n’est pas la première fois que des représentants du Parti socialiste suisse essaient de s’attaquer à la neutralité et de remettre en cause l’armée de milice. La nouvelle tentative dissimulée fait sérieusement réfléchir parce que la suggestion vient de l’Autriche, pays neutre. Là également, la gauche (SPÖ) cherche à abolir la neutralité, à introduire une armée de métier et à faire entrer l’armée autrichienne dans l’OTAN par le biais de la politique commune de sécurité de l’UE et d’une alliance militaire avec la Slovaquie et la République tchèque, deux Etats membres de l’OTAN.
Le maire de Vienne, Michael Häupl, et le ministre de la Défense, Norbert Dorabos, tous deux membres du SPÖ se montrent particulièrement actifs. Ils ont proposé officiellement de fusionner les armées de l’air de l’Autriche et de la Suisse. Le fait ­qu’Andreas Gross (conseiller national socialiste) et d’autres politiques suisses de gauche soient très favorables à ce projet n’est pas étonnant et laisse supposer un accord interne entre les deux partis. L’initiative parlementaire sur l’abolition de l’armée de milice de la conseillère nationale socialiste Evi Allemann semble constituer un élément de ce projet car l’«initiative sur les armes» visait le même objectif.

Selon le droit international, un Etat qui fonctionne repose sur trois éléments:
1.    le gouvernement,
2.    le peuple,
3.    le territoire national.
Pour qu’un Etat ne devienne pas un failed state, le gouvernement doit être en mesure de protéger le peuple et le territoire national. Le seul instrument qui permette cela est une armée intacte et efficace. C’est uniquement en contrôlant complètement cet instrument qu’un gouvernement peut imposer et sauvegarder la souveraineté de l’Etat qui lui a été confié avec sa population et son territoire. Le gouvernement ne doit pas abandonner ce contrôle, et surtout pas l’élément le plus important de ses forces armées, l’armée de l’air. C’est le seul moyen de garantir que l’Etat continuera de fonctionner et ne deviendra pas un failed state. L’importance considérable de l’armée de l’air pour un Etat est d’ailleurs démontrée par beaucoup des guerres menées depuis 1991 dont l’issue a en dernière analyse toujours été déterminée par l’armée de l’air. Les autres armes devaient la soutenir dans ses différentes missions.
Or si l’armée de l’air suisse fusionnait avec celle de l’Autriche, ce qu’envisagent manifestement différents politiques suisses, notamment Andreas Gross, cela signifierait que la Suisse et son gouvernement partageraient avec un autre Etat, voire lui transmettrait, un élément important de son instrument du pouvoir et par là même de sa souveraineté. Comme cet Etat est membre de l’UE, cela conduirait logiquement à céder à l’UE la souveraineté sur le territoire suisse et par conséquent la souveraineté sur la Suisse. En fin de compte, la Suisse deviendrait une vassale de l’UE. Il faudrait chercher à savoir très précisément si les partisans de cette idée, comme Gross, visent consciemment cet objectif. Comme la population suisse continue à tenir à la souveraineté de son Etat, nous aurions finalement affaire au délit de haute trahison. L’orientation de la politique étrangère de l’UE face à la crise en Afrique du Nord montre bien ce que fait la bureaucratie européenne de la souveraineté de ses membres. Cette politique défend les intérêts de l’Italie, de la France, de l’Allemagne et de la Grande-Bretagne et de leurs investissements en Libye. Ces grands Etats se moquent manifestement des intérêts des petits Etats européens.
Maintenant, en ce qui concerne ce que ne cessent d’affirmer ces mêmes politiques suisses, c’est-à-dire que la Suisse est aujourd’hui entourée de pays amis, il suffit de se rappeler l’histoire de l’humanité pour se ­convaincre du contraire. Les nombreuses guerres et conflits européens prouvent suffisamment qu’il n’y a jamais eu et qu’il n’y aura jamais d’amitié entre les Etats. Les amitiés se li­mitent toujours aux relations entre individus. En revanche, les Etats et leurs gouvernements poursuivent des intérêts qu’ils défendent toujours par la force des armes. Les petits Etats qui, dans les années 1930, avaient négligé leur défense ont subi l’agression du dictateur Hitler et ont payé leur négligence de pertes effroyables en hommes et en matériel car ils furent soumis à l’effroyable occupation de la Grande Allemagne. La Suisse a risqué de subir le même sort mais grâce à des politiques loyaux comme le conseiller fédéral Minger qui, à la dernière minute, s’est engagé en faveur de la remise en état de l’armée, le pays et sa population ont été épargnés.    •

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(Traduction Horizons et débats)