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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°50, 15 décembre 2008  >  L’Autriche est en faillite! [Imprimer]

L’Autriche est en faillite!

Ce que des générations avaient construit a été dilapidé dans le casino mondial

par Friedrich Romig

Les politiciens autrichiens tels que Vranitzky et Schüssel, ou encore Andreas Khol, qui a agi comme éminence grise pendant des décennies, nous ont menés dans l’Union européenne et imposé l’euro. Ils ont été fort soutenus par des gens du deuxième rang, ainsi de Mock, Busek, Klima, Fischler, les anciennes ministres des Affaires étrangères Ferrero-Waldner et Plassnik, sans oublier les béni-oui-oui du Parlement ainsi que les fonctionnaires sans caractères représentant le pays à Bruxelles qui, tous, ont agi pour que le pays perde sa souveraineté tout autant que sa monnaie et s’enfonce dans la faillite globale. Ils ont préparé le terrain aux profiteurs et aux banquiers criminels qui se sont lancés dans ce casino mondial où de gigantesques sommes du patrimoine national ont été perdues à tout jamais en quelques années.
Schüssel avait prétendu que l’élargissement à l’Est était une chance à saisir par l’Autriche qui est maintenant engagée dans ces pays par 600 milliards d’euros, ce qui représente près du double du produit brut intérieur. Les crédits ne seront jamais remboursés et ces engagements ont déjà perdu entre 50 et 80% de leur valeur; pour sauver ce qui reste, on injecte de nouveaux crédits. Les cours des banques et sociétés d’assurances, fortement exposées, telles que Raiffeisen International, Erste Bank ou Vienna Insurance ont chuté comme les feuilles mortes en automne, des banquiers fort honorés tels que Treichl ou Konrad ou encore Stepic en sont à mendier de l’aide auprès de l’Etat! La banque de crédit communal (Kommunalkreditbank), fondée à l’origine pour soutenir les communes, a perdu des centaines de millions dans des spéculations à Chypre et en Islande; elle fut vendue à l’Etat pour deux euros. Cette année, la Volksbank doit faire son deuil de 362 millions d’euros dans ses participations à cette banque et en plus réinvestir 300 millions pour des «affaires structurelles» avec des banques en faillite en Islande, avec Lehman&Brothers, etc. Elle en est à solliciter un milliard d’euros auprès de l’Etat, comme si ce dernier possédait une corne d’abondance.

Le patrimoine national est dilapidé et on en a pour un siècle à payer des intérêts

Les contrats de leasing transfrontaliers, conclus par les communes et des entreprises relevant de l’Etat, s’élèvent à 20 à 30 milliards euros. La firme Tiwag a vendu son usine électrique de Sellrain-Silz pour environ 1,5 milliard d’euros, puis l’a reprise en leasing pour cent ans. Le prix de vente fut déposé dans des banques étrangères. Mais, les banques de dépôts s’effondrent l’une après l’autre, et de larges franges du prix d’achat disparaissent et ce qui reste c’est l’obligation pour la firme Tiwag de payer l’emprunt pendant cent ans! Cela ressemble fort à la façon d’agir d’un propriétaire de maison qui aurait pendant des années économisé pour acheter sa maison, l’aurait ensuite vendue, puis brûlé la somme recueillie, pour ensuite la louer, c’est-à-dire la payer une deuxième fois.
Les huit usines électriques sur le Danube ont été bradées de la même façon, de même que le métro et le réseau de tramways viennois, sans oublier une partie du réseau de canaux viennois, des réseaux de courant et de gaz dans le Burgenland, les gares, les locomotives, les wagons et les installations de signaux des chemins de fer autrichiens (ÖBB), le chauffage à distance de la ville de Linz, les installations de surveillance aérienne d’Austro Control, les services de triage de la poste, etc. Rien qu’en Basse-Autriche, 150 communes se sont laisser embarquer dans ces contrats de leasing transfrontaliers, vendant tout, de la mairie à la distribution de l’eau et aux stations d’épuration, bref tout ce qui pouvait être monnayé. Maintenant ils tentent de récupérer de Raiffeisen les pertes que cette banque leur a causées par ses conseils. Le comble a été atteint par les services communaux d’Innsbruck qui, du temps du préfet van Staa, avaient vendu leur réseau de canaux, puis souscrit un contrat de leasing pour ce réseau pour 250 ans! Tout le monde a cru, à l’aide aussi de fraude fiscale, pouvoir faire de grosses affaires; mais actuellement les contrats contraignants, ressemblant fort à une expropriation, font apparaître les risques encourus.

Fonds de pension investis en hypothèques américaines pourries

Les banques autrichiennes ont investi 2,7 milliards d’euros en Islande, dont 1 milliard rien que par Raiffeisen. Seule une petite partie de ces investissements dirigés par la suite vers les Etat-Unis sera récupérée. Les dédommagements des investisseurs particuliers, à qui ont avait promis que les «produits structurés» étaient «inattaquables», provoqueront d’autres pertes. Depuis des années, tout ce qui a affaire au monde de la finance sait que les Etats-Unis sont en faillite et doivent être soutenus par l’étranger à hauteur de 2 à 3 milliards de dollars par jour. De ce fait, depuis des années, plus personne de sensé n’investit à long terme aux USA. Nos «génies financiers» autrichiens n’en eurent cure et vidèrent les caisses de pensions et transférèrent les économies des Autrichiens aux Etats-Unis pour y acquérir des hypothèques pourries. Les retraités confiants en sont pour leurs frais et doivent accepter des réductions de leurs rentes. C’est Schüssel (alors chancelier [premier ministre] de l’Autriche) qui vanta les deuxième et troisième piliers comme étant la poule aux œufs d’or, qui maintenant se trouvent dans la fange.
Le fonds de grève des syndicats, d’un montant de 3 milliards d’euros, à disparu dans les Caraïbes et les membres du syndicat national ont été grugés par leurs dirigeants. On en est à se féliciter que le syndicat ait pu être sauvé de la faillite et du coup on nomme le sauveur comme ministre des Affaires sociales!

Subventions dilapidées dans le casino mondial

La compagnie d’aviation Austrian Airlines (AUA) a donné une image particulièrement ridicule. Elle obligea ses actionnaires à augmenter le capital, en déposa une partie aux Etats-Unis et la perdit. Elle est maintenant vendue pour 1 euro pour autant que le gouvernement se montre prêt à y injecter 500 millions pour aguicher l’acheteur. Depuis sa création, cette compagnie a toujours dû être soutenue, n’arrivant pas à vivre par elle-même. La mégalomanie des dirigeants du pays, qui voulaient à tout prix avoir leur propre compagnie d’aviation, les a amenés à la déroute.
Les Chemins de fer autrichiens (ÖBB) en firent de même, investissant les subventions accordées pour le développement de l’entreprise à l’étranger. Les pertes se montent, selon la publication économique Wirtschaftsblatt du 19/10/08, à 600 millions d’euros. Le nouveau gouvernement de coalition se voit maintenant contraint d’injecter de nouveaux milliards de subventions dans les Chemins de fer autrichiens.
Le nouveau président de la Banque nationale autrichienne, E. Nowotny, s’enfonce lui aussi dans les contradictions. Il met à la disposition des banques des moyens pour leur permettre d’augmenter leurs fonds propres, afin qu’elles puissent proposer des prêts à intérêts modestes à la classe moyenne du pays. Il est clair qu’il y a contradiction entre augmentation des fonds propres et répartition plus large des crédits. C’est de la poudre aux yeux pour faire accepter par la population ces versements.

L’hyperinflation est la suite logique de l’extension du volume de crédit

L’Autriche est en faillite! Il apparaît clairement que la gigantesque extension du volume de crédits semble être la solution à la crise due aux jeux de casino, avec pour corollaire une hyperinflation qui ruinera les économies des gens. L’euro gardera sa réputation d’être un facteur de cherté de la vie – et tout le monde s’appauvrira, notamment du fait des augmentations des impôts dont va s’occuper la nouvelle coalition gouvernementale des Messieurs Feymann et Pröll. En peu d’années, les politiciens ont – avec l’aide de la mafia des banques et de «Global players» peu sérieux – dilapidé, dans des entreprises et des holdings proche de l’Etat, le patrimoine national créé avec peine par des générations. Ils estiment que ce capitalisme désastreux est sans doute la condition d’un «nouvel ordre mondial» dans lequel des générations de simples citoyens patients ne seront bonnes qu’à être tondues.    •

L’auteur a enseigné l’économie politique à Vienne, Graz et Aix-la-Chapelle.
(Traduction Horizons et débats)