Courrier des lecteurs

«Eduquez les enfants de manière à ce qu’ils refusent de servir dans l’Armée et de faire la guerre.»    (Ernst Friedrich, 1924)

Vous ne mettrez certainement pas de soldats de plomb sous le sapin de Noël pour vos enfants, vos neveux, vos petits-enfants et vos arrière-petits-enfants. Ce serait démodé. Vous ne leur offrirez pas non plus des blindés miniatures et encore moins un fusil. Cela ne correspondrait ni à l’esprit de l’enfant Jésus ni à «Voici Noël, ô douce nuit».
Peut-être leur offrirez-vous un jeu vidéo de tir. «Call of Duty: Black Ops», «Doom», «Le Parrain» ou autre. En Allemagne seulement, on vend 50 millions de ces jeux par an.
Avant que vous n’offriez un tel jeu, il vaudrait la peine de lire le nouveau petit livre de poche de Rudolf Hänsel: «Game over!» (ISBN 3-897-064006) (cf. ci-contre. Il n’existe malheureusement pas de traduction en français, ndlr.).
Aujourd’hui, nous devons nous poser des questions concernant notre environnement culturel qui encourage les actes violents comme ceux commis récemment par de jeunes brutes suisses à Munich. Que nous prépare notre fameuse «culture» actuelle? Rappelons que Hitler, Mussolini, Staline ne furent possible qu’à cause d’une culture marquée par le racisme et la violence. A ­l’époque du fascisme en Allemagne, de 1933 à 1945, on rendait la guerre attrayante avec des jouets guerriers, les Jeunesses hitlériennes, les vieilles légendes héroïques et la glorification des guerres menées par le Saint-Empire romain-germanique.
C’est en vain qu’Ernst Friedrich a écrit en 1924: «Eduquez les enfants de manière à ce qu’ils refusent plus tard de servir dans l’Armée et de faire la guerre.»
Aujourd’hui, on entraîne les enfants et les adolescents par la télé et les jeux de tir à défendre notre culture par la force des armes, à contrôler militairement l’exploitation des matières premières, jusque dans des pays lointains comme l’Afghanistan.
Récemment, «Call of Duty: Black Ops»
a battu tous les records. En 24 heures, 5,6 millions d’exemplaires ont été vendus. Dans ce jeu, il s’agit de tuer le plus grand nombre possible d’adversaires. Ces jeux de tir sont élaborés, dans bien des cas, en collaboration avec l’armée américaine et la CIA. On voudrait ainsi amener les ­jeunes à accepter le service militaire et faciliter le recrutement. Le jeu «Doom» (Destin, Fatalité) est utilisé par le corps de marines sous une forme légèrement adaptée, sous le nom de «Marine Doom», pour apprendre aux recrues à tuer.
Le jeu «Le Parrain», inspiré du film du même nom, est très brutal. Le joueur s’identifie à un criminel de la mafia qui torture et tue. La consigne précise ceci: «Ne le tue pas tout de suite, laisse-le saigner lentement comme un cochon.»
Rudolf Hänsel montre dans son ouvrage comment les jeux de tir manipulent nos enfants, les rendent agressifs et émoussent leur aptitude à la compassion et à la solidarité ainsi que leur volonté de sauvegarder la paix.

Heinrich Frei, Zurich

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