Horizons et débats
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Tél.: +41-44-350 65 50
Fax: +41-44-350 65 51
Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité
pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
18 juillet 2016
Impressum



deutsch | english
Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  N°8, 27 février 2012  >  Inventeur du TDAH: «Le TDAH est une maladie fabriquée [Imprimer]

Inventeur du TDAH: «Le TDAH est une maladie fabriquée»

par Moritz Nestor

La Commission nationale d’éthique dans le domaine de la médecine humaine CNE (président Otfried Höffe) a traité, heureusement de manière critique, l’utilisation du médicament Ritaline dans sa prise de position du 22 novembre 2011 sous le titre «L’‹amélioration› de l’humain par des substances pharmacologiques»1: Le comportement de l’enfant serait influencé par la chimie sans aucune activité interne. C’est là une atteinte à la liberté et aux droits de la personnalité de l’enfant, parce que les agents chimiques causent bien certains changements du comportement, mais l’enfant n’apprend pas sous l’effet de la chimie comment il pourrait changer son comportement lui-même. Ainsi, on le prive d’expériences d’apprentissage importantes au niveau de l’action autonome et humaine: «Cela constitue une limitation sensible de la liberté de l’enfant, et cela entrave le développement de sa personnalité», critique la CNE.
Une argumentation vient maintenant d’un côté tout différent à l’aide des critiques alarmés par la catastrophe de la Ritaline. Le 6 février dernier, Der Spiegel cite, dans l’article qui fait la une, le psychiatre US-américain Leon Eisenberg, né en 1922 comme fils d’immigrants judéo-russes et «père scientifique du TDAH», qui déclara sept mois avant sa mort, dans sa dernière interview à l’âge de 87 ans:

«Le TDAH est l’exemple révélateur d’une maladie fabriquée.»2

Cependant, depuis 1968, pendant environ 40 ans, la «maladie» de Leon Eisenberg errait à travers les manuels diagnostiques et statistiques d’abord comme «réaction hyperkinétique dans l’enfance», aujourd’hui nommé «TDAH» (Trouble de déficit de l’attention/hyperactivité). La consommation de médicaments TDAH a augmenté en Allemagne en dix-huit ans de 34 kg (1993) à la somme de record inouïe de 1760 kg (2011) – soit un chiffre d’affaires 51 fois plus élevé! Aux Etats-Unis, déjà un garçon sur dix, à l’âge de dix ans, avale tous les jours un médicament TDAH. Et cela augmente continuellement.3
S’il faisait partie du répertoire éprouvé de Bernays, le père de la propagande, de vendre la Première Guerre mondiale à son peuple à l’aide de la psychanalyse de son oncle, et d’utiliser la science et la confiance en la science pour l’augmentation du profit de l’industrie – qu’en serait-il si l’on regardait une fois sur l’ordre de qui le «père scientifique du TDAH» pratiquait la science? Sa carrière fut étonnamment fulgurante et sa «maladie fabriquée» mena à de fortes augmentations du chiffre d’affaires. Et, après tout, entre 2006 et 2009, il participa au travail du «Committee for DSM V and ICD XII, American Psychiatric Association»4. Et Leon Eisenberg reçut de la «National Alliance for Research on Schizophrenia and Depression NARSAD» en 2003 «le prix Ruane pour la recherche en psychiatrie pour enfants et adolescent. Il fut durant plus de 40 ans le plus grand psychiatre pour enfants en raison de ses essais pharmacologiques, de recherche, d’enseignement et de procédure sociale et pour ses théories sur l’autisme et la médecine sociale.»5 Et après tout Eisenberg était membre du «Organizing Committee for Women and Medicine Conference, – Bahamas, November 29 – December 3, 2006, Josiah Macy Foundation (2006)»6 La Josiah Macy Foundation a organisé, durant et longtemps après la Seconde Guerre mondiale, des conférences avec des agents des services secrets de l’OSS, la future CIA, comme Gregory Bateson et Heinz von Foerster.
Est-ce que de tels cercles ont établi le diagnostic TDAH sur mesure au service du marché pharmaceutique et pour celui-ci, et l’ont-ils ainsi commercialisé par la propagande ou la relation publique? La psychologue américaine Lisa Cosgrove et autres suivirent exactement cette question dans l’étude Financial Ties between DSM-IV Panel Members and the Pharmaceutical Industry7 [liens financiers entre les membres du conseil de DSM-IV et l’industrie pharmaceutique] et ils ont découvert: «95 des 170 membres (56%) du conseil de DSM-IV ont eu un ou plusieurs liens financiers avec des entreprises de l’industrie pharmaceutique. Tous les membres du conseil ‹des dérangements affectifs› et ‹Schizophrénie et autres dérangements psychotiques› avaient des relations financières avec des fabricants de médicament. […] Les relations sont particulièrement fortes dans les domaines diagnostiques, où les médicaments représentent le premier niveau du traitement de dérangements psychiques.»8 La situation est toujours la même dans l’édition suivante du manuel: «Des 137 membres du conseil DSM-V qui avaient fait des déclarations de divulgation, 56% ont annoncé des relations avec l’industrie – aucune amélioration du pourcentage face aux membres du DSM-IV.»9 Pour cette raison, Irwin Savodnik, professeur de psychiatrie à l’Université de Californie de Los Angeles, a conclu: «Le véritable vocabulaire de la psychiatrie est défini actuellement à tous les niveaux par l’industrie pharmaceutique.»10
Cela est bien payé. En voilà un exemple: Le directeur suppléant de la Pediatric Psychopharmacology Unit au Massachusetts General Hospital et le professeur associé de psychiatrie de la Harvard Medical School a obtenu «entre 2000 et 2007 un million de dollars de recettes des fabricants de médicaments».11
En tout cas, personne ne peut plus passer outre la déclaration du père du TDAH: «Le TDAH est l’exemple révélateur d’une maladie fabriquée.»
Les psychologues, les pédagogues et les médecins ne sont pas là pour tenir en laisse les enfants à la «corde chimique», parce que la société entière n’arrive pas à faire face aux produits de ses théories manquées sur l’être humain et l’éducation d’enfant, ayant elle-même abandonné l’initiative de l’éducation de nos enfants au marché pharmaceutique libre. Souvenons-nous de la substance fondamentale de la psychologie et de la pédagogie personnelle: L’enfant doit acquérir, sous une direction bien solide, l’action autonome et humaine – et pour cela il a besoin de la famille et de l’école: dans ces domaines, il doit pouvoir mûrir psychiquement. C’est là le noyau de la personne humaine.    •
(Traduction Horizons et débats)

1    Commission nationale d’éthique dans le domaine de la médecine humaine CNE: L’«amélioration» de l’humain par des substances  pharmacologiques. Prise de position no 18/2011, Berne,
octobre 2011. URL: http://www.bag.admin.ch/nek-cne/04229/04232/index.html?lang=fr 
(Dernière modification: 27/10/11)
2    Blech, Jörg: Schwermut ohne Scham. in: Der ­Spiegel, n° 6, le 6/2/12, pp. 122–131, p. 128.
3    Blech, p. 127.
4    http://en.wikipedia.org/wiki/Leon_Eisenberg  (6/2/12)
5    http://psychnews.psychiatryonline.org/newsarticle.asp?articleid=107051&RelatedNewsArticles=true  (6/2/12, 17:59:18)
6    http://en.wikipedia.org/wiki/Leon_Eisenberg  (6/2/12, 17:59:25)
7    Cosgrove, Lisa et al.: Financial Ties between DSM-IV Panel Members and the Pharmaceutical Industry. In: Psychother Psychosom 2006;75:154–160 (DOI: 10.1159/000091772)
8    Cosgrove, Lisa et al., p. 154
9    DSM Panel Members Still Getting Pharma Funds. URL: http://www.cchrint.org/tag/lisa-cosgrove/  (8/2/12, 23:21:29)
10    Woods, Tyler: Experts Who Write for the DSM Have Financial Ties With Pharmaceutical Companies. MaxHealth (paru le 11/2/10) URL: http://www.emaxhealth.com/1357/7/35563/experts-who-write-dsm-have-financial-ties-pharmaceutical-companies.html  (8/2/12, 23:24:03)
11    cf. DSM Panel Members Still Getting Pharma Funds