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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°37, 28 septembre 2009  >  «Le G20 manque de légitimité et ne dispose pas de procédures transparentes» [Imprimer]

«Le G20 manque de légitimité et ne dispose pas de procédures transparentes»

Discours prononcé par le président de la Confédération Hans-Rudolf Merz; 64e Assemblée générale de l’ONU; New York, 24 septembre 2009

Monsieur le Président de l’Assemblée générale,
Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etat
ou de Gouvernement,
Monsieur le Secrétaire général,
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
L’année écoulée a été particulière à bien des égards. Il y a douze mois, à quelques mètres d’ici, une banque s’effondrait et entraînait le système financier international au bord du gouffre. Les turbulences du secteur financier ont conduit à une sérieuse récession économique mondiale qui a accru la vulnérabilité de nombreux pays en développement et exacerbé le chômage, la pauvreté, la faim et l’insécurité.
Cet exemple illustre à quel point nous vivons dans un monde interconnecté. Il nous rappelle que d’autres questions, telles que le changement climatique, la crise alimentaire, la migration, les pandémies, le terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive, ne s’arrêtent pas aux frontières natio­nales. Faire face à ce genre de défis globaux demande une action déterminée et coordonnée aux niveaux national, régional et international. La coopération internationale est devenue vitale. L’ONU est le lieu où une telle coopération est mise en œuvre. Aujourd’hui, le monde a plus que jamais besoin de l’ONU.
L’ONU doit poursuivre sur le chemin de la réforme afin de renforcer sa légitimité. Parallèlement, les échanges entre les ­Nations Unies et d’autres forums tels que le G20 qui se réunit aujourd’hui même doivent être renforcés. Le G20 est devenu une tribune où des questions d’importance mondiale sont discutées. Ce développement ne doit pas se faire au détriment d’autres pays ou institutions globales comme les Nations Unies. Le G20 manque de légitimité et ne dispose pas de procédures transparentes pour décider des sanctions. Les membres du G20 eux-mêmes ne sont pas soumis au même type d’examen. La Suisse préconise une égalité de traitement et une meilleure consultation entre les non-membres du G20.
M. le Président, Mesdames et Messieurs,
La crise économique et financière nous préoccupe tous. Les gouvernements et les banques centrales ont mis en place d’impressionnantes mesures de stabilisation. Toutefois, la taille de ces plans ne résout pas tout. Ce qui compte est la qualité de l’effort. L’activité économique doit revenir à des valeurs et à des vertus fondamentales. Elle doit être viable économiquement, socialement et du point de vue de l’environnement. Par l’intermédiaire d’institutions comme le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et le PNUD, l’ONU dispose des connaissances et des instruments nécessaires pour combattre la crise financière et économique. Il est important de s’assurer que les voix de ces institutions soient entendues au sein du G20.
La crise actuelle a parfois été utilisée par certains pour remettre en cause l’économie de marché et la globalisation. Je ne conteste pas le besoin de réforme, les échecs et les abus ayant été trop grands pour être ignorés. Nous devons toutefois nous rappeler que c’est également grâce à l’ordre économique libéral et à l’ouverture des marchés qu’une bonne partie de la population mondiale est sortie de la pauvreté. Dans cette perspective, nous partageons les préoccupations de ceux qui considèrent que la tendance actuelle au protectionnisme nous mènera droit au désastre. Mon pays salue dès lors l’appel à la conclusion du cycle de Doha exprimé lors de la conférence de l’ONU sur la crise économique et financière.
M. le Président, Mesdames et Messieurs,
Les populations des pays en développement ont été particulièrement touchées par la crise économique et financière. Le risque est grand que la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement prenne du retard. La Suisse, pour sa part, a promis de maintenir le niveau de son aide malgré des contraintes budgétaires importantes. Tant les pays en développement que les pays développés sont responsables de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement. La mission des premiers est de mettre en pratique des réformes économiques et sociales pour assurer la «bonne gouvernance». Les seconds ont pour tâche de soutenir ces efforts de façon prévisible et fiable. L’année prochaine, la conférence de l’ONU marquant le dixième anniversaire de la Déclaration du Millénaire nous donnera l’occasion d’apporter un nouveau souffle à cette collaboration et d’améliorer l’efficacité de l’aide au développement.
M. le Président, Mesdames et Messieurs,
Le développement durable doit aussi être notre principe directeur pour combattre le changement climatique. La Conférence de Copenhague sur le changement climatique doit déboucher sur un succès. La Suisse veut et peut montrer l’exemple. Nous allons atteindre nos objectifs de réduction des émissions de CO2 en 2012. Pour la période allant jusqu’en 2020, nous sommes prêts à réduire nos émissions de CO2 de 20%. A l’échelle mondiale, les coûts des adaptations aux changements climatiques devraient atteindre plusieurs dizaines de milliards de dollars par an, dont plus de la moitié à la charge des pays en développement. La Suisse propose la création d’une taxe CO2 à l’échelle mondiale fondée sur le principe du pollueur-payeur afin de faire face à ces nouveaux besoins.
M. le Président, Mesdames et Messieurs,
De nombreux conflits violents affectent notre planète, mettant hors de portée pour trop de personnes une vie de dignité, de paix et de sécurité. L’ONU a une légitimité pour jouer un rôle actif dans la prévention des conflits, la médiation, la protection des civils, le maintien et la consolidation de la paix. Mon pays salue l’engagement accru de l’ONU dans ces domaines et préconise surtout le renforcement des capacités de prévention et de médiation du système onusien. La Suisse est également active dans le domaine de la consolidation de la paix. Nous avons en effet endossé la présidence de la Réunion spécifique sur le Burundi de la Commission de consolidation de la paix et nous allons poursuivre notre initiative sur la Violence Armée et le Développement.
Nous allons célébrer cette année le 60e anniversaire des Conventions de Genève. Depuis leur création, les Conventions ont établi des règles indispensables pour des situations de conflit armé. De nouvelles formes de conflits armés ainsi que de nouveaux moyens et méthodes de guerres rendent toujours plus difficile le respect de ces règles. Il est inacceptable que les populations civiles soient si souvent la cible d’attaques délibérées. Il est également inacceptable que l’accès rapide et sans entraves aux populations dans le besoin soit si souvent refusé au personnel humanitaire. Afin d’identifier les moyens pour améliorer le respect des Conventions de Genève, la Suisse organisera une rencontre ministérielle ici à New York ce samedi. En novembre, nous accueillerons une conférence internationale d’experts à Genève ouverte à tous les Etats parties aux Conventions de Genève. Cette conférence portera sur les défis présents et futurs auquel le droit international humanitaire doit répondre.
M. le Président, Mesdames et Messieurs,
La dignité humaine est un droit inaliénable de tous les êtres humains, quels que soient leur genre, leur origine ou leur religion. Le Conseil des droits de l’homme est le forum principal pour discuter des droits de l’homme à l’ONU. Tant les procédures spéciales que l’examen périodique universel ont prouvé leur efficacité en tant qu’instruments dans la promotion et la protection des droits de l’homme. Toutefois, nombreux sont les défis qu’il reste à relever. La Suisse continuera à travailler avec détermination pour un Conseil des droits de l’homme efficace et présentera sa candidature pour un second mandat en 2010. La protection des droits de l’homme, tout comme la promotion de la démocratie et le renforcement des règles de droit, constitueront également les priorités de la présidence de la Suisse au Conseil de l’Europe de novembre 2009 à mai 2010. Sous la présidence suisse, des efforts seront consentis pour améliorer la coopération entre l’ONU et le Conseil de l’Europe.
M. le Président, Mesdames et Messieurs,
2010 sera une année symbolique pour l’ONU. Cinq ans auront passé depuis l’adoption du Document final du Sommet mondial de 2005. Dix ans se seront écoulés depuis la signature de la Déclaration du Millénaire. Le Sommet de l’année prochaine offrira une opportunité unique pour analyser l’état de la mise en œuvre de ces déclarations et pour initier de nouvelles réformes plus complètes. Ces étapes sont nécessaires car seule une ONU réformée sera à même de répondre de manière appropriée au défis globaux. Dans ce contexte, j’ai l’honneur de vous annoncer une candidature suisse à la présidence de la 65e session de l’Assemblée générale en la personne de Joseph Deiss, ancien Président de la Confédération.
M. le Président, Mesdames et Messieurs,
Les défis à relever sont grands. Mais il ne faut pas céder au pessimisme. Au cours de l’histoire, l’être humain a démontré à plusieurs reprises sa capacité à accomplir de grandes actions avec courage, imagination et détermination. L’écrivain suisse Max Frisch disait : «Une crise peut être un état productif. Il suffit d’en retirer l’arrière-goût du désastre». Je partage entièrement cette affirmation. Soyons productifs et saisissons l’opportunité de créer un monde prospère, juste, pacifique et durable.
Je vous remercie de votre attention.    •

Source: www.admin.ch