Une part d’histoire culturelle suisseL’importance du musée en plein air de Ballenberg pour la Suisse d’aujourd’huipar Thomas KaiserLorsqu’on visite le musée en plein air au Ballenberg, on vit un moment impressionnant et à long terme. Ce moment est d’autant plus fort le 1er-Août. Les discours prononcés dans un ensemble culturel helvétique renforcent ce caractère imposant qui nous traverse l’âme – c’est ce que nous avons vécu cette année. Le musée de Ballenberg n’est pas une «Suisse miniature», mais sur une surface de 66 ha le visiteur reçoit une impression de l’art de la construction et de l’artisanat traditionnel des Confédérés au cours des presque derniers 700 ans.1 Respect et profonde estime obligent devant les résultats de nos ancêtres. Il semble qu’on ait perdu la capacité d’une vue globaleOn peut à peine imaginer, avec nos standards actuels et nos possibilités techniques, ce que les gens de l’époque avaient réalisé. Lorsqu’on construit aujourd’hui une maison ou une grange c’est très rarement pour cent ans ou deux cents, voire trois cents. Généralement, les maisons d’habitation, les bâtiments pour bureaux ou d’autres constructions modernes sont déjà démolis après 20, 30, ou 40 ans, du fait que les règlements d’utilisation ont été modifiés ou parce qu’on a utilisé des matériaux de construction qui se sont révélés avec le temps toxiques. Dans l’agriculture il faut souvent remplacer les vieilles étables, trop petites de quelques centimètres par rapport aux normes de l’UE. Il faut soit les détruire soit les modifier. On n’a plus une vue d’ensemble comme c’était le cas il y a trois cents ou quatre cents ans, tout doit aller très vite et ne durer que peu de temps. Ainsi, les générations suivantes ne pourront pas jouir d’un héritage de maisons si typiques et si bien entretenues. Ressentir l’esprit du passéL’utilisation du matériel de construction montre que les maisons en bois tiennent aussi longtemps que celles en pierre. Le volume des maisons était il y a 300 ans semblable à celui d’aujourd’hui, exprimant une certaine aisance, bien que ne correspondant pas forcément à la situation d’aujourd’hui. A côté des fermes et des écuries, qui selon les régions se présentaient de façon fort différente quant à leur architecture, on constate que la cuisine et la pièce principale représentaient le centre. La vie quotidienne s’y déroulait. Selon l’époque c’était un poêle de faïence ou un feu ouvert qui réchauffait et servait en même temps à fumer les saucisses. On maintient encore aujourd’hui cette façon de conserver à Ballenberg et l’odeur de cette viande fumée aiguise l’appétit. Les autres chambres de la maison n’étaient pas chauffées, mais bénéficiaient de la chaleur montante. Le principe des portes ouvertes permet au visiteur de découvrir la façon de vivre d’antan. En pénétrant dans les pièces on croirait ressentir l’esprit de ce temps passé. Ne pas se défaire des talents héritésLes visiteurs peuvent, en plus de contempler les nombreux bâtiments et leurs installations intérieures, prendre connaissances des capacités artisanales d’alors. On y trouve, entre autre, une menuiserie, mais aussi une droguerie, et toutes sortes de raretés à admirer. Parfois, on peut se lancer soi-même dans une activité et tenter de travailler un morceau de bois ou un tissu. Il est sensé de ne pas oublier les capacités transmises, même dans notre époque de technique digitale, dépendant des capacités de chacun et chacune, de les entretenir et de les transmettre. Au cas où on serait privé d’électricité, pour quelque raison que ce soit, ou si d’autres sources d’énergie devenaient rares, alors toutes ses capacités seraient les bienvenues. On peut apprendre de la part des collaborateurs du musée de Ballenberg les détails concernant la nourriture, les boissons, la vie, la cuisine, etc. le tout expliqué sur place de façon exacte et particulièrement intéressante. Qu’il s’agisse de fumage de saucisses, du séchage de lin, de l’élevage de vers à soie, la fabrication de fromage, le recouvrement de toits de chaume, et bien d’autres choses, le savoir est immense. De même concernant l’architecture et l’âge des bâtiments, on peut en apprendre beaucoup grâce à cet enseignement. L’autonomie des communes permet des solutions proches des citoyensMalgré une journée chargée, pleine d’impressions, on n’a pu voir qu’une partie de tout ce qu’il y a à visiter à Ballenberg. Ce n’est qu’un petit aspect de la variété culturelle de la Suisse traditionnelle qui peut être saisi en une journée et c’est une variété qui se reflète finalement dans l’organisation de la vie politique du pays. En fait partie en premier lieu le fédéralisme, ce que Ruedi Lustenberger a cité dans son discours du 1er-Août. Cette diversité a pu se développer du fait de la large souveraineté politique et culturelle des cantons. La large autonomie des communes permet de trouver des solutions proches des gens, ce qui permet aux populations de s’identifier et d’être satisfaites. Maîtriser ensemble les tâches en suspensEn se promenant les yeux ouverts à Ballenberg on peut vivre d’autres événements. La vie des humains ne se réduit pas au profit maximum et aux besoins de l’économie. A l’origine il s’agissait de se nourrir et d’assurer sa survie, et non pas de s’en mettre plein les poches. Il était question de solidarité pour maîtriser les événements. Un des visiteurs raconta que, dans ses jeunes années, il devait aider, en été, à la fenaison, alors que ses camarades d’école pouvaient aller se baigner. Il en était consterné. Mais plus tard, en se remémorant, il avait dû changer d’avis, après avoir compris que ces travaux en commun avec ses frères et sœurs et avec les adultes, les prises des quatre heures en commun, de même que le chargement de la récolte l’avaient finalement contenté et rempli de fierté, ce qu’alors il n’avait pas voulu reconnaître. Ainsi la visite de Ballenberg permet de réveiller des souvenirs personnels, ce qui incite à réfléchir à sa condition actuelle. Béatrice Tobler qui travaille depuis 2012 au musée de Ballenberg et mène ad interim la direction scientifique s’exprime de la sorte: «La façon de vivre et la stratégie des humains des époques précédentes peuvent nous inspirer pour aujourd’hui et pour l’avenir. Je pense aux techniques artisanales et architecturales, mais aussi à notre façon de traiter les ressources. Les adages sont la résistance, Urban gardening, Recycling et l’entraide entre voisins.»7 1 Edwin Huwyler: Schweizerisches Freilichtmuseum für ländliche Kultur, Bern 2008, p. 38 Cela vaut la peine d’entreprendre une visite avec ses élèves. Dans la mesure où on voudrait vivre quelque chose de particulier, on n’a que le choix. Ainsi il y a des journées à thèmes pour les classes et les groupes, mais aussi des formations continues. Certaines journées consacrées à des thèmes permettent au visiteur de se replonger dans les temps anciens et d’acquérir des habiletés traditionnelles. On peut participer activement à la cuisson du pain, à tailler le bois et même à la construction de maisons. Pour de plus amples informations cf. www.ballenberg.ch |