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Horizons et debats  >  archives  >  2013  >  N°39, 23 décembre 2013  >  FATCA: «Les véritables victimes sont la souveraineté nationale et les droits des citoyens et des consommateurs» [Imprimer]

FATCA: «Les véritables victimes sont la souveraineté nationale et les droits des citoyens et des consommateurs»

Interview de James George Jatras*, J. D., Washington D.C.

ef. En Amérique l’opposition s’anime aussi contre l’accord monstrueux de FATCA. Il y a de l’orage dans l’air: 6 associations bancaires américaines portent plainte contre les autorités fiscales américaines. La Chine, la Russie et d’autres pays s’opposent à FATCA, qui force d’autres pays à accepter la législation américaine. Le Département américain des Finances a déjà repoussé (pour la troisième fois) la date de mise en vigueur, parce que de nombreux pays ne veulent – à juste titre – pas y participer. Il y a trois ans, James G. Jatras, juriste et spécialiste des relations internationales, a pris l’initiative de fonder un forum sur son site Internet intitulé «RepealFatca» informant de la résistance contre FATCA dans son propre pays, mais aussi dans d’autres.
Horizons et débats s’est entretenu avec cet avocat de Washington.

Horizons et débats: Comment jugez-vous l’importance politique de FATCA – au niveau national et international?

James Jatras: On ne peut pas assez estimer l’importance de FATCA. Derrière l’image erronée selon laquelle FATCA est une «loi d’application fiscale», il se cache le fait qu’il s’agit de la plus massive extension d’une sur-réglementation extraterritoriale qui n’ait jamais été exercée par un pays. Le plus étonnant est que même le Département de la Justice des Etats-Unis (les autorités fiscales) ait avoué dans un dossier juridique récent, que les Etats-Unis n’avaient pas la compétence juridique d’exiger des institutions financières étrangères (c’est-à-dire non-américaines, donc aussi suisses) la conformité avec FATCA et que c’était la raison pour laquelle ils menaçaient de prendre des mesures de rétorsion extrajudiciaires (désignées par euphémisme «retenue à la source»).

«A partir de 2014, FATCA exige des banques étrangères entre autre de rapporter au service [il s’agit de l’administration fiscale américaine IRS] combien d’intérêts elles versent aux citoyens et habitants américains. […] Pour animer les banques étrangères, qui se situent sinon hors de la juridiction des Etats-Unis, à remplir les exigences de ce rapport, FATCA impose un retenue à la source de 30% sur les versements que des institutions américaines effectuent en faveur de banques non conformes.»1

Néanmoins, des institutions bancaires dans de nombreux pays sont convaincues (ou ont été convaincues par des conseillers, des avocats, des conseillers fiscaux et des entreprises de logiciels, qui espèrent d’énormes profits issus de la «vente» de la conformité avec FATCA [en anglais «compliance», c’est-à-dire de l’exécution de FATCA] – les coûts se répercutant sur les consommateurs), qu’elles n’ont, en raison des menaces de mesures de rétorsion, pas d’autres choix que de donner leur accord. Aussi nuisible que FATCA serait pour les principes de la protection de la sphère privée et de la sécurité de l’information, la grande victime au niveau mondial serait le principe de souveraineté nationale. C’est pourquoi le ministre des Affaires étrangères russe a raison de faire valoir que FATCA «est essentiellement extraterritorial et viole ainsi le principe de l’égalité souveraine. Il demande que les instituts de crédit étrangers suivent le droit américain.» Selon l’article 2 de la Chartre de l’ONU, «le principe de l’égalité souveraine» est fondamental pour le respect mutuel entre les Etats. En fait, FATCA abolirait cela.

Comment vous expliquez-vous l’attitude passive de nombreux Etats face à l’accord FATCA?

Comme je l’ai dit précédemment, l’«industrie de la conformité» a beaucoup œuvré pour convaincre ses clients (banques et autres institutions financières), qu’elles n’avaient pas d’autres choix que de remplir les conditions de FATCA, et de leur côté, ces institutions exercent de la pression sur les gouvernements pour conclure des accords interétatiques (Intergovernmental Agreements IGAs), afin de «faciliter» l’inévitable. Mais cette «stratégie» erronée se base sur de fausses hypothèses. Premièrement, elle part de l’idée que le Département américain des Finances pourrait poursuivre l’application unilatérale de FATCA sans ces accords interétatiques (IGAs). Ceci n’est pourtant pas le cas. Dans une requête du Département des Finances adressée au Congrès en avril 2013, le Département avoue que:

«Dans de nombreux cas, le droit étranger empêcherait les institutions financières étrangères d’appliquer [FATCA]. […] De tels obstacles juridiques peuvent être contournés au moyen d’accords bilatéraux, par lesquels les gouvernements étrangers acceptent de livrer au IRS les informations exigées.»2

Bref, le Département des Finances sait qu’il ne peut pas appliquer FATCA directement contre des centaines de milliers d’institutions qui sont entravées dans l’exécution de cette loi par leurs lois nationales relatives notamment à la sphère privée, la protection des données et la non-discrimination. Ces mesures de protection doivent être mises hors vigueur et c’est le véritable motif pour les accords interétatiques. Sans ces IGAs, et même les partisans de FATCA le concèdent, cette loi est, telle qu’elle est formulée, «complètement inaccessible».
Deuxièmement, beaucoup d’Etats étrangers et les industries d’autres Etats ne semblent pas comprendre le fait que les Etats-Unis n’ont pas de système parlementaire. Il n’existe pas de «majorité parlementaire» aux Etats-Unis qui est décidée à faire passer FATCA. Ce n’est que de l’argent et du temps perdu que de vouloir discuter avec le Département des Finances sur ses doutes concernant FATCA. Aucune branche de l’économie n’a mis des ressources à disposition pour expliquer au Congrès et à l’opinion publique ce que pose problème avec FATCA. Entre temps, je doute qu’un sénateur ou député du Congrès sur dix puisse vous dire ce qu’est FATCA, si on le lui demandait.
Troisièmement, les institutions suisses et autres institutions non-américaines – qui sollicitent leur gouvernement pour un accord interétatique (IGA), parce qu’elles croient qu’un tel accord les protègerait – ne sont apparemment pas conscientes du fait que les IGAs ne sont, selon le droit américain, pas des accords et n’offrent aucune protection contre des exigences financières ou des accès arbitraires aux données par FATCA. Tandis que les gouvernements non-américains doivent rendre leur droit national conforme à FATCA, les Etats-Unis n’ont rien à faire.3 En particulier, les Etats-Unis ne tiendront pas les promesses du Département des Finances pour une information mutuelle, car celui-ci n’est pas habilité à forcer des instituts financiers américains de livrer des informations mutuelles et le Congrès n’octroiera jamais une telle habilitation.4
Quatrièmement, les instituts financiers (et les gouvernements, qui réagissent à leurs doutes) ne semblent pas comprendre qu’ils ont encore une autre possibilité plus réaliste (et moins coûteuse) – c’est de s’engager pour l’abrogation de FATCA. Au cours des trois décennies, durant lesquelles j’ai fait mes propres expériences au sein du Secrétariat d’Etat américain, du Sénat et du secteur privé en tant que lobbyiste, je n’ai jamais rencontré un projet de loi dont on pourrait aussi facilement se débarrasser, à l’aide d’une stratégie bien coordonnée de relations gouvernementales et médiatiques, que ce projet de loi FATCA. Une telle stratégie coûterait une part minime de ce qui a déjà été dépensé et ce qu’on dépensera encore à l’avenir pour atteindre la conformité. Mais jusqu’à présent on n’a rien entrepris dans ce sens.

Dans quelle mesure un tel procédé est-il compatible avec la Constitution libérale des Etats-Unis?

Un conservateur connu a dit une fois, que ce qui était bien dans notre Constitution, c’était qu’elle ne représentait pas de danger pour notre forme actuelle de gouvernement.
Il est évident que FATCA n’est en aucune façon compatible avec l’idée américaine de constitutionnalité. C’est une des raisons principales qui a motivé le Sénateur Rand Paul du Kentucky – qui a déposé en mai 2013 une loi pour l’abrogation de FATCA – de bloquer des additifs aux accords fiscaux entre les Etats-Unis et la Suisse. Ceux-ci auraient permis de transmettre des informations privées entre gouvernements sur la seule base d’un «rapport sur des activités suspectes» («suspicious activity report» SAR) et non en raison d’un «cas probable» qu’un crime a été commis, ce qui est, selon le 4e article additif de notre Constitution, la condition préalable pour une perquisition. FATCA ne demande naturellement pas de perquisition, pas de SAR, rien du tout; uniquement des «indices», indiquant qu’on est une «US person», ce qui est un terme beaucoup plus vaste que celui de la citoyenneté américaine. Le terme comprend de nombreuses personnes, qui ont la nationalité d’autres pays (par exemple plus d’un million de citoyens canadiens), dont la plupart ne sait même pas que les Etats-Unis attendent d’eux qu’ils déposent une déclaration d’impôts.
Malheureusement, la mentalité créée par l’«Etat de conformité» («Compliance State») au cours des dernières décennies a peu à voir avec les traditions de la constitutionnalité américaine qui, même si elles ne sont pas encore mortes, sont en très mauvais état. La mentalité actuelle est la suivante: «Tu es sous surveillance indépendamment du fait que tu sois un fraudeur fiscal, un terroriste ou n’importe quoi d’autre; nous voulons tout savoir de toi et c’est à toi de prouver ton innocence. Si tu n’as rien à te reprocher, tu n’as rien à cacher.»
Et bien sûr, tout un chacun qui n’approuve pas cette «logique» – par exemple les banques suisses, qui ont l’idée folle de s’en tenir au droit suisse plutôt qu’au droit américain – doit recevoir une leçon. Voilà la raison pour les démarches du Département de la Justice (DOJ), plaçant pratiquement l’ensemble de la branche financière suisse sous le contrôle des règlementations américaines parce que quelques individus ont été impliqués dans des fraudes fiscales.

Toute cette affaire n’est-elle pas un moyen d’obtenir des informations privées des citoyens grâce à un accord «légal» sans devoir développer une énorme machinerie de surveillance?

En fin de compte, l’objectif est l’obéissance en soi. C’est l’aspect principal de FATCA (ou plutôt des exigences du Département de la Justice envers les banques): nous vous avons donné un ordre et vous devez obtempérer. Ils comptent sur le fait que vous, les Suisses, avez tellement peur d’être ruinés que vous allez faire tout ce qu’on vous demande et que vous n’envisagerez même pas de résister. Ils travaillent aussi dans l’attente, que votre «style suisse» réservé vous empêchera de défendre vos droits énergiquement. Ceci parce que ces gens – qui ne représentent pas «les Américains» au sens large, mais uniquement une poignée de bureaucrates – auraient de la peine à imposer leurs directives, si vous vous décidiez à résister.
L’obéissance est le but, la surveillance est le moyen. Selon le droit américain, les renseignements financiers obtenus à l’aide de FACTA, ne sont pas traité comme des renseignements fiscaux confidentiels – ils sont échangés avec les services secrets tels la NSA, la CIA etc.5 Selon les conditions des versions prétendument «mutuelles» des accords interétatiques (IGAs), signés par des fonctionnaires du Secrétariat d’Etat américain, de la Grande-Bretagne, de l’Allemagne et d’autres pays, les renseignements livrés au niveau gouvernemental (de gouvernement à gouvernement) devraient en fait être traités de manière confidentielle (bien que ces promesses ne sont pas convaincantes et que je pense que des avocats intelligents peuvent les contourner). Etant donné que la Suisse a signé la version non-mutuelle (non-réciproque) de ces accords, mêmes ces garanties cousues de fil blanc manquent entièrement.6

Est-ce que FATCA est outre un instrument d’espionnage financier également un instrument d’espionnage économique?

Il y a eu des suppositions que le vrai but de FATCA est d’anéantir les concurrents étrangers des banques américaines et de faire des Etats-Unis un paradis fiscal de premier plan. J’ai de la peine à le croire, ne serait-ce que parce que les bureaucrates américains ne pensent pas dans le sens d’un «patriotisme économique». Je crois qu’ils voient les renseignements financiers comme étant des informations primordiales pour enregistrer le comportement des gens afin de pouvoir les contrôler. C’est un but en soi. Dans cette mesure, je pense que la motivation ne repose pas vraiment dans l’élimination de la «fraude fiscale», car selon les estimations officielles du Congrès, FACTA permettrait de récupérer uniquement la somme d’environ 900 millions de dollars par an – un montant, qui suffit à notre gouvernement tout juste de financer ses dépenses pendant deux heures. L’application de FATCA coûtera probablement davantage qu’elle ne rapportera. Entre-temps, la chambre du commerce américano-suisse [Swiss-American Chamber of Commerce, amcham.ch] a estimé que le respect de FATCA coûterait au niveau mondial 1 à 2 billions de dollars. Ce ne sont pas des fonds fiscaux qui alimentent le Département américain des Finances, ce sont des frais que les consommateurs doivent débourser et qui disparaissent dans les poches de la même «industrie de conformité» qui fait croire aux banques que FACTA est «inévitable».7

Qu’est-ce qui vous a poussé à lancer un mouvement contre FATCA dans votre pays?

En septembre 2011, j’ai entendu parler de FATCA par l’intermédiaire de quelques avocats allemands. Auparavant, je n’en avais jamais entendu parler comme la toute grande majorité des habitants de ce pays.
J’ai commencé avec le site ­RepealFatca­.com pour deux raisons. Premièrement: en tant que spécialiste du lobbying professionnel et des médias, j’ai vu une opportunité de faire des affaires avec l’offre de meilleures prestations de service au profit de la branche concernée qui pourrait ainsi épargner d’immenses sommes d’argent. Ce serait beaucoup moins cher d’annuler FATCA plutôt que d’essayer de répondre à ses exigences. Il est décisif que FATCA est toujours encore pratiquement inconnu du public aux Etats-Unis. Il est donc nécessaire d’informer les centres d’influence de ce que j’appelle «la plus mauvaise loi, dont la plupart des Américains n’ont jamais entendu parler». A Washington, une telle activité demande de l’argent; mais les entreprises qui pourraient s’attendre à d’énormes économies si FATCA disparaissait, restent toujours fixées sur la conformité et sur le faux sentiment de sécurité que procure un accord interétatique (IGA).
Deuxièmement, je ne pouvais pas croire qu’un projet si absurde et couteux pourrait vraiment avancer. Pour moi, en tant qu’homme rationnel et Américain, il ne fait pas de sens de dépenser des milliards de dollars qui ne servent en rien l’Etat, mais qui violent la sphère privée de personnes innocentes (tandis que les vrais coupables ne se feront naturellement pas piéger puisque FATCA n’est pas conçu pour les attraper: dans l’ensemble de la loi FATCA, il n’y a aucun paragraphe qui vise les réelles activités de fraudes fiscales) et au cours de ce processus, les principes de la constitutionnalité américaine et de la souveraineté nationale sont pervertis.

Quelles sont les réactions à FATCA dans votre pays et dans d’autres pays? Le référendum populaire en Suisse, est-il un soutien pour votre mouvement?

Dans beaucoup de pays, il y a des citoyens qui ressentent la même chose que moi, peut-être encore de manière plus forte que moi puisque FATCA est dirigé directement contre leur droit de citoyen et de consommateur et contre la souveraineté de leur pays. A l’heure actuelle, les discussions les plus décisives ont lieu au Canada et en Suisse. Au Canada, qui est notre partenaire commercial le plus important et qui n’a pas encore signé d’accord interétatique, le gouvernement est de plus en plus critiqué par l’opposition à cause de ses négociations secrètes avec Washington pour conclure un accord interétatique qui signifierait une braderie de la souveraineté du pays et l’abolition des droits d’une partie considérable de la population.
Si en Suisse l’accord bilatéral était annulé par le référendum, ce serait une entrave importante à la tentative du Département des Finances de signer de tels accords avec d’autres pays. Il est évident que le gouvernement suisse avait hâte à signer un accord bilatéral (la version qui ne juge pas même nécessaire de promettre la réciprocité, une promesse que les Etats-Unis ne tiendraient de toute façon pas), étant donné que le Département de Justice américain lui avait déjà causé des frayeurs. A ce point, il ne voit plus d’autre «stratégie» – si l’on peut le nommer ainsi – que de capituler et de demander grâce. Ce n’est pas un secret que cette politique reflète également les calculs des grandes banques qui comptent ainsi pouvoir mieux supporter les coûts (comparé aux concurrents de moindre importance). Pour ces banques, le patriotisme ne fait pas partie des «valeurs morales des banquiers». (On retrouve la même situation dans d’autres pays tel le Canada, où ce sont également les grandes banques qui poussent à conclure un accord interétatique). La question que les citoyens suisses lambda et peut-être les plus petits instituts financiers doivent se poser est de savoir s’ils veulent défendre leurs intérêts à eux et ceux de leur pays? En Suisse, les citoyens doivent signer le référendum et refuser l’accord lors de la votation populaire qui suivra. Les institutions financières suisses doivent aider à faire aboutir le référendum, doivent réfuter l’ultimatum du Département de Justice américain et nous aider à nous débarrasser de FATCA ici à Washington.
Dans d’autres pays, la vitesse avec laquelle de tels accords sont conclus est étonnamment lente. Ces signatures, il faut s’en souvenir, sont absolument nécessaires (pour le Département des Finances) pour que FATCA puisse entrer en vigueur. Malheureusement, les perspectives d’avenir à long terme ne sont pas roses puisque chaque institut concerné dépense des millions de dollars (et dans le cas des grandes banques plus d’une centaine de millions de dollars) pour satisfaire aux exigences de FATCA, mais rien pour tenter de se débarrasser de cette loi. Il est triste de voir à quel point «l’information a été empoisonnée» (une allusion à la technique de guerre de l’empoisonnement de puits) par les «vendeurs de conformité» qui ne connaissent souvent que très peu le système politique américain et qui ont assuré à leurs clients que l’abolition de FATCA n’était pas une option envisageable – c’est la raison pour laquelle ils ne l’ont pas même tenté. S’ils étaient les seules victimes, on pourrait dire avec raison qu’ils l’ont bien mérité puisqu’ils ont accepté un mauvais conseil. Mais les véritables victimes, sont la souveraineté nationale et les droits des citoyens et des consommateurs.

Quelles sont les réactions dans votre pays quant à l’espionnage au niveau mondial par la NSA et par d’autres services secrets (pas seulement américains)?

Comme vous pouvez l’imaginer, le scandale d’espionnage est une nouvelle très importante dans notre pays. L’opinion publique est partagée: il y a ceux qui pensent que les services secrets «ne font que tenter de de nous protéger», les autres par contre pensent (comme moi) que l’on devrait, si l’on veut attraper les vrais terroristes (ou les fraudeurs fiscaux), les poursuivre et laisser tous les autres tranquilles.
Revenons à FATCA: Une autre réelle déception – et un autre signe prouvant qu’il est urgent de trouver des ressources pour pouvoir informer et instruire les gens – est que même des groupements qui se veulent gardiens de la sphère privée et qui sont actifs face aux problèmes de la NSA, ne s’occupent guère de la loi FATCA. Peut-être parce que la loi ne vise pas les Américains à l’intérieur des Etats-Unis (presque personne ici ne sait ce qu’est un «Expat») et parce que cette loi a été vendue comme instrument contre la «fraude fiscale» par l’«industrie de conformité», il est difficile de faire comprendre aux gens que FATCA résulte de la même manière de penser que le programme de la NSA: saisis les données des innocents et tu retrouveras peut-être quelque part celles des crapules. Contrairement au fait qu’on a déboursé des millions en faveur des multinationales concernées pour qu’elles transmettent les enregistrements d’entretiens téléphoniques et de courriels à la NSA, les banques étrangères devront dépenser des sommes colossales de leur propre argent pour avoir le privilège de se soumettre, elles-mêmes et leurs clients, à la violation de la sphère privée.8
Etant donné qu’il y a tant de méconnaissance aux Etats-Unis concernant FATCA, il est difficile de faire comprendre aux gens que les données financières d’un individu sont des données personnelles. La teneur des informations financières est beaucoup plus importante pour des agences importunes sous l’aspect de la surveillance – et peut-être bientôt du contrôle – de la vie des gens qui croient être des citoyens libres et indépendants de leurs pays respectifs, que toutes ces bêtises et le narcissisme sur les forums de discussion sur Internet, les blogs, les blogs sociaux, le microblogging, les Wikis, les réseaux sociaux, les podcasts, la reconnaissance des visages et d’autres contenus électroniques dont nous avons pris l’habitude de les définir comme «personnels».

Nous vous remercions de cet entretien.    •

Interview réalisée par Eva-Maria Föllmer-Müller.

1    Florida Bankers Association and Texas Bankers Association v. United States Department of Treasury, et al., 1:13-cv-00529-JEB, United States District Court for the District of Columbia, Defendants’ Motion for Summary Judgment, November 8, 2013, p. 8; Mise en évidence par l’auteur
2    Analytical Perspectives to the Fiscal Year 2014 Budget, page 202
3    De plus amples détails se trouvent sur ­
www.repealfatca.com «FATCA Intergovernmental Agreement Exposed as Bad Deal for ‹Partner› Countries.»
4    De plus amples détails se trouvent sur
www.repealfatca.com: «It’s Official: There Will Be No American FATCA ‹Reciprocity›»
5    cf. www.repealfatca.com: «FATCA: a Tool of the Electronic Surveillance State»
6    «Accord entre la Suisse et les Etats-Unis d’Amérique sur leur coopération visant à faciliter la mise en œuvre du FATCA», www.news.admin.ch/­NSBSubscriber/message/attachments/31587.pdf
7    cf. www.amcham.ch/members_interests/­p_business_ch.asp?s=7&c=1  
8    cf. «The US Surveillance Dragnet Extends to Foreign Bank Data, Too.», http://motherboard.vice.com/blog/the-us-surveillance-dragnet-extends-to-foreign-bank-data-too

*    James George Jatras est juriste et spécialiste en relations internationales, affaires gouvernementales et sciences politiques des législations. De 1985 à 2002, il a travaillé en tant que conseiller et analyste politique de plusieurs membres républicains du Sénat américain. De 1979 à 1985, il a été fonctionnaire au sein du Secrétariat d’Etat américain. Il est membre de la chambre des avocats de la Cour suprême des Etats-Unis et des chambres d'avocats de Pennsylvanie et du district de Columbia. Il fait des conférences et publie des articles sur divers sujets dans les médias papier et en ligne. Il s’exprime régulièrement au sujet de la loi FATCA, notamment concernant les aspects législatifs et politiques, et il dirige le site Internet www.­repealfatca.com. James Jatras est marié et a deux filles adultes et deux petits-enfants. 

Signez et faites signez le référendum

Après l’approbation de l’accord FATCA par l’Assemblée fédérale, le référendum a été lancé le 8 octobre 2013.
Un comité citoyen hors parti s’engage pour récolter les signatures nécessaires. Il a besoin de votre soutien.
La date de l’expiration du délai référendaire est le 16 janvier 2014.
Vous trouverez de plus amples informations, un argumentaire et les listes de signatures sur le site:
www.stop-fatca.ch