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Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°10, 10 mars 2008  >  Quelques thèses inspirées de l’histoire au sujet de la réforme des communes dans le canton d’Argovie [Imprimer]

Quelques thèses inspirées de l’histoire au sujet de la réforme des communes dans le canton d’Argovie

par René Roca, conseiller communal et historien

Remarque historique: Ce n’est pas la première fois dans l’histoire que la commune de Wohlenschwil en Argovie est le point de départ d’un mouvement d’opposition important. Le 7 novembre 1830, entre 3000 et 4000 personnes ont participé à une réunion populaire à Wohlenschwil. Le résultat de ce mouvement d’opposition fut la première Constitution démocratique du jeune canton d’Argovie. A ­l’époque déjà comme aujourd’hui encore, la notion d’opposition ne signifiait pas l’immobilité et la préservation à tout prix de structures ob­solètes, mais le progrès sous forme de la recherche de meilleures solutions, en l’occurrence de meilleures réformes communales et d’une véritable coopération entre les communes.

1.    La Suisse se composait, sous l’Ancien régime déjà (donc avant 1798), de communes formées sans exception selon le modèle coopératif. Toutes ces communes, peu importe s’il s’agissait de villes ou villages, étaient fondées sur un noyau de citoyens jouissant de droits autonomes considérables. Ces communes développèrent une véritable culture de résistance contre toute tentative de leur enlever ou réduire cette «Ancienne liberté». Aujourd’hui, il est temps de renouer avec cette tradition de résistance.
2.    Au cours du siècle des ­Lumières (XVIIIe ­siècle) l’«ancienne» et la «nouvelle» liberté communale s’unirent – le modèle coopératif fut complété avec les idées de l’égalité et de la démocratie. Pendant la République helvétique (1798 à 1803), les cercles dominants essayèrent de réduire l’autonomie communale. Ils n’atteignirent que partiellement ce but. La tentative de transformer la Suisse en un Etat unitaire échoua.
        Les tentatives actuelles de fusions de communes ne font, en principe, que réi­térer les erreurs de la République helvé­tique: Le mépris de structures communales judicieuses et développées historiquement; l’imposition de réformes par la contrainte et les centralisations absurdes aboutissant à la création d’un appareil bureaucratique coûteux et éloigné des citoyens.
3.    Au XIXe siècle, des associations telles que les cercles de lecture et le journalisme naissant furent des conditions essentielles pour faire évoluer la démocratie. Aujourd’hui, par contre, un débat constructif sur les fusions de communes fait défaut. Le ­Conseil d’Etat argovien essaie de manipuler l’opinion publique à l’aide de sondages coûteux. Souvent, les résultats de tels sondages sont répandus de manière peu critique et incomplète comme par exemple l’affirmation qu’au cours des ­quatre dernières années, le taux d’acceptation des fusions de communes aurait considérablement augmenté dans le canton d’Argovie. Celui qui analyse ces sondages soigneusement retrouve une réalité bien différente: La plupart des citoyennes et citoyens déclare être hautement satisfaits des conditions actuelles. Les structures communales sont saines et intactes. Les services fournis par les communes ne font guère l’objet de réclamations. Mais le gouvernement et les bureaux de communication en tirent des affirmations tendancieuses qui ne se fondent pas sur des bases sérieuses. Le but envisagé est manifeste: on veut affaiblir la résistance de la population (Tout ce qui est bien vient d’en-haut.)
4.    Avec l’Etat fédéral de 1848 on trouva pour les communes un compromis idéal. Au sein de l’Etat fédéral l’autonomie des communes put être préservée en grande partie. L’Etat démocratique suisse se forma du bas vers le haut. Même si la Constitution fédérale de 1848 subit à deux reprises une révision totale, l’autonomie communale y est restée un pilier de notre système politique et doit être renforcée pour les tâches futures (notamment en temps de crise). Cela ne se fera décidément pas à travers la réalisation de la réforme communale prévue dans notre canton d’Argovie.
5.    Les revendications en vue de davantage de démocratie directe survenues au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, vinrent principalement des communes. Les opposants les plus acharnés de la démocratie directe et de l’autonomie communale, furent à l’époque comme en partie aussi aujourd’hui, les radicaux. C’étaient en effet les radicaux qui se méfiaient du peuple et qui ne commencèrent que peu à peu à apprécier les avantages de la démocratie directe et de l’autonomie communale. Les partisans en étaient à l’époque, les conservateurs et les socialistes, poussés évidemment par des mobiles bien distincts. Le phénomène actuel, que la plupart des partis politiques consentent à démanteler notre démocratie de base ancrée dans les communes, ne peut s’expliquer que par leur goût de la centralisation et leur aspiration à exercer le pouvoir. Il faut que nous résistions à ces tendances!
6.    Au cours des derniers 160 ans, les communes suisses ont évolué d’une manière impressionnante, relevant continuellement de nouveaux défis. Aujourd’hui, ces potentiels sont crûment sous-estimés. Les «petits espaces autonomes», c’est-à-dire les communes actuelles, sont prêts et capables de trouver des solutions raisonnables aux problèmes pressants. Il importe qu’ils puissent le faire sans contraintes et manipulations par les autorités supérieures.    •

*    Ces 6 thèses suivent l’argumentation du projet de réforme des communes dans le canton d’Argovie.

Résolution de Wohlenschwil

Oui à un avenir démocratique et autodéterminé!

Le modèle suisse qui a fait ses preuves, se base sur des communes autonomes, démocratiques et localement ancrées. Si la «Réforme des communes dans le canton d’Argovie» (GeRAG) se réalise comme elle a été planifiée, le canton sera privé de ses ­meilleures forces. Or, l’avenir ne pourra être maîtrisé qu’avec des hommes et des femmes qui participent de leur plein gré à résoudre les tâches qui se posent.

Oui au fédéralisme suisse, fort de son système de subsidiarité équilibré et de sa grande autonomie communale!

La subsidiarité constitue un principe fondamental dans le concept de notre Etat. Cela signifie que dans la hiérarchie administrative le niveau supérieur doit s’occuper de tout ce qui dépasse les forces du niveau inférieur. Aujourd’hui, les communes sont capables de résoudre leurs tâches elles-mêmes. Mais le canton renvoie toujours plus de tâches sur les communes. Il leur prescrit jusque dans les détails, ce qu’ils doivent faire, tout en exigeant d’en porter eux-mêmes les frais. C’est ainsi que le canton méprise de plus en plus le principe de subsidiarité. La «GeRAG» continue à transmettre les compétences au canton, favorisant ainsi la centralisation.

Non à la désolidarisation organisée et à la manipulation par l’Etat!

Par l’abolition du principe de la prise en compte de la demande de base, les projets de «réformes des communes» mettent en question la péréquation financière et la compensation des charges cantonales. C’est précisément cette solidarité qu’ils veulent détruire, elle qui garantit le succès du modèle suisse et qui nous a apporté l’équilibre et la paix sociale.
Les conséquences financières de la «GeRAG» s’annoncent catastrophiques pour toutes les communes. Il s’agit donc d’empêcher de telles «réformes».
Le gouvernement argovien essaie de faire passer cette réforme communale au forceps, s’appuyant sur un appareil bureaucratique coûteux. Par la création ou l’extension de bases juridiques, les autorités cantonales tentent d’éliminer tout ce qui pourrait former un obstacle à la fusion prévue. Le gouvernement tente d’acheter le soutien des communes en leur promettant des fonds. Mais ainsi aucun problème ne trouvera de solution durable. Si deux ou plusieurs communes décident de fusionner, il faut que cela se fasse de leur plein gré et sans aucune contrainte extérieure.

Non aux fusions de communes forcées!

Si on recourt à des mesures contraignantes on ne produira que des perdants. Qui­conque essaie de réaliser des fusions communales par la contrainte ne fait qu’avouer qu’il manque d’arguments convaincants. Pour affronter les tâches futures de manière flexible, il faut des réformes communales bien méditées, mais certainement pas un projet tel la «GeRAG»!