«Toute intervention commune avec l’OTAN est problématique» – «entourloupe à la frontière de la Russie?»par Thomas KaiserLundi 26 mai, aux nouvelles de six heures, toute personne levée tôt apprenait avec étonnement que les forces aériennes suisses participaient avec plusieurs avions de combats à des manœuvres internationales en Suède, en Norvège et en Finlande, donc près de la frontière russe. Ce qui est choquant, c’est qu’à côté de la Norvège cinq autres Etats membres de l’OTAN prenaient part à ces manœuvres, ressenties comme une provocation par la Russie. Le nom significatif de ces manœuvres est «Arctic Challenge Exercise», désignées sous l’euphémisme d’«exercices de défense multinationale». Zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Russie?C’est donc ainsi qu’une zone d’exclusion aérienne de l’OTAN se présente. Et les forces aériennes suisses participent à un tel entraînement avec 8 avions de combats avec des Etats membres de l’OTAN que sont la Norvège, les Pays-Bas, l’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis. Ce sont tous des Etats ayant participé ces deux dernières décennies à des guerres, en partie en violation du droit international, dont la plus honteuse était la guerre d’agression contre la Serbie en 1999. «L’OTAN s’entraîne pour la défense de l’Arctique contre la Russie»Le président de la Commission de politique extérieure Carlo Sommaruga (PS/GE) n’est pas opposé à des actions internationales, si elles sont bilatérales ou sous le mandat de l’ONU: «Le fait que la Suisse participe à des manœuvres internationales avec d’autres pays tels que l’Autriche, la Suède ou d’autres pays nordiques n’est pas nouveau. Mais l’intégration de la Suisse dans un exercice de l’OTAN est très problématique. Car ce n’est pas un exercice dans le cadre d’un partenariat bilatéral. Ce n’est qu’avec un mandat de l’ONU ou au niveau bilatéral que la Suisse peut faire des manœuvres avec d’autres pays. Avec l’OTAN c’est très problématique, pour cela, il faudrait une décision politique.» Le fait, que ces manœuvres aient lieu à la frontière de la Russie et qu’elles soient politiquement très critiques en raison de la situation crispée en Europe, relève pour lui en premier lieu d’un aspect géographique: «Que cela se déroule près de la Russie dépend de la position géographique de la Suède.» Mais la participation à des manœuvres de l’OTAN lui semble décidément être un pas de trop: «Premièrement, c’est problématique si ce sont des manœuvres de l’OTAN et deuxièmement, si cet exercice n’est pas orienté sur la défense, mais contre la Russie.» Qu’il s’agisse de manœuvres de l’OTAN semble évident, même si trois non-membres sont de la partie. Ainsi, Welt Online titre: «L’OTAN s’entraîne pour défendre l’Arctique contre la Russie», on ne peut guère le formuler de manière plus pertinente. «L’OTAN a déjà mené plusieurs guerres d’agressions»Le conseiller national Geri Müller, spécialiste de la politique extérieure des Verts, trouve des mots clairs au sujet de l’engagement des forces aériennes suisses en association avec l’OTAN. «L’entraînement au vol des forces aériennes suisses avec l’OTAN est inadmissible. L’OTAN est une alliance d’Etats ayant déjà mené plusieurs guerres d’agression, entre autre contre la Serbie. Et maintenant cette entourloupe à la frontière de la Russie? Cela peut énormément nuire à nos relations avec la Russie.» Un retrait du PPP – mieux aujourd’hui que demainthk. En 1996, la Suisse fut intégrée à la suite d’une «opération commando» dans la sous-organisation de l’OTAN appelée «Partenariat pour la paix» (PPP). Les conseillers fédéraux d’alors Flavio Cotti (DFAE) et Adolf Ogi (DDPS) signèrent la déclaration d’adhésion sans l’avoir soumise au débat parlementaire. Les Etats-Unis avaient créé le PPP au sein de l’OTAN, pour lier à l’OTAN les anciens Etats du bloc de l’Est ainsi que les Républiques soviétiques et pour les préparer successivement à l’adhésion complète. Cela s’est fait bien que les Etats-Unis avaient promis à Gorbatchev de ne pas s’étendre davantage vers l’Est. Cette participation au PPP n’est en réalité pas conciliable avec la neutralité de la Suisse. Après la fin de la guerre froide et la naissance d’un monde unipolaire, la neutralité n’avait, pour une majorité du Conseil fédéral, plus la signification qu’elle avait lors de la guerre froide. Au cours des dernières années, la situation géopolitique a cependant changé fondamentalement. Le monde unipolaire s’est développé vers un monde multipolaire, ce que les Etats-Unis, en tant qu’ancien hégémon, ne peuvent que difficilement accepter. Dans cette situation, la neutralité de la Suisse a la plus grande priorité. Elle seule peut servir de manière convaincante d’intermédiaire entre les blocs. Cela n’est réellement crédible que si la Suisse se retire du PPP: mieux aujourd’hui que demain. Evi Allemann est-elle fixée sur l’OTAN?thk. Pendant que tout l’échiquier politique critique la participation de la Suisse aux manœuvres de l’OTAN en Suède, la conseillère nationale socialiste et «spécialiste en sécurité» Evi Allemann trouve, selon la «Aargauer Zeitung» du 26 mai, que «la coopération avec l’étranger ne va pas assez loin». Elle parle de l’«élargissement de missions multinationales». Mme Allemann c’était fortement engagée contre l’achat de nouveaux avions de combat «Gripen», entre autre en déclarant que la Suisse pourrait en cas de menaces collaborer davantage avec l’UE ou l’OTAN. C’est réellement une vue assez bizarre de la souveraineté du pays. |