La clinique mobile «Maisha» en République démocratique du Congo

par le Dr Dieudonné Sengeyi, département de gynéco-obstétrique des cliniques universitaires de Kinshasa

Etant donné la misère qui caractérise nos populations dans les pays en voie de développement, comme c’est le cas en République démocratique du Congo (RDCongo), ainsi que le manque d’appui institutionnel et financier pour la réalisation de certains projets de développement communautaire, les femmes n’ont pas toujours accès aux soins médicaux appropriés par manque non seulement des moyens financiers, mais aussi d’informations.
En tant que jeunes filles d’abord, elles commencent les relations sexuelles très tôt, sans aucune protection avec les risques de contracter les infections sexuellement transmissibles (IST) dont le SIDA ainsi que les grossesses non désirées.
Ensuite, quand ces adolescentes se marient, l’insuffisance des ressources finan­cières dans le foyer à cause du maigre salaire du mari ou carrément du chômage de ce dernier, fait qu’une fois tombées enceintes, elles ne suivent pas régulièrement les consultations prénatales (CPN) ou se livrent à la pratique des avortements clandestins. Cette situation augmente de façon alarmante le taux de mortalité maternelle (1003/100 000 naissances vivantes en RDCongo; Prof Dr Sengeyi et Coll., Congo Médical, 2003, 3: 767-771) qui est parmi les plus élevés d’Afrique.
Grave encore, très peu de structures organisées existent dans le pays pour la prévention des IST, du cancer du col utérin et du sein qui sont parmi les principales causes de décès des femmes.
Beaucoup de nouveau-nés meurent aussi en RDCongo (taux de mortalité périnatale: 17,8% naissances vivantes; Prof Dr Sengeyi M.A.D., communication personnelle, 2000) pour insuffisance des soins.
La plupart de ces décès surviennent chez des femmes transférées des centres médicaux périphériques vers les hôpitaux de référence. Le transfert se fait souvent très tardivement quand les complications sont déjà installées avec des moyens de transport très défectueux sur de grandes distances et des routes en mauvais état.
Une bonne prise en charge de ces femmes aux environs de leurs domiciles dans la périphérie des grandes villes permettrait de déterminer les cas à haut risque qu’on transférerait à temps dans les grands hôpitaux où l’on peut plus facilement faire face aux hémorragies, aux infections ainsi qu’à l’hypertension gravidique qui constituent les principales causes de mortalité maternelle. Il s’en suivrait aussi une amélioration de l’état des nouveau-nés. Le dépistage précoce des IST, du cancer du col et du sein dans le même environnement permettrait d’éviter des complications plus graves de ces maladies qui entraînent la mort.
C’est ainsi que nous avons décidé de créer une association à caractère d’Organisation non gouvernementale (ONG) dénommée ­Clinique mobile Maisha (CMM). Clinique mobile puisque nous comptons suivre ces femmes dans leurs quartiers d’habitation plus ou moins éloignés des grandes villes avec des bus qui sont transformés pour la circonstance en salles des consultations. Notre cbjectif principal étant de contribuer à la lutte contre la mortalité maternelle et périnatale, donc de sauvegarder la vie, nous avons ajouté «Maisha» qui signifie «la vie» en Swahili, une des langues les plus parlées en RDCongo et en Afrique de l’Est.
La CMM s’assigne les objectifs suivants:
•    suivre les patientes concernées dans leurs quartiers reculés de la ville de Kinshasa, des provinces environnantes et plus tard dans toute la République, pour leur faciliter le contact avec une équipe médicale;
•    assurer les consultations générales;
•    organiser des consultations prénatales, donner des informations et distribuer des contraceptifs;
•    dépister les grossesses à haut risque (prévention des malformations congénitales);
•    planning familial;
•    dépister des IST, le cancer du col et du sein;
•    participer au Programme national de lutte contre le SIDA et les IST;
•    fournir à la population cible des informations générales sur la santé de la reproduction par des séminaires, des affiches, des calicots, la distribution de dépliants, de préservatifs, etc.
Nous avons déjà réalisé 5 consultations dans les quartiers reculés de Kinshasa avec nos véhicules d’occasion qui abordent difficilement les routes de Kinshasa. L’implantation dans d’autres régions se fera progressivement. Le projet prévoit d’utiliser des bus non seulement pour le transport du personnel et de matériel médical mais aussi pour les consultations.
Le courant électrique étant très instable à Kinshasa, nous utilisons un groupe électrogène pour nous servir de l’appareil d’échographie.
Nous lançons donc un appel aux organismes et aux personnes de bonne volonté pour nous aider à acquérir des bus solides, du matériel médical et des médicaments pour la poursuite efficiente de ce projet. Ils pourront ainsi contribuer à éviter à ces femmes de mourir en donnant la vie.     •

Prof Dr Sengeyi M.A. Dieudonné
Département de Gynéco-Obstétrique
Cliniques Universitaires de Kinshasa
B.P. 123 KINSHASA XI R.D.CONGO
Université de Kinshasa
Téléphone: (+ 243) 815099486
E-mail: dsengeyi@hotmail.com