Au début c’était l’idée: Rouvrir une librairie généraliste au LocleEntretien avec Isabelle Zünd, André Frutschi et Odile GrangeDepuis le 29 août 2015, Le Locle, petite ville proche de la frontière française, a de nouveau une librairie généraliste. En référence à l’écrivain français Guy de Maupassant elle s’appelle «Aux Mots Passants». C’est l’initiative de trois Loclois, Isabelle Zünd, assistante sociale, André Frutschi, ingénieur agronome et Odile Grange, libraire à la retraite qui se sont lancés dans le projet de mettre sur pied une librairie coopérative avec espace café. Ce projet citoyen est tout à fait encourageant. Quelle était votre motivation de lancer un projet de librairie généraliste coopérative? Isabelle Zünd: Mon collègue a toujours été intéressé par les sociétés coopératives, les projets coopératifs. Et pour moi, qui habite ici depuis 20 ans, cela me navre qu’il n’y ait pas de librairie. Donc voilà, pour les deux l’idée est née d’un projet coopératif avec une librairie. Qu’est-ce qui vous a donné le courage de lancer ce projet malgré tout? Isabelle Zünd: Certes il faut du courage, mais puis bien des coopérateurs ont répondu à notre appel. C’était aussi une sorte de thermomètre pour savoir si les gens ont envie de retrouver une librairie. Et puis moi, je crois que ça vient vraiment du bouche à oreille. Ils vont le dire à leurs copains à La Chaux-de-Fonds, à Neuchâtel, on a même eu des gens de Bâle … Nos atouts sont le conseil et l’échange humain favorisé par le coin café. Quelle est à votre avis l’importance du livre imprimé dans un monde de plus en plus numérique? André Frutschi: J’ai fait pas mal de comparatifs, c’est une grosse différence entre le monde germanique et anglo-saxon et le monde latin. Le monde germanique et anglo-saxon a passé à la liseuse, il y a beaucoup de livres numériques, alors que dans tout le monde latin, en Italie, en Espagne, en France et en Suisse romande, on est encore très livre papier, c’est culturel. L’Office fédéral de la culture a étudié le problème en Suisse et a constaté une différence de 30%. C’est notre chance. Pourquoi avez-vous choisi la forme d’une coopérative? Odile Grange: Un grand avantage de la coopérative est qu’on ne dépende pas des banques qui demandent toujours les chiffres. On est moins sous pression, il y a plus de souplesse. En outre la coopérative est aussi la forme d’organisation la plus démocratique. Isabelle Zünd: Exactement. Chaque coopérateur a une voix, indépendamment des parts qu’il a achetés. La commune qui a acheté 10 parts a une voix et les trois dames qui se sont partagé un part ont une voix chacune. C’est contraire à une société simple. Comment avez-vous donc procédé depuis l’idée jusqu’à l’ouverture de la librairie? Isabelle Zünd: Au début, on s’est dit qu’il fallait se renseigner au niveau des librairies. On est allés voir les libraires, à la Chaux-de-Fonds, dans la région, en France, la manière dont elles fonctionnent, on est allés voir les sociétés coopératives, par exemple l’«Espace Noir» à St. Imier. Comment avez-vous trouvé les coopérateurs? Isabelle Zünd: On a commencé à écrire des lettres à nos copains, à nos adresses plus loin, on a écrit à tous les commerçants et entreprises du district, deux entreprises ont participé, après on a écrit aux communes dont Le Locle mais aussi Les Brenets participent, sinon se sont tous des privés. J’ai fait beaucoup de bénévolat, je connais donc beaucoup de monde. Puis on s’est attaqués aux statuts ce qui n’a pas été très très facile parce qu’il n’existe que peu de modèles en Suisse romande. Merci bien de cet entretien et bonne chance pour la suite. • (Propos recueillis par Susanne Lienhard) 1 Les six cantons romands (Vaud, Fribourg, Valais, Neuchâtel, Genève et Jura) autorisent l’exploitation de la Loterie Romande et reçoivent la totalité de ses bénéfices. Les bénéfices sont entièrement consacrés au soutien d’institutions d’utilité publique romandes. |