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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°3, 24 janvier 2011  >  Depuis l’Antiquité tout peuple vaincu doit remettre ses armes au vainqueur en signe de soumission [Imprimer]

Depuis l’Antiquité tout peuple vaincu doit remettre ses armes au vainqueur en signe de soumission

Non à l’affaiblissement de la «Suisse vigilante» – Arrêtons de traiter nos soldats comme des cas pathologiques

C’est carrément grotesque: Nous sommes à la veille d’une votation fédérale sur une proposition du PS et des Verts qui exigent que le fusil d’assaut soit à la caserne et ne peut plus être confié au soldat pour le conserver à son domicile. Le Suisse se rend une fois par année avec son fusil d’assaut aux «tirs obligatoires», des exercices de tir dans sa commune, et quinze à vingt fois à des exercices et des manifestations. La future votation touche et nuit à l’image de la Suisse vigilante, de notre neutralité armée. Et en vue de cette votation, on mène à grand bruit un débat sur les cas de suicide – de plus avec des données faussées. Il est patent que cette discussion doit distraire du processus véritable. Le débat est une atteinte directe à l’honneur de nos soldats de milice. On les décrit comme des pantins instables à moitié neuro-psychotiques qui auraient bien besoin d’une expertise psychiatrique avant chaque exercice de tir. Et la FMH serait alors la commission compétente.
Dans leur communiqué de presse du 13 décembre 2010, les auteurs de l’initiative appâtent les tireurs sportifs et les chasseurs en affirmant que leurs armes ne sont pas concernées par leur projet de loi puisqu’ils apprendraient, dans une société de tir ou de sport, «le maniement de l’arme juste et responsable». Cela veut dire de manière implicite: l’école de recrues, l’école de sous-officier et d’officier ne transmettent pas une formation adéquate pour le maniement de l’arme. Celui qui n’aurait pas appris chez les chasseurs et les tireurs sportifs un «maniement de l’arme juste et responsable» tiendrait un instrument de mort dans les mains (Ch. Galladé, 10 janvier). Quel est le peuple qui accepte qu’on déverse de pareilles injures sur son armée de milice? En partant des arguments des initiateurs et passant par la FMH et jusqu’aux militantes féministes, le débat tout entier est un tel barbouillage qu’il doit être strictement récusé dans son ensemble.

Un bluff génial

ab./thk. Lorsque la guerre de l’OTAN contre la Yougoslavie fut mise en scène, il fallut d’abord préparer, respectivement conditionner l’opinion publique au fait que prochainement des bombardiers de guerre décolleraient du sol européen et y lâcheraient leurs sombres charges. On peut lire dans les écrits de Becker-Beham1 comment durant les années et mois auparavant, sept millions de dollars ont été payés à des bureaux de RP renommés pour nous enseigner à nous tous qu’il s’agissait d’une «intervention humanitaire». Peu après, le plus important de ces bureaux a proclamé triomphalement qu’il avait dès le début trouvé la bonne astuce pour faire passer cette grandiose manipulation auprès de l’opinion publique:
«Faire entrer dans le jeu les organisations juives du côté des Bosniaques fut un bluff génial. Nous pûmes d’un coup mettre sur un même plan les Serbes et les Nazis au sein de l’opinion publique. […] Immédiatement, un remarquable changement de paradigmes fit son entrée dans le langage des médias, accompagné par l’utilisation de termes qui contenaient une forte charge émotionnelle tels que épuration ethnique, camps de concentration etc., et tout cela évoquait une comparaison avec l’Allemagne nazie, les fours crématoires et Au­schwitz. La charge émotionnelle était tellement forte que personne n’osa la contredire, pour ne pas être accusé de révisionnisme. Nous avions atteint le centre de la cible.» (Citation d’après: Jörg Becker/Mira Beham: Operation Balkan: Werbung für Krieg und Tod. 2006, S. 41).
Depuis la votation concernant la nouvelle Constitution fédérale en 1999 – qui n’était avant le vote qu’une mise à jour et dès le lendemain matin devint une nouvelle constitution fédérale – les Suisses se sont presque habitués à ce que la discussion sur le fond avant le vote était manipulée jusqu’à la nausée. Mais l’accoutumance à quelque chose comme ça est un processus civique dangereux; qu’on laisse la vague des manipulations nous passer dessus sans répliquer pourrait se venger amèrement. Les équipes de RP et de spin-doctors se vanteront plus tard d’avoir réussi si facilement: en partant d’une statis­tique internationale, il a suffi de retourner les structures nationales suisses et l’image que la Suisse se fait d’elle-même, et de la préparer aux buts internationaux.
Il n’étonne personne que le PS et les Verts n’ont pas d’arguments à présenter ouvertement en faveur de leur initiative. Ils seraient obligés de demander conseil au chef de file [«Führungsoffizier»] de leurs collègues allemands, et celui-ci y réfléchirait à deux fois. Le Conseil européen ayant décidé de chicaner la Suisse jusqu’au sang, la référence à des «nécessités» allemande ou bruxelloise serait contre-productive dans la campagne de votation. C’est probablement pour cela qu’ils ont demandé de l’aide à la FMH comme grand frère éventuellement intelligent.

Il faut être honnête si on veut être un leader d’opinion

«La garantie des droits politiques protège la libre formation de l’opinion des citoyens et des citoyennes et l’expression fidèle et sûre de leur volonté», dit la Constitution fédérale (art. 34). En vue du 13 février nous n’avons pas à mener un débat psychiatrique sur le suicide et sa prévention, et nous ne votons pas non plus à ce sujet. En revanche, nous votons au sujet d’une affaire militaire: à savoir si comme jusqu’ici, le fusil d’assaut peut et doit être confié à nos soldats pour conservation à domicile, après qu’ils ont soigneusement appris le maniement correct à l’école de recrues. Par ailleurs, ils y ont aussi appris à travailler, à penser et à agir, au sein d’une structure responsable et élaborée, pour le bien commun. Il faudrait encore mener un débat séparé pour savoir quelle sombre attaque de RP représente l’argumentation des initiants contre la formation, le sens des responsabilités et les capacités des sous-officiers et officiers.
Celui qui porte encore une once de sens de l’honneur en lui-même, ne se laissera pas pousser dans le brouillard d’un débat déviant. Un débat d’ailleurs auquel restera collée une «image», une aura de psychologie sociale: l’image que le soldat suisse se trimballe sans connaissances techniques avec une «arme létale» et représente un danger pour la communauté et la paix domestique.
Que nous les femmes, nous élevions nos garçons de manière qu’on ne puisse plus faire confiance à tous est une chose; nous devrions alors balayer devant notre propre porte et nous n’importunerions pas la Suisse avec un pareil débat et avec les conséquences de notre échec. Mais qu’un groupe de danse pareillement multicolore représente l’armée entière et son instruction comme des crétins et comme un danger pour qui que ce soit, c’est plus qu’une faute de goût. Le criminologue Kilias démontre qu’il n’y a pas de relation entre la possession d’une arme et le nombre de suicides (cf. l’article de Rolf W. Rüegg). Pourquoi autorisons-nous donc n’importe quelles femmes féministes à peindre une image tellement fausse et injurieuse de nos hommes dans un débat publique sur notre armée de milice? Les hommes psychiquement instables sont tout de même déjà éliminés lors du recrutement; les autres seront identifiés plus précisément par les responsables à l’école de recrues. Est-ce que les féministes enragées sont devenues de pareilles Xanthippe que leurs propres maris veulent se suicider tous les jours?
Mais pour que les femmes ne doivent pas être seules à argumenter, nous avons une FMH. La FMH, «Foederatio Medicorum Helveticorum» est une association selon l’article 60 ss. du Code civil suisse. Elle représente en tant qu’association professionnelle les médecins diplômés de Suisse. Leur but est d’assurer la fourniture de soins médicaux à un coût équitable; d’assurer la qualité de la formation professionnelle; de promouvoir la qualité et l’économicité des prestations médicales; de renforcer la solidarité et les relations entre ses membres; de soigner les rapports de confiance entre les médecins, la population, les autorités et les institutions; de sauvegarder les intérêts professionnels et économiques des membres et de s’engager pour la liberté et l’indépendance de la profession médicale; de promouvoir les sciences médicales et les relations avec les organisations médicales à l’intérieur et à l’extérieur du pays. La FMH n’est donc pas compétente pour des questions militaires et de défense nationale. Elle n’a aucun droit de traiter nos soldats comme des cas pathologiques. Elle n’a absolument pas le droit de manipuler le débat public avant une votation populaire. Personne n’exige de cette association qu’elle ait à sa tête des puits de science en droit constitutionnel, histoire suisse ou défense nationale. Par chance, elle ne le prétend pas elle-même que c’est le cas. Les médecins sont connus pour dire lors de chaque discussion sur un problème d’histoire contemporaine que «pour ce genre de question», ils n’ont pas le temps. C’est malheureusement vrai et c’est pourquoi on le leur pardonne – tant qu’ils s’occupent de leurs propres problèmes professionnels. Mais que la FMH ne sache ou ne veuille plus lire et correctement interpréter des statistiques, ça va trop loin. Si elle veut fabriquer un montage de pensée dominante pour affaiblir la volonté de défense des Suisses et coiffer les soldats de modèles de pensées freudiens, c’est la fin des haricots.
Jusqu’au début des années huitante les psychologues/psychiatres/médecins généralistes et la police avaient le devoir d’interner dans une clinique psychiatrique un candidat au suicide pour le protéger de lui-même, afin qu’il y reçoive une aide compétente et qu’il puisse mettre de l’ordre dans sa situation dans des conditions protégées. Chaque personne qui a à faire à ce genre de cas sait combien c’est difficile. Comme une partie non négligeable de ceux-ci s’est ensuite quand-même donné la mort dans la clinique, cette disposition fut modifiée. A partir de ce moment, la directive presque lapidaire fut que celui qui voulait absolument mettre fin à ses jours, ne pouvait pas non plus en être empêché par un internement en clinique. Les organisations d’aide au suicide «Exit» et «Dignitas» n’étaient pas encore en jeu, ça n’est venu que plus tard. La FMH le sait très bien: elle pourrait insister pour qu’on réintroduise l’ancienne réglementation. Cependant, de nos jours cela n’empêcherait pas non plus à ce qu’un nombre croissant de candidats au suicide se jette sous le train.
La FMH sait aussi que la prévention du suicide commence en famille et à l’école. Ce serait une belle tâche pour la FMH et les femmes PDC de se soucier d’éduquer notre jeunesse pour en faire des personnalités fortes qui sauront aussi mieux maîtriser les défaites et les situations conflictuelles de la vie. La Suisse en prendrait connaissance avec respect. Mais tout cela n’a rien à voir avec la votation du 13 février.
D’ailleurs: Si après le 13 février les fusils d’assaut devaient éventuellement être enfermés à l’arsenal et qu’on en ait quand-même besoin – est-ce qu’il faudra alors aller chercher la clé de l’arsenal à l’Internationale Socialiste ou sera-t-elle conservée à Fort Knox ou à Tel Aviv? Et les femmes PDC savent-elles que depuis 2001 les Américains abusent du cliché «protéger les femmes et les enfants» pour justifier la guerre en Afghanistan? A ce titre on y déverse d’une altitude de 4000 mètres, depuis bientôt dix ans, des bombes high-tech sur des célébrations de mariage et des villages entiers qui sont rasés, y compris les femmes et les enfants, les grands-parents, les chèvres, moutons et poules – tout cela pour la «libération de la femme». Un peu plus de réflexion sur ce qui se passe dans le monde actuel serait la bienvenue aussi au sein des femmes PDC. Et si le PEV [Parti évangélique populaire] est sérieux dans l’engagement chrétien de son communiqué de presse, qu’on nous permette encore une question. Si les Israéliens lancent prochainement une attaque nucléaire contre l’Iran, pour laquelle ils s’exercent depuis des mois, et que les conséquences soient aussi dévastatrices que prévues par tous les experts: chaque vie humaine vous sera-t-elle alors toujours sacrée? Ou vous en laverez-vous les mains en toute innocence?
Bien des gens disent que tout va trop bien pour nous Suisses et que c’est pour cela que nous pouvons nous payer de pareils débats et propositions débiles. Mais ne devrions-nous pas simplement exiger plus de sens de l’honneur et avant tout d’honnêteté lors de nos discussions sur des votations? Celui qui manipule doit pour le moins rentrer dans le rang et ne doit plus se voir offrir une plate-forme particulière. Et le PS et les Verts doivent rendre public pour quel chef occulte ils lancent cette offensive: entre Wall Street, Londres, Paris et Tel Aviv, il y a bien des chantiers en cours, et derrière eux des maîtres d’œuvre assoiffés de pouvoir qui veulent avoir la Suisse travailleuse et ordonnée.
En tout état de cause, toute nouvelle injure faite à notre armée de milice doit être récusée sur un large front.    •

1    Jörg Becker/Mira Beham: Operation Balkan: Werbung für Krieg und Tod. 2006,
ISBN 3-8329-1900-7

Depuis l’Antiquité, tout peuple vaincu doit remettre ses armes au vainqueur en signe de soumission. Il en est encore ainsi aujourd’hui.

La nuit dernière, mon père, qui aurait 111 ans cette année, m’est apparu en rêve et m’a dit: «J’ai accompli 1000 jours de service militaire, j’ai défendu la Suisse à la frontière et je t’ai permis ainsi de grandir dans la liberté, d’avoir une profession, d’apprendre la responsabilité individuelle et de la mettre en pratique. Et maintenant vous vous demandez si mon sacrifice a été utile, si la liberté est bien une valeur à dé­fendre. Vous voulez remettre mon arme et déclarer périmé ce que j’ai accompli. Allez-vous remettre en question tout ce que nous avons réalisé?»

C.L., Wettswil