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Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°4, 28 janvier 2008  >  Où va le fédéralisme? [Imprimer]

Où va le fédéralisme?

Réflexions pendant la phase préparatoire de la 2e Conférence nationale sur le fédéralisme

par Werner Wüthrich, docteur ès sciences politiques, Zurich

La Confédération et les cantons invitent pour le 27 mars 2008 à la 2e Conférence nationale sur le fédéralisme à Baden dans le canton d’Argovie. Sous le titre «Le fédéralisme suisse sous pression d’efficacité: Quelles perspectives?» des questions fondamentales seront discutées. Par exemple: Les petites structures sont-elles valables pour l’avenir? Quel est le degré de fédéralisme encore possible sous l’aspect de la rentabilité? Faut-il procéder à des réformes territoriales?
La première Conférence nationale sur le fédéralisme s’est tenue à Fribourg, il y a trois ans. Le sujet était «Le fédéralisme coopératif face à de nouveaux défis». Cette création linguistique a causé quelque désarroi parce qu’elle a suggéré qu’il existe aussi un fédéralisme sans coopération. A juste titre, un intervenant a attiré l’attention sur le fait que dans l’entendement suisse il n’a jamais existé un fédéralisme sans coopération et sans coordination et qu’il n’en existera jamais. Tout aussi peu qu’a existé ou qu’existe en Suisse un fédéralisme sans démocratie directe. Qu’est-ce qui est nouveau? Le soi-disant fédéralisme coopératif comprend une «évolution» dans le sens que la participation et le droit aux décisions directes des citoyennes et citoyens sont de plus en plus limités.
A la place du Souverain, c’est aujourd’hui de plus en plus l’exécutif qui décide. Une preuve en sont les nombreuses conférences des directeurs des Finances, des directeurs de l’Education etc. ou aussi la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC), qui a aménagé à Berne une «Maison des Cantons» et qui a co-organisé la première Conférence nationale sur le fédéralisme en 2005. Des éléments coercitifs introduits dans notre législation dans le cadre de la Nouvelle péréquation font également partie du fédéralisme coopératif (Art. 48a Constitution fédérale). Les cantons qui ne se joignent pas à un accord intercantonal peuvent y être forcés. Ainsi le «fédéralisme coopératif» revient à abandonner le fédéralisme libre.
Revenons-en à la conférence sur le fédéralisme qui aura lieu en mars 2008 et qui s’est donné pour thème «Les structures des petits espaces sont-elles encore efficientes?» – Ces dernières années, on a pu observer dans certains cantons de fortes activités qui avaient toutes pour but la prétendue réforme des structures communales. La plupart du temps, l’initiative partait des gouvernements cantonaux. Ce sont surtout les cantons qui ont voulu forcer leurs communes à la fusion qui ont fait sensation et ont causé un malaise. Dans ce contexte, il faut mentionner les cantons du Tessin, du Valais et de Glaris. La question de la «réforme des structures communales» se discute actuellement dans un grand nombre de cantons. Avant de me tourner vers cette problématique, voici quelques réflexions fondamentales.

Le «modèle suisse»

En Suisse vivent environ 7 millions de personnes de cultures différentes et avec 4 langues nationales, et ce depuis longtemps en paix. Elles vivent dans 26 cantons et environ 3000 communes de grandeurs très différentes. Chaque commune a son histoire. Beaucoup de communes ne comptent que quelques centaines d’habitants, et la plus grande, la ville de Zurich, presque 400 000. Comparées à la situation en Europe, ces structures sont particulièrement décentralisées et divisées en petits espaces. Dans ces nombreuses communes est né ce qui est aujourd’hui connu mondialement comme le «modèle suisse». La caractéristique principale en est la démocratie directe.
Le fondement de la démocratie directe est – du point de vue historique et psychologique – l’autonomie communale. Dans les communes, les citoyens ont dans une très haute mesure la possibilité de décider eux-mêmes et d’aménager la communauté sous leur propre responsabilité. Le citoyen individuel est fortement impliqué dans le processus politique – pas seulement lors d’élections. Dans les petites communes, il remplit accessoirement une tâche publique – par exemple dans la commission scolaire ou bien dans la commission de gestion du cimetière. Lors des questions concrètes, il peut s’engager directement et voter sans le détour par les partis ou les parlementaires. Les minorités qui sont encore peu organisées peuvent aussi prendre la parole. Après un tel déroulement des choses, les perdants seront plutôt prêts à accepter les décisions prises et à y participer. Ainsi, la démocratie directe est aussi un garant de paix sociale et empêche les concentrations de pouvoir non désirées.
Les expériences de la coresponsabilité directe et de la participation active des citoyennes et citoyens dans les communes ont aussi été transférées aux niveaux supérieurs de l’Etat. Aujourd’hui, les cantons et la Confédération ont dans les domaines centraux des structures de décision de démocratie directe. Ainsi, des questions concrètes importantes, comme par exemple le taux des impôts, sont décidées à tous les niveaux lors de votes directs. Au niveau fédéral, il y a même eu une fois une votation où les citoyens suisses ont pu décider eux-mêmes si l’armée devait se procurer des avions de combat américains du type FA-18 ou non.

«Small is beautiful»

Une étude du Fond national suisse (FNS) intitulée «La démocratie dans les communes»1 a analysé la qualité de vie communale en Suisse. Elle donne au lecteur attentif des indications pour la solution de problèmes urgents politiques et économiques et confirme une fois de plus que dans les petites communes la démocratie est plus vivante et différenciée que dans les grandes. Le professeur Ladner et ses collaborateurs ont questionné 1500 personnes de communes de grandeurs différentes sur leur façon de voir la politique locale et leurs activités politiques. Dans les petites communes la collaboration bénévole au sein des autorités est – à l’encontre de tous les mauvais présages des médias – encore très répandue. Les résultats de l’étude montrent que l’intégration sociale, la satisfaction, la compétence politique et la confiance dans la politique est plus grande dans les petites communes. En un mot: La démocratie y est plus vivante et plus directe. De plus, il existe toute une série d’études qui prouvent que les petites communes présentent aussi des avantages financiers.
Ainsi le professeur bernois Vatter a démontré que les dépenses moyennes par habitant pour l’administration et les dettes sont clairement plus basses dans des régions composées de petites communes.2 Cela correspond à l’expérience qu’à cause du contrôle social dans les petites communautés on procède plus soigneusement avec l’argent du contribuable, et que la collaboration bénévole des citoyennes et citoyens coûte beaucoup moins cher. Les circonstances sont évidemment différentes dans des régions plutôt citadines.
Le secret du succès du «modèle suisse» est sa diversité. – Est-ce bien sage de détruire définitivement quelque chose de si précieux par des réformes structurelles initiées par en-haut? Et là, il ne s’agit pas seulement de valeurs sociales. La prospérité de la Suisse prouve bien que ses structures décentralisées et développées dans un esprit libéral lui ont permis un développement économique unique au monde.
La pression politique
Malgré tous ces avantages indiscutables des petites structures, les communes et les cantons suisses se trouvent sous pression pour former de grandes entités politiques. Cette contradiction n’est pas compréhensible au premier abord. Par la suite, les dessous, qui ne sont souvent pas pris en considération, seront éclairés.
1.    Dans la discussion politique, on cite parfois la mondialisation comme raison pour des réformes territoriales. Les frontières s’effondrent et les marchés fusionnent. Les conséquences sont que des grandes entreprises se développent en multinationales pour pouvoir mieux opérer sur les marchés mondiaux. Et ainsi l’on exige que les structures politiques s’adaptent aussi à cette «tendance à la grandeur». Les frontières des cantons et des communes perdraient de leur importance. Elles ne feraient que gêner les forces du marché et le développement économique. Les nouvelles multinationales qui, jour après jour résultent de fusions et de prises de contrôle, auraient besoin d’un entourage politique et juridique adéquat. Les règles de l’OMC et de l’UE en offriraient la garantie.
Cette argumentation est construite sur des réflexions purement économiques. Le bien commun, d’importance centrale pour une vie en commun paisible, remplie et juste, est totalement négligé.
2.    Adhésion à l’UE: le Conseil fédéral poursuit depuis des années l’objectif stratégique de l’adhésion à l’UE. La Suisse doit y être préparée à petits pas et pour s’aligner de plus en plus sur l’UE. Cela se fait par la soi-disant «adaptation autonome» des directives de l’UE et par des accords bilatéraux. De l’autre côté, il fallait et il le faut toujours éliminer les obstacles qui empêchent une adhésion par des «réformes» internes. Sans doute, le débat sur le fédéralisme doit aussi y contribuer. Pourquoi?
        Ce sont surtout les structures d’espaces limités de la Suisse qui ne vont pas avec l’UE dont la politique est dirigée de manière centraliste et adaptée à de grands espaces. En 2001, le Conseil fédéral a concrétisé la voie à suivre dans l’introduction de son message du ­14 novembre 2001 concernant la ­Réforme de la péréquation ­financière (RPT). Pas à pas des entités politiques plus grandes pourraient être formées. Les cantons pourraient être réunis en grandes régions et les 3000 communes, pour la plupart petites, pourraient être regroupées en communes plus grandes dans les vallées ou les régions. (Feuilles fédérales 2002, p. 2166ss). Les grandes villes avec leurs environs doivent former des agglomérations politiques. L’étude intitulée «Les cantons face au défi de l’adhésion à l’UE»3, commandée par la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC), justifie politiquement et juridiquement cette stratégie en 2001: les grandes entités régionales auraient le poids politique nécessaire pour être entendues à Bruxelles. S’y ajoute que les directives bruxelloises seraient conçues pour de grands espaces. Dans les petites structures décentralisées de Suisse, il serait difficile de les réaliser de manière uniforme. Cela paraît logique. En 2001, des sondages de la CdC avaient révélé que plus de 60% des directives juridiques au sein de l’UE émanent de Bruxelles. (Aujourd’hui on parle de plus de 80%.)
En clair, cela veut dire que pour les centrales du pouvoir des structures réduites, décentralisées, fédérales et libérales sont une horreur parce qu’elles sont difficiles à gérer et diriger depuis le haut. Au sein de l’UE, il y a des pays qui ont radicalement réduit le nombre de leurs communes. – Certains lecteurs objecteront que ces réformes des structures en Suisse n’ont rien à faire avec l’UE. – Est-ce véritablement le cas?

Conférence nationale sur le fédéralisme de 2005

Un regard rétrospectif sur la première Conférence nationale sur le fédéralisme de 2005 vaut la peine. Le sujet principal en était le «Fédéralisme coopératif». Je m’y suis déjà référé ci-dessus. Cette rétrospective a un certain intérêt puisque aussi bien le conseiller fédéral déchu Christoph Blocher (UDC) que la conseillère fédérale fraîchement élue Evelyn Widmer-Schlumpf (UDC) y ont fait une intervention portant sur le «fédéralisme». Dans l’exposé de Mme Widmer-Schlumpf, il n’y a aucune allusion à la politique de l’UDC des années 90 qui avait, à l’époque, empêché l’adhésion à l’EEE et qui représente toujours une position critique envers la politique européenne. Widmer-Schlumpf avait représenté la politique du Conseil fédéral de l’époque qui, après la votation négative sur l’EEE avait fortement soutenu un rapprochement avec l’UE. – L’exposé du conseiller fédéral Blocher par contre est truffé de termes tels que «responsabilité autonome» et «autodétermination» dans le cadre du fédéralisme. Il s’est désigné lui-même comme «Fédéraliste invétéré» et n’a pas épargné l’UE de critiques massives dans ce contexte.4
Est-ce que, par la destitution du conseiller fédéral Blocher, on a voulu se débarrasser d’un obstacle dans la politique européenne du pays? Le Conseil fédéral dans sa nouvelle composition poursuivra-t-il comme avant l’objectif stratégique d’une adhésion à l’UE – cette fois probablement sans le dire ouvertement? Il y a un passage intéressant dans la conférence de Widmer-Schlumpf. Elle a parlé de manière générale du «besoin toujours plus urgent de se défaire des petits espaces afin de pouvoir résoudre différents problèmes». Que voulait-elle exprimer concrètement par cela?
La deuxième Conférence nationale sur le fédéralisme qui aura lieu en mars, où l’efficacité des petites structures sera discutée, a été annoncée, il y a quelques semaines, par le conseiller fédéral Blocher. Lors de la conférence de presse, il s’est exprimé sans ambiguïté: «Quiconque dénigre le fédéralisme par l’expression de «Kantönligeist» (esprit renfermé dans son canton) et qui prône l’égalitarisme, fait fausse route. […] Dans un monde globalisé, le fédéralisme n’est en aucun cas  «un produit de fin de série» […].» («Südost­schweiz» du 28/8/07)
Une autre chose saute aux yeux: Les nombreux exposés donnés lors de la Conférence nationale sur le fédéralisme de 2005 peuvent être consultés depuis longtemps sur le site Internet de la CdC. L’intervention de Mme Widmer-Schlumpf s’y trouve. Mais l’intervention de l’ancien conseiller fédéral Blocher y manque.5 Elle n’est pas non plus contenue dans les actes de cette conférence bien qu’il y ait participé en tant que conseiller fédéral. – Est-ce là une stratégie ou simplement une négligence?

Les communes – un produit de fin de série?

Dans les discussions actuelles autour de la réforme des structures, ils s’agit surtout des communes. On remarque que la Confédération et les cantons, en tant que niveaux supérieurs de l’Etat, affaiblissent souvent les communes de par leur politique et sapent ainsi petit à petit leur souveraineté. Cela se produit en leur enlevant leurs tâches traditionnelles pour les organiser de manière centralisée et en leur retirant le soutien. Des exemples de cette tendance sont la centralisation des états-civils, de la protection civile, des bureaux du cadastre et en maints endroits aussi de l’administration des impôts, de l’assistance sociale – tout cela, dans le fond, des tâches typiquement communales pouvant être accomplies dans les communes proches du citoyen, souvent beaucoup mieux que dans une centrale éloignée. D’autres «réformes» affaiblissent également les communes.
Comme exemple, nous allons citer la suppression du Fond d’aide à l’investissement dans le cadre de la «Nouvelle politique régionale NPR» propagée par le conseiller fédéral Deiss. Au cours des trente années avant sa disparition, ce fonds avait accordé à des petits villages de montagne des prêts sans intérêts mais remboursables pour le développement de leurs infrastructures – une aide bénéfique. Le capital d’environ 1,5 milliards de francs suisses est versé depuis peu dans un nouveau fonds intitulé «Fonds pour le développement régional». Celui-ci est conçu d’après l’exemple du «Fonds européen pour le développement régional» et il accorde – comme dans l’UE – avant tout des subventions d’encouragement économique non remboursables, ce qui ne correspond absolument pas aux traditions de la politique régionale suisse. Dans cette énumération, il ne faut pas oublier le Tribunal fédéral qui a depuis peu pris aux communes le droit politique de la naturalisation. Une naturalisation ne sera à l’avenir plus qu’un acte administratif qui pourra être contesté devant un tribunal.
A l’intérieur des cantons on trouve également des exemples de politique qui affaiblit de façon ciblée les petites communes. Ainsi, dans le canton des Grisons, une commune de moins de 200 habitants reçoit nettement moins de péréquation financière qu’une commune plus grande dans une situation équivalente. La nouvelle péréquation financière planifiée dans le canton de Zurich prévoit des mécanismes similaires. Ainsi les petites communes seront beaucoup moins soutenues. Dans le canton de Glaris un projet a été présenté qui veut transmettre au canton le droit séculaire de prélever les intérêts sur l’eau. On en parle aussi dans le canton des Grisons. La réforme radicale dans le canton de Glaris, qui a entièrement supprimé les communes qui se sont développées au fil des siècles (et veut créer quelque chose de tout à fait nouveau) sans que les communes aient eu voix au chapitre, cela éveille des sentiments mitigés. Que se passera-t-il si on agit de la sorte au niveau fédéral? Est-ce que les petits cantons tels Glaris ou Appenzell Rhodes Intérieures seront un jour supprimés par décision de la majorité de la population suisse, sans que leurs populations aient pu s’exprimer? – Je pense que de cette manière les fondements de notre Etat seraient mis en question. Les Glaronais ont préparé le terrain pour un tel développement néfaste.

Quels doivent être les objectifs pour la politique?

La forte orientation stratégique de la Suisse vers l’UE et l’OMC est-elle justifiée? – Une remarque d’abord: Le peuple n’a aucunement donné son accord à l’adhésion à l’UE – et pas non plus comme objectif. S’y ajoute que l’avenir de l’UE dans sa forme actuelle est très incertain, suite au rejet du projet de traité constitutionnel par la France et les Pays-Bas en 2005. Le soi-disant «mini-traité» de Lisbonne n’est pas encore ratifié. Les gouvernements nationaux tentent par tous les moyens d’éviter des référendums.
La position par rapport à l’OMC a également changé ces dernières années. L’euphorie des années 90, de déréguler les marchés tout autour du globe en 20 ans, s’est en grande partie envolée. Les négociations de l’OMC en cours (Ronde de Doha) qui auraient dû rapprocher le monde de cet objectif, stagne depuis plus de six ans. Les chances d’arriver à un accord sont minimes. Au contraire, on se rend de plus en plus compte que ce nouvel ordre économique mondial n’est pas du tout souhaitable, car il ne tient pas compte de l’état de développement très divers entre les pays et des besoins variés sur notre terre. L’ensemble des dispositions de l’OMC comme de l’UE favorisent unilatéralement les grandes entreprises multinationales, qui – et c’est compréhensible – préfèrent des conditions-cadre uniformes et à grand espace. Mais cela nie et ignore les exigences des populations.
Actuellement, il y a heureusement de nouvelles tendances. Il y a de plus en plus d’accords commerciaux bilatéraux et régionaux qui se concluent, tout comme si l’OMC n’existait pas. Ils rendent possible des solutions sur mesure et flexibles qui tiennent davantage compte des besoins de la population tout entière. En font notamment partie le maintien de l’agriculture propre au pays et le soin des petites et moyennes entreprises ancrées dans les communes.

Coopération libre

Déjà après la Seconde Guerre mondiale, le professeur Gasser a attiré l’attention sur le fait que des valeurs sociales se développent dans des communes libres, qui se basent sur le principe de la coopération libre et d’égal à égal.6 Il y voyait aussi un modèle pour la paix – surtout pour l’Europe, mais aussi pour le monde entier. Horizons et débats en a parlé  déjà plusieurs fois.
A l’opposé de cela, il y a l’esprit de subordination obéissante, qui habitue les citoyens aux ordres et à l’obéissance. Cet esprit caractérise malheureusement les grands centres politiques et économiques du pouvoir qui gouvernent le monde et qui trop souvent poursuivent d’autres buts que le bien commun. La question doit être posée, de savoir jusqu’à quel point les acteurs qui centralisent aujourd’hui la vie communale et qui veulent former depuis le haut de nouvelles entités à partir des communes et des cantons actuels, sont guidés par des motifs semblables.
Les avantages du fédéralisme et de la libre coopération comme Gasser les décrit, doivent être soulignés par une citation de poète: Dans le Fanion des sept sages (Nouvelles zurichoises), l’écrivain zurichois Gottfried Keller (1819-1890) fait l’éloge du fédéralisme en ces termes: «Comme il est heureux qu’il n’y ait pas qu’un seul type monotone de Suisses mais des Zurichois, des Bernois, des Unterwaldiens, des Neuchâtelois, des Grisons et des Bâlois – même deux sortes de Bâlois – qu’il existe une histoire de Genève et une histoire d’Appenzell! Cette diversité dans l’unité – que Dieu nous la conserve! – est une bonne école de l’amitié et c’est là où la cohésion politique aboutit à l’amitié au sein d’un peuple tout entier qu’on réalise les plus grandes choses.»
Le vrai fédéralisme est déjà coopératif en soi, le vrai fédéralisme vit d’un esprit libéral. Dans les communes, les petites structures fédéralistes sont soutenues directement par les citoyennes et citoyens et permettent une coopération libre à très haut niveau – et c’est dans ce sens que «la petite taille a de beaux atouts».    •

1    Andreas Ladner, Marc Bühlman, Demokratie in den Gemeinden – Der Einfluss der Gemeindegrösse und anderer Faktoren auf die Qualität der lokalen Demokratie, Zurich 2007
2     Adrian Vatter, Markus Freitag: Föderalismus und staatliche Verschuldung, in: Österreichische Zeit­schrift für Politikwissenschaft (ÖZP), 33 JG. (2004) H.2, p. 175-190
3    Konferenz der Kantonsregierungen (Ed.), Die Kantone vor der Herausforderung eine EU-Beitritts, Bericht der Arbeitsgruppe «Europa-Reformen der Kantone», Zurich 2001
4    Les interventions du congrès peuvent être consultées sur le site de l’Institut pour le fédéralisme de l’Université de Fribourg.
5    On trouve l’intervention du conseiller fédéral Blocher sur le site de l’Institut pour le fédéralisme de l’Université de Fribourg mais pas sur celui de CdC.
6    Adolf Gasser, Gemeindefreiheit als Rettung Europas, Bâle 1947, p.12