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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°36, 21 septembre 2009  >  «Avec son double système de formation professionnelle, la Suisse dispose d’un atout précieux» [Imprimer]

«Avec son double système de formation professionnelle, la Suisse dispose d’un atout précieux»

par Dieter Sprock

L’artisanat est le fondement même de la vie économique. Cette vérité de toujours prend une importance particulière au jour d’aujourd’hui. L’artisanat favorise non seule­ment le développement économique d’une région, mais en renforce la communauté humaine, cela grâce au fait qu’il offre une palette de métiers se répartissant de l’apprenti au chef d’entreprise indépendant, mais aussi des emplois résistant aux crises du fait de leur stabilité, se trouvant à proximité des lieux de résidence. Il assure aussi des possibilités de formation continue allant de la maîtrise aux études universitaires, en passant par la gestion d’entreprise. Il développe encore une philosophie d’entreprise qui respecte l’être humain.
La Suisse dispose d’un double système de formation professionnelle dont les bienfaits dépassent ses frontières. Constamment, des délégations viennent de partout pour étudier le système afin de l’introduire dans leurs pays respectifs. On rédige à ce sujet des mémoires et des thèses de doctorat.
A la base de cette formation professionnelle se trouve un apprentissage de trois ou quatre ans, accompagné de cours à l’école professionnelle. Elle offre dans de nom­breuses professions la possibilité de prolonger la formation à un niveau supérieur, notamment par une maturité professionnelle, ouvrant la voie vers les établissements d’enseignement supérieur. Ce double système de formation est un des piliers de l’économie suisse et de toute la société.

Réussites impressionnantes au Concours mondial des métiers

Tous les deux ans, des centaines de jeunes gens hautement qualifiés, venant du monde entier, se retrouvent pour une compétition dans leur domaine professionnel. Ces jeunes gens, âgés de 22 ans au plus, présentent leurs capacités à des experts, mais aussi à un vaste public, dans différents domaines de l’arti­sanat, de l’industrie et des services et se mesurent aux standards internationaux. Ils ont dû se présenter dans leurs pays respectifs à des championnats professionnels régionaux et nationaux afin de se qualifier pour les championnats mondiaux.
Ces championnats sont particulièrement importants du fait qu’ils offrent aux jeunes gens en passe de choisir un métier des modèles à suivre. Ces compétitions mondiales offrent des possibilités particulières d’échanges et de comparaisons aux standards de compétences dans les secteurs de l’artisanat et des services. Elles démontrent le fait que les qualifications artisanales traditionnelles se lient aux techniques nouvelles pour promouvoir le bien-être économique et social dans le monde entier.
Lors de cette compétition internationale la Suisse se trouve régulièrement en tête. Cette année, le concours mondial des métiers s’est tenu à Calgary/Canada du 1er au 6 septembre. La Suisse a, une fois de plus, prouvé ses capacités en obtenant 14 médailles – 7 d’or, 2 d’argent, 5 de bronze – ainsi que 18 di­plômes. Elle se plaça ainsi au troisième rang, derrière la Corée avec 27 médailles et le Japon avec 16 médailles, se trouvant en tête des pays européens. Les médailles d’or ont été gagnées dans l’impression offset, dans le design du tissage, chez les tailleurs de pierres, en ferblanterie de toitures, chez les peintres décorateurs, les couturières pour dames et les charpentiers. La délégation suisse était composée de 29 hommes et 7 femmes. En tout, 1000 professionnels de 34 métiers et de 51 pays ont pris part à la compétition de cette année. Ce succès helvétique est la meilleure preuve de la qualité du double système de formation professionnelle.

Le double système de formation a un bel avenir

Ces résultats apportent un démenti cinglant aux propos du professeur Walther Zimmerli qui prétend dans son livre blanc «Zukunft Bildung Schweiz» [L’avenir de la formation en Suisse] que ce système touche à sa fin. Zimmerli, qui est professeur de philosophie et d’éthique économique en Allemagne, entreprend dans son livre blanc une prévision du développement de la formation helvétique jusqu’en 2030, selon laquelle jusque-là 70% des élèves devront avoir obtenu une maturité. De plus, le domaine de formation helvétique devra s’adapter à la croissance du caractère économique de la société, à la mondiali­sation, ainsi qu’à la virtualisation de la formation, en s’appuyant avec constance sur les techniques de l’information et de la communication. Selon lui, «l’idéologie fédéraliste» empêcherait le développement d’un système de formation vivable, il faudrait donc une direction centrale au plan fédéral. Ce ne sont que quelques-unes des opinions douteuses de cette étude.
Au vu de ces propositions extrêmement contestables aussi bien au plan démocratique qu’au plan pédagogique, on peut se demander de quel laboratoire d’idées provient cette étude et quels intérêts elle sert.

Les avantages du double système sont évidents

Il est réjouissant de constater que ce livre blanc a été rejeté, notamment dans les cercles économiques. La Neue Zürcher Zeitung estime dans son cahier économique du 2 septembre que les représentants des associations économiques avaient montré quelque stupéfaction, voire aussi opposition et indignation quand ce n’était pas de l’amusement à l’esquisse présentant la prétendue «société du savoir». Les affirmations touchant le double système de formation ont été particulièrement mal accueillies. Selon la Neue Zürcher Zeitung «Rudolf Minsch, économiste en chef l’association faîtière économiesuisse, Thomas Daum, directeur de l’Union patronale suisse et Peter Dietrich, directeur de Swissmem [regroupement des entreprises de l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux], se sont opposés énergiquement à ces vues.» Le système suisse de formation présente une souplesse qui permet une adaptation constante aux exigences de l’économie et de la «société du savoir». La situation du marché du travail, avec un très faible chômage des jeunes, est un indice de la supériorité du système suisse sur les autres. Et l’ouverture de la formation professionnelle vers des études plus poussées offre des possibilités d’accession à toutes sortes de carrières.
Dans la Neue Zürcher Zeitung du 3 septembre les responsables de la formation en Suisse se sont fortement opposés aux thèses inconsistantes du livre blanc de Zimmerli. Ils mettent le doigt sur le fait que la formation exclusivement scolaire ne répond pas aux besoins du marché du travail, ce qui provoque un fort chômage au sein de la jeunesse. Ils mentionnent comme exemple la France et la Finlande, qui présentent un important pourcentage de diplômes de maturité, mais aussi un fort taux de chômage, surtout dans la jeunesse.
Michèle Rosenheck, directrice de la formation professionnelle à la Société suisse des employés de commerce (SEC Suisse), exprime dans la Neue Zürcher Zeitung des 5/6 septembre sa conviction qu’avec son double système de formation professionnel la Suisse dispose d’un atout de plus en plus appréciée dans le pays comme à l’étranger. Il offre à l’économie un atout local, un personnel hautement qualifié possédant aussi bien les connaissances théoriques que l’expérience pratique. Selon Mme Rosenheck «Les avantages du système de double formation sont indéniables. La formation professionnelle offre des perspectives aussi bien aux élèves doués pour la pratique qu’aux élèves doués pour la théorie – de plus elle intègre très tôt les jeunes dans le monde du travail.» Les exigences de compétences du livre blanc ont déjà trouvé une réponse, les élèves étant formés tant dans la pratique que dans la théorie et elle se demande aussi à quoi peut servir la recherche de pointe si elle n’est pas suivie d’une réalisation pratique offrant un enrichissement.
Dans la même édition, un lecteur estime «Dans notre pays il y a des dizaines de milliers d’entreprises, dont certaines sont de taille moyenne et quelques-unes de grande taille, fondées et dirigées par des gens qui n’ont pas fait d’études, mais qui ont bénéficié d’une bonne formation professionnelle. Ce sont des entrepreneurs indépendants qui contribuent au rayonnement de notre pays.» Il n’y a rien à ajouter à cela.    •