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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  N°16, 23 avril 2012  >  Différend fiscal avec la Suisse [Imprimer]

Différend fiscal avec la Suisse

par Erika Vögeli

Depuis 1936, la sphère privée des citoyennes et des citoyens, en ce qui concerne leurs finances, est protégée par le secret bancaire. Ce qui signifie que les banques n’ont pas le droit de communiquer à des tiers des informations concernant les finances de particuliers. Si un employé de banque contrevient à cette disposition, il est passible de sanction. Toutefois, cette protection n’a pas un caractère absolu. En cas de doute sérieux quant à un délit, le droit civil, le droit de poursuite en cas de dettes et de faillite, le droit pénal, le droit de la procédure pénale et le droit de l’entraide judiciaire en matière pénale prévoient différentes dispositions.
De plus, la place financière suisse possède de nombreux instruments pour refuser l’argent d’origine criminelle. Des règles exigent, p.ex., que les fortunes ne soient acceptées que dans la mesure où leur détenteur peut être identifié et l’origine de la fortune clarifiée. En comparaison internationale, les règles helvétiques sont très sévères. Le cadre en est fourni pas la Loi fédérale sur le blanchiment d’argent.
Du fait qu’en Suisse la fortune et les revenus de la fortune sont soumis à l’impôt, les établissements financiers déduisent depuis 1944 de tous les revenus de fortune, des intérêts, etc. un impôt anticipé, actuellement de 35%, qui est automatiquement transmis à l’Etat. Lorsque la fortune et ses revenus sont correctement déclarés, que les impôts dus sont payés, les impôts anticipés sont remboursés ou déduits des impôts suivants. Cette façon de procéder incite le contribuable à déclarer correctement sa fortune et les revenus qui en découlent.
Cette procédure existe depuis presque 70 ans. Toutefois, certains Etats européens et d’autres rencontrent des difficultés financières. Les dépôts de fortune de leurs concitoyens dans d’autres Etats, pour lesquels ils n’avaient pas payé d’impôt dans leur pays de domicile, pourraient représenter une source financière. Aussi la Suisse a-t-elle offert à ces Etats une solution qui, par analogie avec l’impôt anticipé suisse, protège la sphère privée des clients des banques mais offre à l’Etat étranger concerné la possibilité de percevoir des impôts. Avec cet «impôt libératoire», la banque prélève un impôt sur les intérêts, les dividendes et les revenus de capitaux mobiliers qu’elle remet de façon anonyme aux autorités fiscales de l’Etat en question. Cette solution est conforme à notre Etat de droit, elle respecte les contrats des clients étrangers tout en permettant à l’Etat étranger de voir respecter ses demandes justifiées.
Il n’est pas tolérable que le respect du droit national – la protection de la sphère privée dans le domaine financier – permette à des citoyens étrangers d’ignorer leurs devoirs légaux, en l’occurrence leur devoir fiscal. Tout cela peut être réglé au travers de négociations raisonnables. Il faut naturellement respecter la souveraineté de l’autre Etat, exigence fondamentale du droit international. Il est donc inacceptable d’ignorer les droits souverains et d’utiliser des méthodes malhonnêtes, voire illégales. Le vol de données par un employé de banque, pour lequel il doit rendre des comptes, est une chose. Une autre consiste à inciter des employés par des membres de l’administration d’un Etat à commettre de tels actes illégaux, et de plus à les payer pour cela, puis à utiliser les informations obtenues de cette manière contre l’Etat ou ses institutions.
Le fait pour un Etat de transgresser le droit ne peut constituer la base de relations internationales, encore moins d’une saine cohabitation entre voisins.
Qui enfreint le droit et, de surcroît, approuve cette façon de faire, ne peut plus être pris au sérieux; il perd sa crédibilité, ses relations perdent leur solidité et leur stabilité. Un tel Etat perd ses fondements. On ne peut donc que dire: non, pas comme ça.    •