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Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°51, 22 décembre 2008  >  Un moyen de paiement régional favorise la région [Imprimer]

Un moyen de paiement régional favorise la région

Entretien avec Christian Gelleri, directeur de Chiemgauer e.V.

Horizons et débats: Qu’est-ce que le Chiem­gauer?

Christian Gelleri: Le Chiemgauer est un moyen de paiement régional destiné à favoriser les circuits économiques régionaux et les associations régionales d’utilité publique.

Il y a déjà l’euro, pourquoi faut-il en plus le Chiemgauer?

Le Chiemgauer complète l’euro en tant que monnaie de toute l’Europe. Il sert à renforcer la région, à la favoriser, à donner la priorité aux circuits régionaux sur les circuits mondiaux. Cela veut dire que ce qui peut être fait dans la région ne doit pas nécessairement être fait à l’échelle interrégionale. Ce vieux principe de subsidiarité consiste à s’aider d’abord soi-même, à s’approvisionner par ses propres moyens et, si ce n’est pas possible, à faire des échanges avec d’autres régions. On obtient ainsi un mélange sain de régionalisation et de mondialisation.

Vous êtes l’initiateur du Chiemgauer. Comment en êtes-vous arrivé à le créer et quel était votre objectif?

Adolescent déjà, je m’intéressais au système monétaire. J’étais à la fois fasciné et choqué parce que j’avais lu que les systèmes moné­taires s’effondraient tôt ou tard, au bout de 20, 30, 50 ou 70 ans, et cela en principe depuis 3 à 4000 ans, chez les Grecs, chez les Romains, au Moyen Age ou récemment. Ils s’effondrent toujours. Je me suis demandé pourquoi et s’il n’était pas possible de développer un système durable? Et je me suis mis en quête d’alternatives.

Quels ont été les premiers pas? Comment a été créé le Chiemgauer?

D’abord nous avons mis sur pied un groupe de travail qui a développé le concept. Il a œuvré pendant environ trois ans. La tentative d’appliquer le concept sur une grande échelle a d’abord échoué.
J’ai ensuite suivi une formation d’en­seignant et plus tard j’ai eu l’idée d’introduire une sorte de monnaie de papier sur une toute petite échelle. C’était à l’école Waldorf à Prien, où dans le cadre d’une entreprise d’élèves, j’ai présenté mon idée et six élèves, six jeunes filles l’ont reprise avec enthou­siasme.

Et comment fonctionne maintenant le Chiemgauer?

Le Chiemgauer est un système de paiement ouvert. On peut changer des euros en Chiemgauer et vice-versa. L’objectif est que le Chiemgauer reste aussi longtemps que possible dans le circuit régional et qu’il crée le plus de plus-values possible.
Les consommateurs changent les euros en Chiemgauer. Un Chiemgauer contre un euro. Il y a des bons à 1 euro, à 2 euros, à 5 euros, jusqu’à 50 euros. Avec ces bons, les consommateurs vont faire leurs achats, comme avec l’euro.
Les entrepreneurs doivent payer une taxe de 5 % ou de 10 % lors du rachat d’euros. Pour éviter cette taxe, ils dépensent le Chiemgauer le plus possible dans la région. Il s’agit que le Chiemgauer passe le plus longtemps possible du boulanger au meunier, au paysan et au cordonnier, etc., qu’il reste dans le circuit.
Quel est l’avantage économique de ce système sur l’euro?
Le Chiemgauer a deux avantages: premièrement l’argent de la région ne peut pas être employé pour la spéculation et deuxième­ment, il reste toujours en circulation. Il est régulièrement périmé au bout de trois mois et il faut toujours le renouveler. Il s’ensuit que l’argent circule régulièrement dans la région. L’autre avantage est que l’on en revient aux intérêts régionaux et qu’on fait dans la région ce qui peut y être fait. Les domaines principaux comme l’alimentation, l’énergie, la construction, la circulation. Le but est de réaliser le plus de choses possible dans la région et le moins d’échanges possible de manière interrégionale. Ainsi cela se complète et produit une grande prospérité.

Quelles expériences avez-vous faites? Vos idées se sont-elles confirmées?

Je ne me suis pas fixé de buts trop ambitieux et je n’ai pas la prétention d’amener un changement politique du système. Je suis très satisfait que le système se développe de manière très dynamique. Nous avons commencé modestement avec 20 entreprises et un chiffre d’affaires de 70 000 Chiemgauer par an pour arriver à 640 entreprises et un chiffre d’affaires annuel de 3 millions de Chiemgauer. Le fait que la croissance soit si saine et dynamique prouve que nous sommes sur la bonne voie.
Mais il faut reconnaître qu’une initiative de citoyens ne peut pas résoudre les pro­blèmes de l’économie nationale. Il faudrait naturellement que l’Etat, que des acteurs plus importants interviennent. Mais je pense que ce développement lent, de bas en haut, est sain.

Depuis un certain temps, le Chiemgauer existe aussi comme moyen de paiement électronique. Quelles sont vos expériences?

Le Chiemgauer électronique est très important avant tout pour les entreprises. Imaginez un grossiste et un détaillant. Des ­sommes importantes sont en jeu, des milliers de Chiemgauer ou d’euros, des sommes de 5 à 6 chiffres. Réaliser cela avec du papier n’est pas une solution d’avenir. Nous l’avons compris dès le début et nous avons commencé relativement tôt de développer le Chiemgauer électronique. Nous l’avons depuis 2006 à titre d’essai et depuis 2007 officiellement. Les PME de la région utilisent entre elles avec succès ce Chiemgauer électronique comme moyen de paiement professionnel. Il n’est pas différent des comptes bancaires des banques régionales. Celles-ci offrent le service de gestion des comptes d’argent régional. Les entreprises peuvent travailler de façon rela­tivement simple et intégrer ces comptes de façon standardisée dans leur comptabilité et donc procéder comme avec des comptes bancaires ordinaires.

Vous avez déjà obtenu la participation des banques régionales. Est-ce que vous n’avez pas de difficultés avec la Deutsche Bundesbank?

Oui, au début il y a bien sûr eu des discussions au sein de la Bundesbank: fallait-il accepter ce genre de monnaie régionale ou s’y opposer? La Bundesbank a effectué une expertise. L’expert a constaté que les monnaies régionales ont peu d’ampleur et n’ont donc pas du tout d’influence sur l’économie nationale. Il en résulte qu’il ne vaut pas la peine de s’y opposer. En outre il existe dans d’autres pays, par exemple en Ecosse, des expériences similaires depuis des centaines d’années déjà, et les milliers de livres écossaises échangées n’ont pas représenté de danger pour l’économie nationale. La livre écossaise est une monnaie privée émise par la Royal Bank of Scotland qui est une banque privée. A partir de ces exemples, l’expert de la Bundesbank a conclu que les monnaies régio­nales ne ­peuvent pas nuire à l’économie nationale, même si elles deviennent cent fois, voire mille fois plus importantes. Il part du principe qu’il y aura davantage de monnaies régionales et qu’elles augmenteront en volume mais sans causer de dommages à l’économie nationale parce que le volume total restera relativement modeste.

A quelles objections vous heurtez-vous dans la vie quotidienne?

La première est que c’est compliqué. Mais elle vient, ce qui est intéressant, de personnes qui ne participent pas à l’expérience. En re­vanche, ceux qui y participent disent que ce n’est pas compliqué. Lorsqu’on a participé pendant une ou deux semaines, c’est aussi simple que de rouler à bicyclette. Il faut une semaine ou deux seulement pour apprendre les gestes. J’ai trouvé cela très intéressant. L’obstacle est plutôt psychologique. On a peur que ce soit compliqué mais une fois qu’on pratique le système, on le trouve assez simple.
Il y a souvent une autre objection: «Pourquoi faire nos achats régionaux avec l’argent régional quand on peut aussi les faire en euros?» Bien sûr qu’on peut aussi acheter les produits régionaux avec des euros, et il faut le faire pour donner un coup de pouce à l’économie régionale. Mais le Chiemgauer a un effet plus profond: Quand on remet le Chiemgauer à une personne, elle réfléchit: «Comment le dépenser dans la région? Et en le remettant à quelqu’un d’autre, elle l’amène à se poser la même question, à vouloir respecter la règle du jeu. Ainsi un effet systématique se produit. Il est très important qu’on ne soit pas seul à vouloir changer le monde, mais qu’un réseau se constitue et qu’on produise le changement ensemble. Je pense que le Chiemgauer est un bon moyen d’agir ensemble.

Quelles sont les prochaines étapes prévues?

D’abord une consolidation est nécessaire et il faut s’organiser pour mieux informer les consommateurs sur les offres existantes. Nous envisageons la création d’un journal. Nous devons nous demander comment informer régulièrement nos membres et les consommateurs sur des sujets d’actualité importants, comme le fait Horizons et débats, et également sur les offres régionales dont beaucoup de personnes ne savent rien. Une autre question est bien sûr celle des marchés financiers, de l’insécurité de la monnaie nationale. On se demande comment assurer la stabilité d’une monnaie régionale, comment la protéger de l’inflation ou de la déflation. Elles sont toutes deux également dangereuses pour l’économie.
Un troisième défi est d’arriver à investir dans la région. On dit souvent que la monnaie régionale n’est qu’un moyen d’échange, utilisable uniquement pour la consommation et qu’elle ne fait que pousser à la consommation. De plus en plus d’entrepreneurs, d’employés ont des Chiemgauer qui leur ­restent et ils veulent mettre de l’argent de côté pour leur retraite ou pour faire un achat important dans quelques années ou construire une maison. Il faut donc développer des instruments permettant de garder cette monnaie. Mais il faut que cet argent ne soit ni inactif ni utilisé pour spéculer, qu’il soit investi dans la région et qu’il y amène une dyna­mique, qu’il engendre de la croissance, qu’il apporte une vitalité durable à la région. C’est seulement si la région est économiquement forte que l’argent pourra finalement être remboursé aux gens et qu’ils pourront faire de nouveaux achats. On oublie souvent que ce qui a été épargné doit profiter à l’économie nationale et si elle perd en dynamique et en vitalité, ce qui a été épargné n’a plus de valeur. C’est l’inflation, l’argent perd de sa valeur. C’est ça qui est triste. Très souvent – les emprunts de guerre pendant la Première Guerre mondiale ou aujourd’hui les assur­ances vie ou les assurances de fonds – ne valent plus rien au bout d’une longue période, mettons 20 ans, et le réveil est brutal.

Merci beaucoup pour cet entretien.

La monnaie régionale du Chiemgau (Bavière)

par Christian Gelleri

L’idée initiale était de soutenir une école grâce à des achats dans des entreprises régionales. Celles-ci s’engageaient alors à faire don à l’école d’une partie de leur chiffre d’affaires. De son côté, l’école faisait quelque chose au profit de ces entreprises en attirant sur elles l’attention du public. Actuellement, de nombreux organismes et prestataires mettent en pratique ce principe de promotion mutuelle. Il faut savoir que 80% des places d’apprentis et 70% des emplois sont offerts par les PME. Elles passent pour occuper une main-d’œuvre beaucoup plus importante que les grandes entreprises aux capitaux élevés. En même temps, les PME offrent un service de qualité dû à leur proximité avec leur clientèle. Dans notre région, la quasi-totalité des entreprises sont des PME et constituent donc la colonne vertébrale de la création de valeur régionale. Cela dit, il ne s’agit guère de minimiser les mérites des grandes entreprises en matière de réalisation d’économies d’échelle, mais quand nous parlons de monnaie régionale, il s’agit surtout de promouvoir les PME dans leur diversité.
A part la promotion de la stabilité économique d’une région, il s’agit de renforcer les circuits économiques régionaux en réduisant les transports. A quoi bon transporter du jus de pomme sur des milliers de kilomètres si la région dispose de bonnes conditions de production? Souvent ce sont des détails qui empêchent le développement, soit que les producteurs et les consommateurs ne sont pas suffisamment informés, soit qu’il y ait des obstacles à l’investissement, soit que les potentiels soient tout simplement négligés. Or, dans ces cas-là, la monnaie régionale peut donner le coup de pouce nécessaire, réunir les producteurs et les négociants régionaux, informer les consommateurs, orienter le pouvoir d’achat vers le producteur et lier investisseurs et créanciers.

Acheter pour une bonne cause

La recette de la réussite de la monnaie du Chiemgau, le Chiemgauer, est basée sur trois principes qui déploient toute leur efficacité par leur réalisation simultanée. La première règle consiste à «acheter pour une bonne cause». Le profit ne résidant pas pour le consommateur, il est vrai, dans un avantage personnel, il peut profiter toutefois d‘un avantage financier pour le projet qu’il favorise sans être obligé de payer quoi que ce soit. Face à la diversité des sociétés et des projets, ­presque tous les consommateurs ont l’occasion de promouvoir une institution puisque, finalement, tout le monde profite d‘un organisme social qui fonctionne bien, d’une école, maternelle ou autre. En plus, ces projets sont liés à la promotion de l‘économie régionale à laquelle presque tous sont liés par des rapports personnels, ne serait-ce que par leur emploi, qui en dépend directement, ou celui de parents ou d’amis.

La contribution régionale

Puisque les consommateurs font une bonne action sans subir d’inconvénients, le réseau est nourri régulièrement de nouvelle monnaie régionale. Les fournisseurs de marchandises ou les prestataires de services ont ainsi le choix entre continuer à dépenser la monnaie régionale ou, s‘ils préfèrent, de la changer contre des euros, cette opération leur coûtant 5% par Chiemgauer et 10% par Sterntaler et leur demandant l‘effort de se rendre à l’office de diffusion de la monnaie et de porter le coût du change dans leurs comptes. En revanche, il est plus simple et plus économique de dépenser la quantité de monnaie régionale qui correspond aux revenus obtenus dans ladite monnaie. Cela se fait par le prélèvement de profits pour les dépenses privées de l‘entrepreneur, par le versement de salaires aux employés, les paiements aux fournisseurs et aux prestataires de services, par des dons à des associations ou par d‘autres dépenses de l’entreprise. Au fur et à mesure que de plus en plus d‘entreprises suivent cet exemple, en économisant ainsi la contribution régionale, les circuits économiques régionaux prennent de plus en plus d‘ampleur. On peut le démontrer en prenant l‘exemple du Chiemgauer. Si, la première année, 90% des Chiemgauer étaient échangés à nouveau contre des euros, ce pourcentage s‘est réduit: au cours de la deuxième année, il n’étaient plus que de 60%, la troisième année de 50% et la cinquième année de 35%.

Impulsion cyclique

Dans le système des Chiemgauer, les bons arrivent à échéance à la fin de chaque tri­mestre, nécessitant leur prolongation pour trois mois grâce au paiement d’un timbre coûtant 2% de la valeur du bon, ce qui représente 8% pour quatre trimestres. Il en résulte qu’on n’a aucun intérêt à amasser la monnaie régionale ou à l’utiliser pour des spéculations financières et celui qui voudrait épargner trouvera difficilement quelqu‘un qui soit prêt à payer l‘intérêt élevé pour les bons périmés. Celui qui désire épargner en monnaie régionale se contentera de ce que son créancier lui rende, à l‘échéance, de la monnaie régionale «fraîche».
Ainsi, la monnaie «vétuste» a d‘abord un effet stimulant sur l‘activité économique puisque ceux qui possèdent des bons «vétustes» sont pressés de s‘en débarrasser. Il en résulte pour les fournisseurs de marchandises et les prestataires de services une demande constamment accrue. Il s‘agit moins d’augmenter la croissance que de «rendre permanente la demande». Celui qui dépense de la monnaie régionale peut être sûr qu‘elle rentrera, tôt ou tard. Cela permet des planifications plus sûres.
Le deuxième effet de cette «monnaie à valeur décroissante» est qu’on a une forte envie de la dépenser. Même un taux d‘intérêt zéro reste acceptable puisque le possesseur peut faire l’économie des taxes sur les liquidités. Quant à l‘emprunteur, l‘intérêt réduit lui donne la liberté de choisir entre différentes possibilités d‘investissements. Naturellement, l’aspect rendement continue de jouer son rôle, mais les investisseurs sont à l‘abri de toute contrainte absolue parce que même l’achat d’un chêne, par exemple, est rentable.
Dans le système des Chiemgauer, la vente des timbres de prolongation du crédit profite aux organisations à but non lucratif. Et avec la monnaie régionale électronique les règlements sont beaucoup plus simples puisqu‘on en déduit chaque jour un pourcentage minimal. Pour éviter la diminution de valeur de sa monnaie, celui qui possède des bons peut en tout temps placer son argent sur un compte à taux zéro. Cela rend possible des crédits à taux favorable.
La monnaie régionale s’avère être ainsi un concept global à capacité intégrative qui fait que la monnaie «vétuste» se transforme tout naturellement en des formes d’épargne à intérêt zéro qui, de leur côté, constituent la base de crédits à intérêts avantageux. A cela s’ajoute le développement de ce qu’on appelle des «fonds à risque» qui offrent aux créateurs d’entreprises des conditions de crédits favorables. Or, paradoxalement, c’est justement ceux qui ont le moins de moyens qui doivent payer les taux d’intérêt les plus élevés tandis que ceux qui ont déjà réussi ont accès aux meilleures conditions. Un «fonds à risque» pourrait réduire partiellement ces inégalités.

Les petits frères et les petites sœurs de l’euro

Ces derniers temps, en Allemagne et en ­Autriche, on a assisté à la création d’initia­tives régionales prometteuses. Actuellement, 16 initiatives offrent des bons régionaux, chacune ayant ses particularités. A Graz, le Styrrion est une entreprise d’écoliers; le Waldviertler en Haute-Autriche, soutenu par la Chambre du travail et le Ministère de l’Economie a son origine dans une fabrique de ­chaussures; dans la région de Berchtesgaden, le Sterntaler fait le lien entre la monnaie régionale et un réseau d’échanges; le Regio, en Haute-Bavière, est administré par une banque, l’Urstromtaler, en Saxe-Anhalt, crée des circuits économiques tout à fait nouveaux tandis que le Volmetaler, à Hagen, est soutenu par le patronat de la ville.
L’amour de la patrie et l’évolution d’une Europe commune ne sont pas incompatibles, pas plus que l’euro et le Chiemgauer. Recourons à une image: Les monnaies régionales res­semblent aux dauphins qui, vifs et divers, animent les mers tandis que les monnaies nationales sont comme les baleines. A observer ces dernières, on pourrait penser que des animaux de cette taille n’ont pas besoin de «compléments», mais la mer offre ses espaces également aux dauphins.

Normes de valeur et de qualité de la monnaie régionale

L’association des initiatives de la monnaie régionale tient à ce que les dauphins ­respectent certaines règles du jeu et elle les a fixées sous forme de normes de valeur et de qualité. Elles postulent que la monnaie régionale doit représenter un gain pour la collectivité et non pas servir des intérêts particuliers uniquement. Un des objectifs principaux est de créer des circuits économiques régionaux, et cela à l’aide d’un moyen de paiement «neutre» vis-à-vis de tout achat, emprunt ou don. Il ne doit donc pas provoquer de nouvelle répartition entre pauvres et riches par le biais des effets des intérêts cumulés. En plus, les responsables de la monnaie régionale doivent travailler de manière transparente en ce qui concerne les structures, les chiffres, les processus de travail et la communication interne et externe. Les décisions sont prises démocratiquement et selon le principe de l’égalité des droits. Par exemple, après avoir désigné démocratiquement les décideurs, une structure professionnelle est nécessaire pour garantir une action efficace. Il faut travailler de manière professionnelle et viser des objectifs précis pour réussir. Toutes les personnes concernées doivent être conscientes que l’initiative régionale doit, à longue échéance, se financer elle-même, ce qui ne se fera pas par un travail uniquement bénévole, mais nécessitera la rémunération des personnes qui s’engagent de manière durable. Les contributions dues doivent couvrir les coûts de l’initiative tandis que tout le surplus profite au bien commun. Pour éviter qu’on ne cesse de réinventer la roue, les initiatives de la monnaie régionale collaborent pour découvrir et mettre en oeuvre de nouvelles synergies.
La monnaie régionale doit finalement être soutenue par des personnes capables d’accorder la priorité à la cause qu’elles défendent, de transmettre l’idée aux autres et de la mettre en ­œuvre. Elles ont besoin du soutien de ceux qui, pour des raisons personnelles, ne peuvent pas fournir une contribution importante mais ne se contentent pas d’acquiescer à l’idée et s’en­gagent à l’intégrer dans leur vie quotidienne. Si la monnaie régionale entre tout naturellement dans le comportement des individus, elle déploie avec le temps les effets attendus en direction d’une culture économique équilibrée, non fondée sur l’exclusion, une culture de la tolérance et de la démocratie, une culture de l’échange honnête où les talents s’épanouissent de manière à ce que les individus aussi bien que la société et l’environnement puissent se développer durablement.

Bibliographie et liens Internet

Gelleri, Christian (2005): Assoziative Wirt­schaftsräume in: Fragen der Freiheit, Bad Boll, 2005
Gesell, Silvio (1986): Die natürliche Wirtschafts­ordnung – Durch Freiland und Freigeld, Lauf, 1986.
Kennedy, Margrit, Lietaer, Bernard (2004): Regionalwährungen – Auf dem Weg zu nachhaltigem Wohlstand, München, 2004.
Lietaer, Bernard A. (1999): Das Geld der Zukunft – Über die destruktive Wirkung des existierenden Geldsystems und die Entwicklung von Komplementärwährungen, Pössneck, 1999.
Sites Internet:
Projet du Chiemgauer e.V.:
www.Chiemgauer.info
Verband der Regiogeld-Initiativen:
www.Regiogeld.de