Horizons et débats
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Tél.: +41-44-350 65 50
Fax: +41-44-350 65 51
Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité
pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
18 juillet 2016
Impressum



deutsch | english
Horizons et debats  >  archives  >  2010  >  N°45, 22 novembre 2010  >  Des parcs naturels copiés sur l’UE [Imprimer]

Des parcs naturels copiés sur l’UE

L’ordonnance sur les parcs naturels en Suisse est un projet SDEC1

Interview d’Anton Niederberger, Grand Conseiller, Nidwald*

Horizons et débats: Quand avez-vous découvert la problématique des parcs naturels et plus spécialement celle du «Parc naturel Urschweiz»?

Anton Niederberger: C’est en juin 2009 que le dossier est parvenu pour la première fois au Grand Conseil du canton de Nidwald. C’était un thème qui m’intéressait beaucoup et j’ai commencé à étudier les ordon­nances. J’ai constaté qu’elles impliquaient une restriction de nos libertés. Par la suite, lors d’une réunion du groupe parlementaire de notre parti, l’UDC de Nidwald, j’ai exposé le sujet et nous nous avons décidé de combattre ce projet.
Ce qui est intéressant c’est que tous les partis du Grand Conseil ont pris position contre notre parti. Nous aurions voulu empêcher l’amendement d’une loi qui permettait la création d’un parc naturel. La majorité du Grand Conseil a malheureusement accepté cette loi, ce qui a rendu possible l’adhésion de quatre communes au parc naturel et l’argent a pu être mis à leur disposition.
Pour moi, ce thème est resté d’actualité, car je savais qu’il y aurait des consultations dans les communes, soit au sein de l’assemblée communale, soit par les urnes.

Il y a peu de gens qui prennent aussi clairement position publiquement que vous.

Opposant au parc naturel, j’ai publié un ar­ticle dans la Feuille officielle. Il y a deux mois, un débat public a été organisé dans la salle communale d’Oberdorf. J’étais le seul opposant sur le podium contre 6 partisans et l’animateur, également favorable au parc naturel. Mais le débat s’est très bien passé pour moi comme opposant au parc naturel. Je m’étais préparé soigneusement et j’avais des arguments convaincants.
Un mois plus tard, un journaliste, également présent lors du débat public, m’a demandé une prise de position. Dans la «Luzerner Zeitung», dans les pages consacrées à Nidwald, Obwald, Uri et Schwyz, il voulait publier un «pour ou contre» et il m’a demandé si je voulais bien écrire un ar­ticle. J’ai été d’accord mais à condition que la rédaction n’y change rien. L’article a donc été publié mot pour mot.

Quelles ont été les réactions?

J’ai entendu dire que les partisans au parc ont été effrayés par mon article et qu’ils ont convoqué une réunion de crise le soir même. Cela me montre qu’il y a anguille sous roche chez les partisans et qu’ils ont pris peur parce que leurs arguments ne tiennent pas la route et qu’ils le savent très bien. On n’est pas honnête envers la population. Il faut que l’opposition au parc naturel se poursuive.

Que disent les partisans à la population?

Ils n’ont pas de véritables arguments, ils ne peuvent que nous faire miroiter un monde imaginaire, nous dire que la nature sera encore plus verte et autres boniments. Ils créent des scénarios catastrophes, nous font croire que la nature sera détruite, que des choses tirées par les cheveux, car ils savent très bien que pour les propriétaires de terrains cela signifie des restrictions en matière de droit de propriété. Mais ils nous le cachent car sinon personne ne donnerait son accord. Il est évident que l’ordonnance restreint le droit de propriété.
Il est inadmissible que ce soient toujours les gens des villes et des agglomérations qui se retrouvent dans les bureaux de la protection de l’environnement, des gens qui ont fait des études n’ayant rien à voir avec la création de valeur et qui, avec leur formation, ne trouveraient pas d’emploi si ce n’est en créant leurs propres emplois, par exemple pour organiser de tels parcs. Si l’on y regarde de près, ce sont des gens qui sortent de leurs bureaux et viennent dans notre région dire à la population des montagnes comment elle devrait vivre à l’avenir et ce qu’elle doit faire pour que la nature puisse «survivre». Et ils veulent nous faire croire que sans parc na­turel, tout serait détruit.
Depuis des générations, voire un millénaire, nous prenons soin de la nature, de sorte qu’elle constitue aujourd’hui un véritable parc naturel. Et nous continuerons de nous engager en faveur de la sauvegarde de notre nature, mais sans parc naturel.

Comment expliquez-vous que partout dans le pays on prévoie la création de parcs naturels?

Après avoir eu vent du projet, j’ai naturellement commencé des recherches et je suis tombé sur des ordonnances anglaises sur les parcs naturels. J’ai voulu savoir plus exactement de quoi il retournait et j’ai vu que je me trouvais face au programme SDEC (Schéma de Développement de l’Espace Communautaire), donc à l’UE. Et puis, à mon grand étonnement, j’ai constaté que les ordonnances sur les parcs naturels suisses ont été copiées directement sur ce programme. Pour moi, la seule explication est que dans l’UE, il existe déjà un bon nombre de ces parcs et que d’autres sont planifiés. On les a donc repris de l’UE et, à mon avis, c’est l’ex-conseiller fédéral Leuenberger qui a voulu les introduire en Suisse. Il a copié l’organisation et les ordonnances sur celles de l’UE. Il est incroyable qu’un pays souverain adopte des ordonnances de Bruxelles! C’est une raison de plus de les combattre.

Qu’est ce qu’il y a là-derrière? Pourquoi devrions-nous adopter quelque chose d’étranger?

J’ai continué mes recherches et je soupçonne que Bruxelles voudrait faire de la Suisse un musée de la nature. On ne devrait plus pratiquer l’agriculture que dans les régions à forte productivité, c’est-à-dire en plaine. L’industrie et la technologie seraient maintenues là où elles sont déjà concentrées, cela afin de construire, d’après le projet de l’UE, l’Europe des régions. Les Alpes ne seraient plus qu’une région de loisirs et là, la population des montagnes est un obstacle. Comme l’UE a plus d’argent et que des pays comme l’Italie, l’Autriche, la Slovénie, etc. devraient encore en recevoir de là-bas pour leur agriculture, on fait de la région des Alpes un espace de loisirs avec une nature qui tomberait en friche, ce qui réjouit ceux qui se disent «verts». L’UE pourrait alors investir ailleurs.
C’est vraiment étranger à notre pays.
Oui, chez nous la population des montagnes vit là-bas depuis des millénaires. La Suisse n’est pas dans l’UE, nous sommes un pays souverain. Nous devons défendre cette souveraineté de même que notre nature mais sans parcs naturels de l’UE et sans ordonnances européennes.

Est-ce que notre eau joue aussi un rôle ici?

L’eau de la planète va devenir un sujet important. Je voyage beaucoup à travers le monde et je vois que dans des régions très peuplées il n’y a souvent pas assez d’eau douce. Dans certains pays, c’est déjà un problème primordial, dans d’autres pays cela le deviendra. Nous devons compter avec une guerre pour l’eau douce. En Suisse, au centre des Alpes, nous avons naturellement beaucoup d’eau et il faut se rendre compte que trois fleuves très importants ont leur source en Suisse. En outre, il y a l’Inn qui se jette dans le Danube, cela fait donc quatre fleuves importants. Il y a des sociétés et des pays qui s’intéressent à notre eau des Alpes. De grandes sociétés veulent acheter nos sources. Nous devons faire attention, c’est une matière première d’avenir, une matière première très importante; bien sûr, notre souveraineté est en jeu, nous devons absolument la sauvegarder. Tous ces parcs naturels pourraient être un moyen de saper notre droit.

La Suisse est, comme vous venez de le dire, une démocratie directe souveraine. Quels effets les parcs naturels auront-ils sur notre démocratie?

Les parcs naturels sont organisés de manière insensée. Ceux qui se chargent de leur gestion constituent une corporation qui décide de façon indépendante de l’ordonnance sur les parcs naturels, en plus de la «Charte» (description détaillée de la suite des opérations) et de tout ce qui en dépend. Et nos autorités, le conseil communal et le président de commune (exécutif) ainsi que l’assemblée communale n’ont pas leur mot à dire mais ils devront ensuite exécuter les ordres de cette corporation. C’est en totale contradiction avec les procédures de notre démocratie directe que nous avons depuis des centaines d’années dans les cantons et les communes. La population n’a plus rien à dire. Nous détruisons nous-mêmes lentement nos structures de démocratie directe. Nous ne pouvons pas le permettre.    •

* Anton Niederberger est ingénieur en construction mécanique et a fondé différentes sociétés. L’une d’elles construit des robots. Il siège en tant que député UDC au Grand Conseil de Nidwald.

Le château d’eau du pays est en jeu

hd. Subitement, des «parc naturels» se mettent à pousser en Suisse comme des champignons. Il existe environ 30 projets répartis sur l’ensemble du pays. On cherche à appâter les citoyens en leur promettant une meilleure protection de la nature. Dans ce domaine, l’Union européenne n’a-t-elle pas assez à faire sur son propre territoire? Pourquoi l’imiterions-nous?
La population suisse aime tellement la nature qu’elle risque d’en oublier bientôt la vie réelle, par exemple celle des paysans. Les présentations de projets de parcs dans des brochures sur papier glacé ont un relent d’économie financière néolibérale: On n’y trouve plus ni Suisse ni citoyens mais seulement des bipèdes dociles luttant pour leur survie, le tourisme occupant la première place et subordonnant tout le reste. Pour qui, en fait? Pour des oligarques russes, des cheikhs arabes, une classe supérieure chinoise dont on dit qu’elle aime beaucoup la nature? Ces messieurs les conseillers nationaux et les conseillers aux Etats qui ont la haute main sur ces projets devront bientôt répondre à la question de savoir s’ils veulent faire de nous autres Suisses un peuple de prostitués au service des 20% plus riches de ce monde.
Derrière le dos de l’ensemble de la population, tout le château d’eau de la Suisse sera peu à peu loué puis vendu. La protection de l’environnement sert d’appât. On ruine les paysans afin qu’ils n’aient plus ni le temps ni la force de résister, car leur famille devra exercer un second métier à temps partiel ou à plein temps.
Aujourd’hui, comme dans di­verses communes des Grisons, de la Suisse centrale et orientale, des votations sur l’adhésion à un «parc naturel» sont imminentes, il est urgent d’attirer l’attention de la population et des politiciens communaux sur ce dans quoi ils risquent de s’aventurer. Il est encore temps de songer aux conséquences et de dire non. Ce ne sera bientôt plus possible.