Horizons et débats
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Tél.: +41-44-350 65 50
Fax: +41-44-350 65 51
Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité
pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
18 juillet 2016
Impressum



deutsch | english
Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°49, 8 décembre 2008  >  Le Conseil des droits de l’homme décide d’enquêter sur les causes de la guerre au Congo [Imprimer]

Le Conseil des droits de l’homme décide d’enquêter sur les causes de la guerre au Congo

ef. La 8e session extraordinaire du Conseil des droits de l’homme consacrée à la situation dans l’Est du Congo a pris fin le 1er décembre. Après un débat contradictoire, la Résolution de l’Egypte, présentée au nom du groupe des pays africains, a été adoptée. Au nom de l’UE, la France a retiré sa Résolution. Ce texte n’évoquait pas la question des causes du conflit et ses opposants y voyaient la justification anticipée d’une éventuelle intervention militaire au Congo. (cf. Horizons et débats no 48 du 1er décembre).
Dans la Résolution, qui a été adoptée par consensus, le Conseil des droits de l’homme condamne non seulement les violences et les violations des droits de l’homme au Nord-Kivu, avant tout les abus sexuels et le recrutement d’enfants-soldats par les milices, mais il appelle également la communauté internationale à enquêter sérieusement sur les causes du conflit, notamment sur l’exploitation illégale des matières premières. Il veut contribuer ainsi à favoriser la paix et la stabilité en République démocratique du Congo (RDC) et à soutenir les efforts du gouvernement.
Le dimanche 1er décembre, la délégation de la RDC avait fait remarquer que la plupart des interventions faites jusque-là concernaient les conséquences du conflit et non ses causes. Ainsi, le délégué Sébastien Mutomb Mujing a déclaré que l’envoi massif d’observateurs et de rapporteurs spéciaux ne contribuait pas à soulager les énormes souffrances de la population. Ce qu’il faut, c’est exercer de fortes pressions internationales sur les rebelles qui sèment la haine dans la région des Grands lacs. Il est vital que les réfugiés puissent rentrer chez eux.
Il a insisté sur le fait que l’armée du pays a été restructurée et qu’elle contient maintenant également des combattants d’anciens groupes rebelles qui commettent des violations des droits de l’homme et jettent le discrédit sur l’ensemble de l’armée.
En ce qui concerne les pays voisins, il a souligné le fait que certains d’entre eux sont devenus de très importants exportateurs de matières premières alors que leur sous-sol n’en contient pas. Font-ils donc tout pour empêcher une solution au conflit et la fin des massacres?
Le résultat de la session extraordinaire montre que les pays africains ont gagné en assurance et ne se laissent plus commander par le monde occidental. De plus en plus de responsables africains sont conscients maintenant que les Etats leaders de l’UE et les USA veulent installer une nouvelle domination coloniale sur l’Afrique, pire que celle des décennies passées. Et les Africains n’accepteront pas cela.
Pour les habitants des pays industrialisés également, la nouvelle politique coloniale ne vise que les profits d’un petit nombre de personnes. Les énormes dépenses d’armement se font toujours au détriment des hommes, si bien que dans les pays «riches» comme les Etats-Unis ou l’Allemagne, la pauvreté prend une ampleur alarmante. Ainsi, en Allemagne, on trouve de nouveau des enfants qui ont faim.
Le fait que les gouvernements occidentaux continuent de miser sur la guerre apparaît de manière exemplaire dans la politique des Etats-Unis et dans le développement de leur Centre de commandement pour l’Afrique, l’AFRICOM. Il y a quelque temps, le gouvernement américain voulait déplacer le siège de l’AFRICOM en Afrique, mais aucun Etat africain n’a été d’accord de l’accueillir, si bien qu’il a dû rester à Stuttgart. Toutefois, l’AFRICOM a été développé et une importante ambassade a été créée à Goma, dans l’Est de la RDC. Selon des sources congolaises, les Etats-Unis ont installé au Rwanda, près de la frontière avec la province du Kivu, une base militaire construite par la firme Halliburton. C’est à peu près à ce moment-là que les conflits ont éclaté, et pas uniquement dans l’Est du Congo. On a également monté en épingle dans les médias la question de la piraterie au large de la Somalie afin de justifier une intervention militaire de l’UE et des USA après qu’on eut essayé, deux ans auparavant, d’écarter ceux qui, en Somalie, luttaient véritablement contre les pirates.
Des analystes comme F. William Engdahl («AFRICOM, China und die Kriege im Kongo»)1 supposent que ce qui intéresse l’UE et les USA, ce ne sont ni les droits de l’homme ni les attaques de pirates (manigancées?) mais la mainmise directe sur la Corne de l’Afrique riche en matières premières, qui va du Golfe d’Aden au Soudan et à l’Est de la RDC. A cela s’ajoute le contrôle des voies de transport dans l’océan Indien. L’UE et les USA considèrent comme une «menace» que la Chine ait pris pied depuis quelques années déjà en Afrique et ait conclu des contrats équitables avec les Etats africains.
La Chine a conclu avec le gouvernement congolais un contrat de 9 milliards de dollars qui assure à des entreprises chinoises l’accès à 10,6 millions de tonnes de cuivre et à plus de 600000 tonnes de cobalt. En contrepartie, Pékin a promis d’investir 6 milliards de dollars dans la construction de routes, de chemins de fer, de centrales hydrauliques, d’hôpitaux et d’écoles ainsi que 3 milliards dans des projets miniers.2
Le chef des rebelles Nkunda, pendant de longues années compagnon de lutte du président rwandais Paul Kagame, s’oppose à cela et a déjà menacé d’envahir le Kinshasa. Sous prétexte de protéger une minorité tutsie dans l’Est du Congo, il lutte pour étendre le contrôle rwandais sur le Congo afin de continuer à piller ses richesses minières et les livrer à ses commanditaires de l’UE et des USA. Depuis des années, les matières premières passent illégalement à l’étranger via le Rwanda. Selon des rapports d’experts de l’ONU, la vente illégale de coltan, minerai très convoité, a, au cours des 18 derniers mois, rapporté 250 millions de dollars à l’armée rwandaise. Le Rwanda est soutenu par les Etats-Unis et l’Allemagne.    •

1    http://info.kopp-verlag.de, 27 novembre 2008
2    www.german-foreign-policy.com, 3 novembre 2008