Le scandale à propos des déchets de Naples prend des formes de plus en plus grotesques

Une entreprise américaine doit procéder à des contrôles

bha./thk. Il y a quatre mois, lorsqu’un couple italien a demandé asile en Suisse, l’opinion publique suisse a commencé à se rendre compte de l’horrible situation due au scandale des déchets à Naples et alentours. Des tonnes de détritus s’entassaient dans les rues de Naples et sur les dépôts illégaux des environs en Campanie. Les effets sur la santé sont désastreux depuis des années, l’institut de recherche sur les tumeurs «Pasquale» de Naples a relevé un très haut taux de tumeurs. Différents films, enregistrés par des amateurs, montrent de manière toute crue les dimensions apocalyptiques de cette catastrophe. Des tonnes de résidus toxiques sont stockées en Campanie. Dans les grottes du Vésuve avoisinantes, il pourrait se trouver des résidus nucléaires hautement to­xiques. Qui en sait davantage? Apparemment – selon les dires unanimes des citoyens concernés de Naples – personne ne veut en parler ou en savoir quoi que ce soit.

Quatre mois plus tard, le couple tente une nouvelle fois d’obtenir l’autorisation pour être accueilli en Suisse car avec la chaleur de l’été la situation s’aggrave. La femme est enceinte et attend son premier bébé. Il règne presque une guerre civile, les montagnes de détritus s’entassent et la population proteste depuis des années contre cette catastrophe. Selon l’avis d’une personne concernée, c’est le résultat de la mafia et d’une politique complètement ratée des autorités, dont les effets ne se font pas voir seulement dans les rues de Naples. Silvio Berlusconi a fait de cette politique ratée le sujet de sa campagne électorale. Il a accusé le gouvernement Prodi d’avoir échoué bien que le problème existât déjà sous son gouvernement, et il a promis à la population une amélioration rapide s’il était élu.
Pourtant, les déchets continuent à puer, les maladies qui sont transmises par les rats se répandent rapidement avec la grande chaleur, il existe déjà maintenant un risque aigu d’épidémies et il n’y a pas d’amélioration en vue.
Il y a deux semaines, la nouvelle qu’une entreprise américaine Tetra Tech ait été chargée de prélever des échantillons du sol, de l’air et de l’eau qui seraient alors examinés dans des laboratoires allemands a éveillé l’attention des personnes averties. Le but de ces activités serait d’examiner s’il existe un risque de santé pour les soldats américains. Tetra Tech travaille très souvent pour le Département de la Défense des USA et a ainsi certainement des liens étroits avec la CIA. On a remis à cette entreprise la charge des travaux de déblayage du Ground Zero après le 11 septembre 2001 et la décontamination de l’antrax (bacille du charbon) lors des attaques survenues après le 11-Septembre à New York et Washington. Tetra Tech est entre autre chargée d’examiner la contamination radioactive des bases américaines en Irak, provoquée par l’utilisation de leurs propres armes à l’uranium, et de les «nettoyer». Cette entreprise prélève maintenant des échantillons de sol, d’air et d’eau et les fait analyser dans un laboratoire en Allemagne. N’est-ce pas grotesque?
En même temps, Berlusconi a déclaré que la région de Naples a un intérêt stratégique au niveau national et qu’il y installera d’autres dépôts qui se trouveront sous protection militaire. Sous le gouvernement Prodi, une loi avait déjà été adoptée qui stipule que les dépôts, le emplacements de centrales nucléaires, les stockages de déchets radioactifs etc. tombaient sous le secret d’Etat et ainsi sous la surveillance particulière de l’armée. De cette manière, le gouvernement peut charger une entreprise américaine d’analyser la zone.
C’est inouï! Veut-on prouver que les Européens ne sont pas capables de s’occuper «eux-mêmes» de leurs propres détritus? A-t-on besoin d’aide «compétente» d’outre-mer? De quoi s’agit-il au juste? Il doit y avoir un lobby puissant qui aimerait que le système de récolte des déchets soit complètement privatisé: pour celui-ci cette évolution est la bienvenue.
Selon certaines rumeurs, il y aurait en outre en Campanie des tonnes de déchets radioactifs stockées dont l’origine est inconnue. Quand on voit le déploiement de policiers repoussant la population qui tente de barrer la route aux camions, cela fait immédiatement penser à Gorleben. Le gouvernement italien couvre-t-il des dépôts de déchets radioactifs émanant de centrales nucléaires?
Une entreprise américaine qui doit prélever des échantillons d’eau, d’air et de sol, un Etat qui ne met pas les cartes sur la table, des ordures radioactives et toxiques qui sont un énorme danger pour l’homme et son environnement, sans perspectives d’amélioration mais avec la perspective d’une présence militaire permanente tout autour de ces dépôts à déchets «secrets». De quel jeu s’agit-il ici?
La région de Campanie est un territoire hautement militarisé. Il y a là d’immenses installations de radars, plusieurs bases militaires italiennes et américaines et diverses fabriques d’armes de renom. S’agit-il même d’un site d’essais en plein-air pour des armes nucléaires? L’entreprise américaine doit-elle analyser les conséquences sur l’environnement, les animaux et les êtres humains pour tester les effets que ces armes ont dans les régions en guerre et comment leur utilisation peut être camouflée? Beaucoup de questions restent ouvertes – pour la population souffrante et pour les régions et les pays voisins. Car finalement, ces questions concernent toute l’humanité …
Le couple italien a demandé asile en Suisse pour des raisons loyales. Jusqu’à présent personne n’a aidé.    •