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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2013  >  N°18, 20 mai 2013  >  Indignation hypocrite de la part de Bruxelles [Imprimer]

Indignation hypocrite de la part de Bruxelles

Pourquoi la Suisse est le souffre-douleur préféré de l’Europe

Un commentaire de Wolfgang Koydl, Zurich

La Suisse veut limiter l’immigration de citoyens de l’UE – et l’Europe s’en indigne. Mais l’excitation des pays limitrophes est hypocrite et détourne le public de leurs propres fautes et négligences. Les Confédérés vont mieux parce qu’ils font mieux beaucoup de choses.

Présumons que chaque année 800 000 réfugiés économiques arrivent en Allemagne de toutes les parties de l’Union européenne pour chercher salaire et pain – outre les quelques quatre millions de Polonais qui, au cours des années écoulées, ont conquis de plus en plus de métiers, de la caissière chez ALDI à l’universitaire. A quel point la politique réagirait avec sang-froid? A quel point les gros titres de la «BILD-Zeitung» seraient-ils modérés?
Et pourtant ce sont-là les dimensions, estimées pour la République fédérale, auxquelles la Suisse doit faire face depuis plusieurs années: environ 350 000 Allemands travaillent durablement dans notre pays, et l’afflux total de l’UE s’élève à presque 1% de la population totale de la Suisse – par année. Il est facile de s’imaginer quelles en sont les conséquences pour le marché du logement, les écoles et les infrastructures.
Et l’on prétend que non, comme le prouve l’indignation hypocrite de Bruxelles concernant la limitation de l’arrivée de citoyens de l’UE décidée par le gouvernement de Berne. Dans tout cela, on ne veut pas voir que la mesure prise par la Suisse est avant tout de caractère symbolique pour la politique intérieure du pays: elle concerne environ 3000 personnes, n’est valable que pour les immigrés qui veulent rester plus de cinq ans, et se terminera sans autre suite dans une année.
Mais il s’agit d’autre chose quand les Européens veulent faire leur fête aux Confédérés prétendument têtus et sournois. Avec la Suisse, on semble avoir trouvé un souffre-douleur idéal auquel on peut reprocher ses propres fautes et négligences, et dont font partie notamment les systèmes fiscaux injustes à cause de leur opacité, et la politique industrielle ratée ou manquante. Alors, la devise: «C’est qui le voleur?»
Les raisons des petites et grandes évasions vers la Suisse, – que ce soit de l’argent non imposé ou des employés sans emploi – ne doivent pas être cherchées dans notre Confédération, mais dans les pays européens autour de nous.
Oui, il y a des conseillers de banque suisses qui ont élaboré des modèles pour limiter les charges fiscales de clients allemands. Mais ils n’ont pas volé leur argent pour le transporter à Zurich. Tous ces dentistes, avocats et personnes de la classe moyenne sont venus en Suisse de leur propre gré. Et pas toujours pour commettre des fraudes fiscales, mais souvent parce qu’ils ont davantage de confiance dans le franc suisse et une banque suisse que dans l’euro et la Deutsche Bank.
Les employés européens qui se trouvent à Lucerne ou à Lausanne n’ont pas non plus été faits prisonniers par des mercenaires confédérés et traînés au-delà de la frontière en tant que déportés du travail. Ils sont aussi venus de leur propre gré parce qu’ils ont trouvé en Suisse des emplois bien rémunérés et de bonnes conditions de travail.
Car la Suisse se porte toujours et encore assez bien, «merci viilmal». Finalement elle doit importer de la main-d’œuvre justement parce qu’elle a de la peine à accomplir la fabrication de la grande quantité de produits qu’elle exporte dans le monde entier.     •

Source: Süddeutsche Zeitung du 26/4/13

(Traduction Horizons et débats)