Horizons et débats
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Tél.: +41-44-350 65 50
Fax: +41-44-350 65 51
Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité
pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
18 juillet 2016
Impressum



deutsch | english
Horizons et debats  >  archives  >  2013  >  N°25, 12 août 2013  >  Le citoyen et la politique extérieure [Imprimer]

Les adieux et les remerciements

Le 8 décembre 1965, devant l’Assemblée fédérale

Monsieur le Président,
Messieurs les Conseillers nationaux et Conseillers aux Etats,

Permettez-moi d’abord de vous remercier, Monsieur le Président, pour vos aimables et honorables paroles que vous avez consacrées à mon travail au service du pays. Vous avez exprimé la bienveillance à l’égard de mes activités, que j’ai toujours ressentie de la part des membres des deux Chambres au cours de mon appartenance au gouvernement fédéral et dont j’aimerais vous remercier de tout cœur. Les raisons de gratitude sont aujourd’hui entièrement de mon côté. Je pense avant tout à mes anciens et actuels chers collègues au Conseil fédéral dont l’amitié et la confiance ont transformé pendant les sept années écoulées mon travail en joie. Je suis égale­ment très reconnaissant envers mes collaborateurs dans les divers départements dont la gestion m’a été transférée par mes collègues au cours des années. Ces remerciements s’adressent en particulier à mes collaborateurs actuels à tous les niveaux à Berne et dans les postes extérieurs, dont la compétence et le dévouement me tiennent particulièrement à cœur.
Messieurs les Conseillers nationaux et Conseillers aux Etats, mes années d’activité sont tombées dans une époque où les conséquences du développement technique et économique précipité se sont fait sentir plus clairement depuis la fin de la guerre, un développement auquel nous n’avons pas encore pu faire face, ni du point de vue humain ni du point de vue politique. En outre, nous devons assumer une part de responsabilité croissante dans un monde en constante diminution, qui doit résoudre des problèmes de plus en plus difficiles. Donc, notre peuple, les Chambres fédérales et le Conseil fédéral sont confrontés à des tâches importantes tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Elles ne peuvent être résolues qu’à l’aide d’un déploiement de force commune, dans un esprit de sacrifice et par une collaboration dans la confiance mutuelle. En cet instant d’adieux, mon souhait le plus cher est que notre Confédération puisse réussir cette épreuve.
Je vous remercie.

Source: Dem Gewissen verpflichtet. F.T. Wahlen. Zeugnisse aus den Jahren 1940 bis 1965. Directeur de la publication Alfred A. Häsler. Editions Fretz & Wasmuth Verlag AG Zürich/Stuttgart 1966

Le citoyen et la politique extérieure

par Friedrich Traugott Wahlen

Pour terminer, je voudrais encore brièvement aborder les relations entre la politique intérieure et la politique extérieure et par là même, le rôle de chaque citoyen du point de vue de la politique extérieure. Dans des situations graves, le Conseil fédéral a souligné à maintes reprises que la maxime de la neutralité de l’Etat n’oblige pas le citoyen à une neutralité d’opinion. Mais comme tout principe, il ne faut pas s’en servir de façon exagérée, sinon il risque de devenir contreproductif.
Dans le cas de la Suisse, il faut tenir compte du fait que le peuple et les cantons représentent l’organe d’Etat suprême et peuvent en définitive décider des questions les plus importantes, également en politique extérieure, par exemple par l’exercice du droit d’initiative. Ainsi le citoyen porte une plus grande responsabilité que dans la démocratie parlementaire. C’est pourquoi une liberté constitutionnelle tel le droit à la liberté d’expression peut se trouver limitée par la responsabilité face au tout. Lors de la session de mars 1962, et en réponse à l’interpellation Reverdin, le Conseil fédéral a discuté de manière approfondie de ces questions, en relation avec nos liens au monde communiste. Ce qui a été dit à cette occasion est toujours entièrement valable. Je n’ai pas besoin d’y revenir.
Le citoyen individuellement, n’est pas seulement responsable de son attitude face à des Etats et des groupes d’Etats, ce qui implique une certaine réserve de sa part, mais aussi de ses prises de position au sujet de maintes questions de politique intérieure et de son comportement en général, car l’«image» et la position de la Suisse à l’étranger en dépendent grandement. Ces derniers temps, il a souvent été question d’une dégradation de l’image de la Suisse à l’étranger, une question qui a été traitée prioritairement à l’occasion de la Journée des Suisses de l’étranger. Vous n’avez pas tort de penser que le Conseil fédéral s’en préoccupe également. Je crois pouvoir dire que beaucoup de ces propos alarmants ne correspondent pas à la réalité, tandis que d’autres devraient nous donner à réfléchir. Nous ne devons pas les prendre à la légère. L’intensité actuelle des reportages dans la presse, la radio et la télévision, partiellement liés à une chasse aux sensations, peut gonfler même des événements sans signification et donner une importance qu’ils n’ont pas à des courants indésirables. Je vous rappelle certaines actions limitées localement qui ont, à l’étranger, été interprétées comme des tendances xénophobes, ce qui, eu égard à notre réputation traditionnelle d’hospitalité et de compréhension entre les divers groupes linguistiques, peut paraître déconcertant. Le reproche souvent entendu que les vertus nationales de la simplicité et de l’honnêteté seraient en train de se perdre à cause de l’avancée du matérialisme – un souci d’ailleurs partagé par des milieux conscients de leur responsabilité à l’intérieur du pays –, ce reproche doit nous faire réfléchir sérieusement. En outre, il faut mentionner dans ce contexte que certaines de nos dispositions constitutionnelles ne sont plus comprises à l’étranger.
Il ne suffit pas d’expliquer leur survie par l’indépendance de nos institutions de démocratie directe, car la compréhension de celles-ci manque également en grande partie. Voilà une tâche gratifiante pour les partis politiques et la presse. C’est avant tout à eux de se soucier de transmettre l’information nécessaire pour que des affaires devenues urgentes puissent être réglées sans risque d’échouer face à une majorité du peuple ou des cantons. Un tel échec nuirait davantage à notre réputation à l’étranger que le maintien de dispositions légales surannées. Il faut tout spécialement prendre soin de maintenir les acquis qui nous ont coûtés de grands efforts au cours des siècles et qui font tout spécialement partie de l’image de la Suisse. Je pense avant tout à la paix entre les divers groupes linguistiques et confessionnels, une des choses les plus précieuses que nos ancêtres nous ont laissé en héritage et qu’il faut absolument préserver.
A l’époque du nationalisme renaissant, nourri partiellement de conflits raciaux et ethniques, la sauvegarde de ce bien n’est pas seulement un acte d’importance nationale mais aussi internationale. Ces quelques remarques concernant des questions qui exigent toute notre attention doivent suffire. Il faut cependant mettre en exergue qu’outre l’élimination de certains points effectivement critiquables et dont nous devons nous occuper sérieusement, il faut œuvrer pour une meilleure connaissance et une meilleure compréhension des nombreux côtés positifs de notre Etat, de sa politique extérieure, de son économie et avant tout de ses performances culturelles et intellectuelles. Cela peut se faire de diverses manières.
Le développement de nos postes de diplomatie étrangère et de consulats, auxquels revient dans ce domaine une responsabilité directe, a atteint une ampleur considérable, mais concernant le sujet qui nous occupe ici, ce développement supporterait encore un renforcement ciblé en personnel. Etant donné que lors de la session de décembre il sera possible d’ouvrir le débat parlementaire concernant l’article constitutionnel sur les Suisses à l’étranger, il est opportun d’attirer l’attention sur le potentiel que nous avons dans nos colonies de Suisses à l’étranger. Les écoles qu’ils ont fondées, leurs efforts pour créer des centres de rencontre et une augmentation de leurs activités culturelles peuvent approfondir la connaissance de la Suisse dans leurs pays hôtes. Dernièrement, le Conseil des Etats a accepté une demande du Conseil fédéral pour une augmentation échelonnée des contributions fédérales à la fondation Pro Helvetia, et il n’y a pas de doute que le Conseil national prendra la même position. Voilà un pas qui mérite d’être salué. Il faudrait examiner s’il est possible de développer une collaboration plus étroite, reposant sur le bénévolat, entre les nombreuses organisations privées et semi-privées qui représentent d’une façon ou d’une autre les intérêts de la Suisse à l’étranger. Je ne peux ni énumérer ici toutes les organisations et entreprises concernées, ni rendre attentif à tous les autres moyens de publicité ciblée en faveur de notre pays. Le catalogue de possibilités existantes est cependant si impressionnant qu’une certaine coordination de tous les efforts améliorerait considérablement le résultat.
C’est intentionnellement que j’ai placé ces indications à la fin de mon exposé pour démontrer clairement que la politique extérieure n’a pas lieu dans le vide. Ce n’est ni un tissu de maximes abstraites, ni une question de simple représentation dont seraient responsables uniquement le gouvernement et ses services à l’étranger. Ses bases sont fixées par les besoins vitaux de l’Etat et du peuple en relation avec leur environnement. C’est justement parce que notre pays occupe une position privilégiée dans la communauté des peuples, qui doit constamment être réexpliquée, qu’il s’agit d’une tâche commune dans laquelle le Conseil fédéral et les Chambres fédérales doivent être soutenus par le citoyen en tant qu’individu et par des groupes de toutes sortes. Seul un peuple qui comprend la portée de cette tâche, au-delà de ses besoins matériaux et de sécurité, et qui a la volonté de l’assumer en reléguant au besoin les intérêts individuels et de groupes au second plan, seul ce peuple peut espérer légitimement, pouvoir compter, avec l’aide de la Providence, sur la poursuite du destin que beaucoup lui envient. Dans sa politique extérieur, le Conseil fédéral continuera de tout mettre en œuvre pour accomplir consciencieusement et avec circonspection les tâches telles que définies par les dispositions constitutionnelles mentionnées plus haut. Il espère créer ainsi les bases pour l’accomplissement du projet commun précité, qui n’est en réalité rien d’autre que le sens du beau terme de Confédération, transposé dans la vie de tous les jours.    •

Source: Die Schweiz und die Welt. Réponse du Conseil fédéral à l’interpellation Furgler et Hubacher, présentée le 7 octobre 1965, p. 241–245. in:
Dem Gewissen verpflichtet. F.T. Wahlen. Zeugnisse aus den Jahren 1940 bis 1965. Directeur de la publication Alfred A. Häsler. Editions Fretz & Wasmuth Verlag AG Zürich/Stuttgart 1966

Gemeinschaftsgefühl

Gemeinschaftsgefühl (Le sens communautaire)

To know with the mind of the other;
To hear as he hears;
To feel with the heart of the other,
His hopes and his fears.
To walk with his step,
To see with his eyes,
To breathe with his breath,
To weep with his cries.

Comprendre avec l’esprit d’autrui;
Entendre comme il entend;
Ressentir avec le cœur d’autrui,
Ses espoirs, ses angoisses.
Marcher dans ses pas,
Voir avec ses yeux,
Respirer au rythme de son souffle,
Pleurer avec ses larmes.

*

*

To feel a second heart like his in yours,
To know what he needs and to seek it with him.
Gemeinschaftsgefühl, communion of heart,
Gemeinschaftsgefühl, communion of soul.

Ressentir battre en toi un second cœur comme le sien;
Savoir ce dont il a besoin, se mettre à sa recherche avec lui:
Gemeinschaftsgefühl, communauté des cœurs.
Gemeinschaftsgefühl, communion des âmes.

*

*

To know yourself well, now that's a good start,
And then know the other.
To sense what he needs, before he can tell
Like a child with his mother.
To stand in his shoes,
To see from his past,
You must learn how to lose –
That's the first and the last.

Bien se connaître, voilà un bon début,
Et puis connaître autrui.
Ressentir ce dont il a besoin avant qu’il ne puisse le dire,
Comme une mère avec son enfant,
Se mettre dans sa peau,
Voir les choses avec son passé à lui,
Apprendre à s’abandonner –
Voilà le début et la fin.

Joe McCaroll (après la lecture du livre «Das Gemeinschaftsgefühl – Entstehung und Bedeutung für die menschliche Entwicklung. Eine Darstellung wichtiger Befunde aus der modernen Pädagogik» d’Annemarie Kaiser, Zurich 1981